Il faut repenser l’arbitrage
21 janvier 1975. Les membres du Syndicat des employés des services d’entretien et de garages de la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal ont faille débrayer pour protester contre le congédiement d’un confrère. C’était ce que proposait l’exécutif du syndicat. La grève n’a été évitée que parce que les membres ont renversé la proposition qui leur était faite.
Concrètement, on a plutôt décidé que le syndicat augmenterait ses cotisations afin de prêter au confrère congédié un montant d’argent équivalant à son salaire perdu en attendant la décision arbitrale dans cette affaire. Il se peut que le débrayage ne soit que reporté ad- venant que la décision arbitrale soit défavorable au syndicat, mais, pour le moment au moins, on a accepté de passer par cette procédure normale de règlement des griefs.
Ce cas mérite d’être signalé, parce qu’on peut noter depuis quelques années une tendance de plus en plus marquée à rejeter l’arbitrage au profit de la grève, même si celle-ci est alors tout à fait illégale. On n’est pas content d’une mesure prise par l’employeur, on quitte systématiquement le travail pour le forcer à rescinder sa décision. Le Code du travail stipule que ces différends doivent se régler par une tierce personne, soit un arbitre, mais on préfère la force brutale à un recours en justice.
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Il s’agit, bien sûr. d’une tendance inquiétante en ce qu’elle constitue, en quelque sorte, un retour à la loi de la jungle. Mais saurait traiter à la légère. Même su dans le cas particulier et récent du métro, un groupe de syndiqués a manifesté plus de pondération. Il faut se demander pourquoi la formule d’arbitrage des griefs a perdu tellement de sa faveur.
Il y a probablement plusieurs raisons. L’une des principales est sans doute que les arbitrages sont trop longs. Conséquemment, coûtent trop cher. Selon une étude d’un confrère de LA PRESSE, Georges Lamon, étude parue en août dernier, la durée moyenne des arbitrages serait de 175 jours et le coût de $3,000.
Le projet de loi 24, présenté l’été dernier par le ministre du Travail. Mais qui demeure en plan. Il proposait de réduire ce délai à 60 jours. Ce serait encore passablement long. Il n’y a pas si longtemps, le Conseil consultatif du Travail et de la Main-d’œuvre se prononçait en faveur d’un mécanisme d’arbitrage beaucoup plus accéléré. Celui qui limiterait les auditions à une journée. Il obligerait alors l’arbitre à rendre une décision dans les cinq jours qui suivent. Cette procédure sommaire coûterait beaucoup moins cher. On ne la rendrait pas obligatoire. Elle serait tout de même une deuxième voie ouverte aux patrons et syndicats qui voudraient s’en prévaloir.
Syndicat des employés des services d’entretien
Pourquoi ne chercherait-on pas de ce côté une solution au malaise actuel ? On pourrait peut-être s’interroger aussi sur le caractère privé de notre système d’arbitrage. Si on doit le conserver tel quel, n’y aurait-il pas lieu, en certains cas au moins, de prévoir un droit d’appel devant le Tribunal du travail ?