Saut en hauteur : Wszola, Greg, Stones

Stones échoue; Joy termine bon deuxième

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On pourrait écrire un roman sur cette finale de saut en hauteur des Jeux olympiques de Montréal (27 juillet 1976). La version canadienne s’intitulerait sûrement « Greg Joy, médaille d’argent ». Les Américains songeraient probablement à « Dwight Stones, la grande déception des Jeux ». Mais ce sont seulement les Polonais qui pourraient écrire : « Jacek Wszola, notre champion olympique ».

Tous ces titres, s’ils sont exacts, rendraient bien peu tout ce qu’a été le saut en hauteur hier au Grand Stade.

Il y avait cette médaille d’argent, cette première médaille des Jeux en athlétisme, celle de Greg Joy, un moment de triomphe que l’on avait tellement attendu, tellement désiré, et qui clôturait si bien une semaine décevante.

« J’aurais voulu la médaille d’or, déclarait Greg Joy, mais j’espère que le Canada se contentera de sa médaille d’argent ». À en juger par le tonnerre d’applaudissements inlassables qui a salué la remise de cette médaille d’argent, le Canada semblait satisfait.

Mais Joy oubliait tout de même quelque chose de très important. C’est qu’il avait offert à la foule encore plus que la médaille d’argent. Il lui avait présenté en même temps que Wszola la défaite du « gros méchant » Stones…

Même dans la défaite, Stones demeurait la grande vedette. Le public a pris autant de plaisir à le huer, lui et sa médaille de bronze, qu’à applaudir Joy, un plaisir qui ressemblait malheureusement un peu à l’acharnement d’un gagnant sur la dépouille de son adversaire.

Il est vrai que même défait, Dwight Stones n’a pas tout à fait la langue dans sa poche. Il n’a pu faire mieux que 2m21, lui qui a réussi le record mondial de 2m30, tandis que Joy réussissait 2m23 à son troisième essai et le Polonais 2m25, à son deuxième essai. Pour cela, il devait des explications au peuple, mais surtout aux journalistes américains : « Quand vous vous attendez à quelque chose, et que vous ne l’obtenez pas, cela fait très mal, déclarait-il. La médaille de bronze pour moi indique seulement que j’ai échoué ».

« Rien ne n’a dérangé, que la pluie. Dès qu’il a commencé à pleuvoir sérieusement, j’ai su que j’étais en mauvaise posture. J’étais prêt à sauter un record mondial et je l’aurais sûrement fait s’il avait fait beau. Mais à cause de mon style, je n’ai aucune chance lorsqu’il pleut. En arrivant sous la barre, j’avais l’air d’un hydroplane, je glissait beaucoup trop ».

Ce n’était évidemment que des excuses.

Mais il faut quand même avouer que Stones avait un peu raison.

« Il pleuvait aussi pour les autres, déclarait un journaliste un peu agressif. »

Lui aussi avait raison, mais Stones n’avait pas complètement tort. Puisque les autres sauteurs comptent beaucoup plus que lui sur la puissance d’impulsion et donnent moins d’importance à la vitesse lors de la course d’élan. Avec son accélération, Stones n’a aucune chance lorsqu’il pleut.

Car il faut quand même un peu en parler du public, puisque les sauteurs, eux, s’y sont longuement attardés.

« L’ovation qu’on m’a servie a sûrement été le plus grand moment de ma vie, mais il a presque été totalement détruit lorsqu’on s’est mis à huer Dwight. Je me sentais tellement mal à l’aise.

Jacek, lui était concis : « Le public ne devrait jamais avoir tels partis pris. »

Stones, pour sa part, n’était pas prêt d’oublier. « Je ne pardonnerai jamais cela. Une telle réception. Jamais je ne l’oublierai… Surtout que j’ai expliqué longuement hier que je n’avais jamais dit haïr les Canadiens français ».

En tout cas, maintenant, ça y est…

Greg Joy Saut en hauteur
Greg Joy franchit la barre et mérite la médaille d’argent. Photographie de l’époque, libre de droits.
jacek wszola
Jacek Wszola, nouveau champion olympique. Photographie de l’époque, libre de droits.
dwight stones
Dwight Stones… la défaite. Photographie de l’époque, libre de droits.

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