Historique de la Confédération canadienne
Le 1er septembre 1864, à Charlottetown, sur l’Île du Prince Édouard, des délégués des provinces maritimes et des ministres des du Bas et du Haut-Canada (Canada-Uni), se réunissent. Il est convenu que le projet d’une confédération canadienne serait étudié en profondeur.
La seconde conférence a lieu à Québec, du 11 au 27 octobre 1864, sous la présidence de Etienne-Paschal Taché, premier ministre des Canadas – Unis.
Trente trois délégués représentent les Canada-Uni, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, l’Île–du–Prince–Édouard et Terre–Neuve.
Les débats, vifs et passionnés, se tiennent à huis clos. Les Canadiens français et les délégués des provinces maritimes se prononcent pour une union fédérale, alors que les Ontariens préfèrent une union législative.
De son côté, la Grande-Bretagne trouve que le Canada coûte cher au Trésor britannique. Le maintien et le transport des troupes coûte au moins deux millions de livres par an. D’ailleurs, les autorités britanniques sont d’avis qu’un regroupement des colonies britanniques d’Amérique du Nord réglerait le problème de leurs dépenses. Le secrétaire d’État aux Colonies de 1864 à 1866, Edward Cardwell, indique son intention dans cette lettre :
Le gouvernement de Sa Majesté croit fermement qu’il est très souhaitable que toutes les colonies britanniques d’Amérique du Nord acceptent de s’unir pour ne former qu’un seul gouvernement. […] Les provinces de l’Amérique du Nord britannique sont incapables, séparées et divisées comme elles sont, de faire les préparatifs nécessaires pour établir une défense nationale, tâche qui serait facilement assumée par une seule province réunissant toute la population et toutes les ressources du territoire.
Une fédération des colonies britanniques d’Amérique du Nord paraissait alors séduisante, puisqu’elle assumerait les coûts de sa propre défense. Le gouvernement britannique fit connaître sa position en décembre 1864 et exerça des pressions auprès des gouverneurs en poste à Halifax, Fredericton, Charlottetown et Saint John’s. Londres remplaça un gouverneur récalcitrant en Nouvelle-Écosse, en menaça deux autres à Terre-neuve et à l’Île-du-Prince-Édouard, puis inspira un coup d’État au Nouveau-Brunswick.
Entra également dans les discussions du projet confédératif l’épineuse cette fameuses question de la guerre de Sécession, qui faisait alors rage aux États-Unis. Cette question intéressait les négociateurs parce qu’elle touchait les droits et les pouvoirs des États (ou les éventuels pouvoirs des provinces) par rapport aux droits et pouvoirs de l’Union (ou les éventuels pouvoirs du gouvernement fédéral).
Comme le Royaume-Uni avait pris position en faveur du Sud dans le conflit, des tensions qui se transformeront bientôt en crises politiques surgirent entre les États-Unis et les colonies britanniques du Nord. Ainsi, la guerre de Sécession eut pour effet de convaincre beaucoup de Canadiens que la Confédération était certainement la voie la plus sûre pour maintenir l’indépendance de l’Amérique du Nord britannique par rapport aux États-Unis ; certains hommes politiques croyaient qu’une union des colonies britanniques les protégerait contre une annexion américaine éventuelle.
D’autre part, John Macdonald voulut éviter l’éclatement de l’autorité centrale en lui accordant le plus de pouvoirs possibles et en réservant aux provinces le minimum nécessaire à un système fédéral. Plusieurs historiens sont d’avis que Macdonald ait envisagé le gouvernement central comme un «maître» et les provinces comme des «valets». À long terme, il espérait rabaisser les gouvernements provinciaux au rang de quasi municipalités (comme en Nouvelle-Zélande).
Après de longs débats, donc, les Soixante douze résolutions sont approuvées à l’issue de la conférence. Elles serviront de base, après avoir été modifiées et approuvées par chaque province, à l’Acte de l’Amérique du Nord Britannique.
En 1865, les représentants des provinces se réunissent au parlement du Canada-Uni afin de réviser les résolutions constitutionnelles. George-Étienne Cartier, est d’avis qu que les différents groupes nationaux du projet confédératif conserveraient leur identité propre. Lors de la séance du 7 février 1865, il déclare :
Dans notre propre fédération, nous aurons des catholiques et des protestants, des Anglais, des Français, des Irlandais et des Écossais, et chacun, par ses efforts et ses succès ajoutera à la prospérité et à la gloire de la nouvelle Confédération… La diversité des races contribuera, croyez-le, à la prospérité commune….
Lors du vote, le Canada-Ouest (Ontario), la colonie la plus en faveur du projet, accepte massivement la confédération et le Canada-Est (Québec) y adhère de justesse (avec deux voix de majorité, les francophones étant très divisés sur la question) en misant sur l’existence d’un gouvernement provincial
Le projet rencontre toutefois de fortes résistances dans les Maritimes. Malgré les pressions du gouvernement britannique, seuls le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse acquiescent au projet confédéral.
Notons aussi que toutes ces négociations se déroulent sans consultation auprès des populations concernées, alors que le nouveau cadre administratif les implique durant les siècles à venir.
Ainsi, les réformistes de la Nouvelle-Écosse, avec Joseph Howe (1804-1873) à leur tête, reprochent aux «fédéralistes» de ne pas détenir de mandat de la population avant de négocier l’entente.
C’est essentiellement John Macdonald qui rédigea la majeure partie de la Constitution. Un jour, il confiera au juge Gowan de Barrie : «Tout ce qu’il y a de bon ou de mauvais dans la Constitution est de moi.»
Macdonald s’était inspiré à la fois du modèle britannique (une monarchie constitutionnelle avec régime parlementaire) et du modèle américain (une fédération impliquant un gouvernement central partageant des compétences avec des gouvernements régionaux).
Le 29 mars 1867, cet Acte est voté par le Parlement Britannique. Le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et les Canadas-Unis sont réunis dans le Dominion du Canada.
Finalement, le 8 mai 1867, le Parlement britannique adopta l’Acte de l’Amérique du Nord britannique (qu’on rebaptisera officiellement en 1982 en Loi constitutionnelle de 1867). La nouvelle Constitution fut sanctionnée par la reine Victoria le 29 mars 1867 et proclamée, à midi, le 1er juillet 1867. L’Acte de l’Amérique du nord Britannique entre en vigueur le premier juillet 1867 avec comme nom officiel le Dominion du Canada.
Plusieurs habitants du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse en furent déçus et s’objectèrent, mais ils ne purent légalement rien faire.
À la suite des premières élections fédérales, John Macdonald et les conservateurs formeront le premier gouvernement du Canada et domineront la scène fédérale durant les trois prochaines décennies.
(Terre-Neuve ne signe pas l’Acte et ne rejoindra la Confédération que beaucoup plus tard, en 1949).
Voir aussi :
- Historique de la question linguistique
- Organisations loyalistes
- L’émeute du 25 avril 1849
- L’Acte de l’Amérique du Nord
- Les Clear Grits