Les Nordiques disparaissent. Aubut confirme la fin de l’équipe de Québec : C’est signé, scellé et livré
La conférence de presse annonçant la vente des Nordiques de Québec au groupe Comsat Vidéo, pour la somme de 75 millions US, est terminée depuis une quinzaine de minutes. À une extrémité de la salle, Claude Blanchet, PDG du Fonds de solidarité de la FTQ, un des principaux actionnaires de l’équipe, s’apprête à rentrer à Montréal.
« Le marché de Québec n’est pas suffisant pour opérer un club de la Ligue nationale, lance-t-il. La démonstration économique est pétante. La région n’est pas assez populeuse et les revenus pas assez importants. Les prévisions les plus réalistes laissaient entrevoir des pertes de 26 millions par an au cours des dix prochaines années. Un trou sans fin, des pertes incommensurables. Les actionnaires, étaient-ils prêts à les combler pour garder l’équipe dans la capitale? Collectivement, nous avons répondu non.
Voilà, net et sec, comment les propriétaires des Nordiques ont justifié le transfert de la concession à Denver, au Colorado.
Manifestement sur la défensive, soucieux de démontrer qu’ils avaient tout tenté dans l’espoir d’assurer la survie des Bleus dans la capitale, les représentants du Fonds de la solidarité, de la Mutuelle des fonctionnaires, de la papetière Daishowa, de l’épicier Métro-Richelieu, accompagnés de Marcel Dutil, de Canam-Manac, et de Marcel Aubut, président des Nordiques, ont évolué la hausse incontrôlable des salaires des joueurs pour expliquer la vente de l’équipe à des intérêts américains.
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À ceux qui reprochent aux propriétaires des Nordiques de ne pas attendu une autre saison avant de vendre l’équipe, M. Aubut a rétorqué. « Si, pour toutes les interventions au dossier, il s’agissait d’une décision d’affaires, comment peut-il en être autrement pour les propriétaires qui, eux, ont tout à perdre ? Devant cette situation, et même si chacun des propriétaires avait le droit d’empêcher la transaction, le temps était venu de conclure ».
Le président des Nordiques, devenu aujourd’hui un de très rares multi-millionnaires de la région de Québec, a tracé un portrait désastreux des revenus de l’équipe par rapport à ceux de ses compétiteurs.
« Les assistances nous permettent d’encaisser en moyenne 350 000$ par match. À Chicago, c’est plus de 700 000$US. Quant à la publicité sur les bandes, un forfait à New York coûte 800 000$ US par an. Alors qu’il ne peut excéder 250 000$CAN, à Québec. Malgré notre succès sur le plan de la gestion et de la mise en marché, la situation financière du club était devenue très alarmante ».
M. Aubut a indiqué que la nouvelle convention collective des joueurs, signée en janvier dernier, a fait très mal aux Nordiques.
« Privés d’un plafond salarial pour les six prochaines années. Sans consensus au sein de la Ligue nationale pour établir un partage des profits entre les grands et les petits marchés, la construction d’un nouvel amphithéâtre était un préalable pour permettre la survie à longtemps des Nordiques à Québec », a-t-il soutenu.
Le chroniqueur sportif de La Presse Réjean Tremblay résume la situation en rappelant quelques phrases prémonitoires de cet événement et conclut, en guise d’épitaphe. « Salut, les Nordiques! À Montréal, on aimait tellement vous haïr… »
(Texte publié dans La Presse, le 26 mai 1995).
