Seigle

Seigle au Québec

De saveur plus prononcée et plus sucrée que le blé, le seigle (nom scientifique Secale cereale, famille des graminées) contient des fibres aux nombreux effets bénéfiques. Il permet d’apporter de la variété dans les plats à base de céréales. D’ailleurs, le seigle fournit plusieurs composés phytochimiques, associés à diverses propriétés santé.

Le seigle est très proche du blé. Si bien que le seigle a d’abord été inclus dans ce dernier. Cette proximité botanique a permis de croiser les deux grains pour en obtenir un troisième, le triticale, également offert dans le commerce.

Historique du seigle

Tout comme l’orge et le blé, le seigle vient du Moyen-Orient, mais à leur différence, il préfère les climats froids. Si bien que son habitat naturel se situe plutôt au Nord de cette région de même qu’en altitude.

Toutefois, le seigle est arrivé assez tardivement dans l’agriculture, du moins comme culture en soi. Pendant longtemps, il sera récolté accidentellement en même temps que le blé ou l’orge sans avoir été expressément semé, se comportant plutôt comme une mauvaise herbe qui envahissait les champs où ces deux céréales étaient cultivées. On domestique le seigle 3 000 ans à 4 000 ans avant notre ère, probablement en Anatolie, où l’on a entrepris de le domestiquer.

En Anatolie, on donne le nom de « blé d’Allah » au seigle, car on croit qu’Allah l’a semé pour compenser les piètres récoltes des mauvaises années et nourrir ses enfants.

Cependant, il ne sera apprécié que dans les régions où les autres céréales poussent mal, faute d’un sol riche ou de températures clémentes. Les Grecs mépriseront donc cette céréale dont ils n’ont nul besoin. Ils seront imités en cela par les Romains, qui trouvent qu’elle sent mauvais. Ils ne la toléreront qu’en mélange avec l’épeautre et, encore, uniquement pour nourrir les classes pauvres.

Au Moyen Âge, la nécessité de nourrir une population croissante conduira à cultiver des terres marginales, peu propices au blé et à l’orge, mais qui conviennent au seigle. Il prendra donc une grande importance en de nombreux pays d’Europe, particulièrement pour les paysans, qui le consomment au quotidien, tandis qu’on réserve le blé pour les populations urbaines.

Le terme « seigle » est apparu dans la langue française en 1350. Il vient soit du latin secale qui signifie « ce que l’on coupe », soit de l’ancien provençal segle.

En Amérique du Nord, il est cultivé dès les premiers temps de la colonisation, particulièrement dans le Nord-Est, où le blé et l’orge souffrent des températures froides.

Le pain est le principal produit alimentaire à base de seigle. Dans les pays de l’Europe de l’Est, on fait, avec le pain rassis, du kvas, une boisson légèrement alcoolisée aux propriétés nutritives reconnues. Aux États-Unis, une bonne partie des grains va à la fabrication de whisky, tandis qu’en Russie on en fait de la vodka.

Effets bénéfiques du seigle

Le seigle se retrouve rarement dans nos assiettes d’aujourd’hui. Pourtant, il devrait avoir sa place dans une alimentation équilibrée, car le seigle aurait divers effets bénéfiques sur la santé. Il serait bénéfique contre les maladies cardiovasculaires, le diabète de type 2 et le cancer. Sa consommation améliorerait aussi la santé intestinale.

Les grains céréaliers contiennent des composés phytochimiques. L’un d’eux, l’acide phytique, a la capacité de se lier à certains minéraux (calcium, zinc, fer, magnésium), ce qui réduit leur absorption dans l’intestin. Toutefois, dans un contexte où il y abondance et diversité alimentaire et où la déficience nutritionnelle est plutôt marginale, cet effet a peu d’impact sur la santé. La consommation d’acide phytique (ou phytate) serait par contre bénéfique puisqu’il agit comme antioxydant qui contribue à protéger contre le cancer du côlon et contre les maladies cardiovasculaires.

Les produits céréaliers sont d’une grande importance dans notre alimentation. Le Guide alimentaire canadien insiste sur le choix de produits céréaliers à grains entiers ou enrichis.

Ces recommandations sont basées sur les résultats de certaines études épidémiologiques qui indiquent que la consommation de grains entiers serait reliée à un risque moindre de maladies cardiovasculaires et de diabète, de certains cancers et d’obésité. Ces effets bénéfiques seraient attribuables à la synergie entre les nombreux composés contenus dans les produits céréaliers à grains entiers, par exemple les fibres, les antioxydants, les vitamines et les minéraux. Comme la majorité de ces composés sont contenus dans le son et le germe, on a avantage à consommer les céréales les moins raffinées possible.

On retrouve dans le seigle des lignanes végétales et des isoflavonoïdes, deux types de phytoestrogènes qui pourraient avoir des effets préventifs contre certains cancers, tels que les cancers du sein et du côlon. De plus, le pain de seigle aurait la propriété d’augmenter le taux sanguin et l’excrétion urinaire d’une lignane, soit l’entérolactone, autant chez les hommes que chez les femmes. L’entérolactone est la principale lignane formée après la consommation de son de seigle. L’entérolactone sérique serait associée à une réduction du risque de cancer du sein.

Les antioxydants sont des composés qui réduisent les dommages causés par les radicaux libres dans le corps. Ces derniers sont des molécules très réactives qui seraient impliquées dans l’apparition des maladies cardiovasculaires, de certains cancers et d’autres maladies liées au vieillissement.

Le seigle contient aussi plusieurs classes de stérols dont des stérols combinés avec de l’acide férulique (St-Fer). Bien que les St-Fer soient la classe de stérols la moins abondante dans le grain entier de seigle, leur présence est importante parce qu’ils sont considérés comme étant de potentiels antioxydants.

Les alkylrésorcinols sont des gras phénoliques (des molécules que les plantes produisent afin de se protéger contre les bactéries et les champignons) présents en grande quantité dans la couche externe du blé et du seigle. Ils se retrouvent en très faible quantité dans les autres céréales. Les alkylrésorcinols pourraient avoir quelques effets bioactifs. Ils peuvent être absorbés par les humains et être détectés sous forme intacte dans le plasma et les globules rouges, et sous forme métabolisée dans l’urine. Il semblerait qu’il y a un lien entre la consommation de pain de seigle à grains entiers et les taux d’alkylrésorcinols dans le plasma et les globules rouges. Ce qui signifie que la quantité d’alkylrésorcinols présente dans l’organisme indique environ la quantité de seigle consommée. Les alkylrésorcinols ont été reportés comme étant des antioxydants et auraient des activités anticancéreuses.

Les acides phénoliques extraits du son de seigle pourraient contribuer aux effets antioxydants du seigle. Les quatre principaux acides phénoliques du son de seigle sont : l’acide caféique, l’acide sinapique, l’acide férulique et le p-coumarique. L’acide férulique est reconnu pour avoir un potentiel antioxydant en empêchant l’oxydation du LDL-cholestérol (« mauvais » cholestérol). Parmi les acides phénoliques du seigle, c’est l’acide caféique qui a le plus grand pouvoir antioxydant. Il est suivi par l’acide sinapique qui serait aussi un antioxydant potentiel. Vient en dernier lieu le p-coumarique qui aurait moins d’effet antioxydant que les trois autres.

Le contenu moyen en fibres du seigle est d’environ 16 g par 100 g de seigle. Les effets positifs des fibres du seigle sont nombreux. Elles pourraient diminuer le taux de cholestérol en réduisant l’absorption des matières grasses et en aidant à la réabsorption de l’acide biliaire, dérivé du cholestérol dans le foie. L’acide biliaire joue un rôle important dans la digestion et l’absorption des graisses.

Dans une étude chez des hommes et des femmes en santé, les hommes qui consommaient en moyenne de huit à dix tranches de pain de seigle par jour ont vu leur LDL-cholestérol diminuer et leur concentration de cholestérol sanguin totale réduire de 8 %. Ces réductions dépendaient de la quantité de pain de seigle consommée par jour. Ces diminutions sont importantes dans un contexte de réduction du risque de maladies cardiovasculaires.

La consommation de fibres provenant des céréales, telle que le seigle, pourrait diminuer les risques d’infarctus et d’accidents vasculaires cérébraux. Les fibres pourraient aussi aider à diminuer la constipation en augmentant la fréquence et la quantité de selles excrétées, en diminuant le temps de transit (de passage) intestinal et en rendant la défécation moins difficile chez les hommes et les femmes en santé. Les fibres du seigle auraient la propriété d’améliorer la digestion et l’absorption des glucides dans l’intestin grêle et conséquemment la sécrétion d’insuline par le pancréas. Les besoins du corps en insuline sont plus faibles après la consommation de pain de seigle qu’après la consommation de pain blanc, ce qui serait bénéfique pour le contrôle du diabète de type. Les différences dans le contenu en fibres et les caractéristiques structurelles entre les pains blanc et de seigle pourraient expliquer ces résultats intéressants.

Les résultats d’une étude démontrent que la consommation d’une quantité normale de pain à base de farine complète de seigle dans une alimentation équilibrée aurait des effets favorables sur la fonction intestinale et contre les risques de cancer du côlon.

La farine de seigle est une excellente source de manganèse, tandis que le grain de seigle est une excellente source pour la femme et une bonne source pour l’homme, leurs besoins étant différents. Le manganèse agit comme cofacteur de plusieurs enzymes qui facilitent une douzaine de différents processus métaboliques. Il participe à la prévention des dommages causés par les radicaux libres.

Le pain de seigle est une bonne source de sélénium. Ce minéral travaille avec l’une des principales enzymes antioxydantes, prévenant ainsi la formation de radicaux libres dans l’organisme.

Le grain de seigle, la farine et le pain de seigle sont des sources de phosphore. Le phosphore constitue le deuxième minéral le plus abondant de l’organisme après le calcium. Il joue un rôle essentiel dans la formation et le maintien de la santé des os et des dents. Il participe à la croissance et à la régénérescence des tissus et aide à maintenir à la normale le pH du sang. Le phosphore est aussi l’un des constituants des membranes cellulaires.

Le grain de seigle est une source de magnésium qui participe au développement osseux, à la construction des protéines, aux actions enzymatiques, à la contraction musculaire, à la santé dentaire et au fonctionnement du système immunitaire.

Le grain et la farine de seigle sont des sources de fer. Chaque cellule du corps contient du fer. Ce minéral est essentiel au transport de l’oxygène et à la formation des globules rouges dans le sang. Il joue aussi un rôle dans la fabrication de nouvelles cellules, d’hormones et de neurotransmetteurs.

Le grain de seigle est une source de zinc qui participe notamment aux réactions immunitaires, à la fabrication du matériel génétique, à la perception du goût, à la cicatrisation des plaies et au développement du fœtus. Il interagit également avec les hormones sexuelles et thyroïdiennes. Dans le pancréas, il participe à la synthèse, à la mise en réserve et à la libération de l’insuline.

Le seigle est une source de cuivre. En tant que constituant de plusieurs enzymes, cet élément est nécessaire à la formation de l’hémoglobine et du collagène dans l’organisme. Plusieurs enzymes contribuent à la défense du corps contre les radicaux libres.

Le grain et le pain de seigle sont des sources de vitamine B1. Appelée aussi thiamine, la vitamine B1 fait partie d’une coenzyme nécessaire à la production d’énergie principalement à partir des glucides que nous ingérons.

Le pain de seigle est une source de vitamine B2. Cette vitamine est aussi connue sous le nom de riboflavine. Elle joue un rôle dans le métabolisme de l’énergie de toutes les cellules. Elle contribue à la croissance et à la réparation des tissus, à la production d’hormones et à la formation des globules rouges.

Le grain et le pain de seigle sont des sources de vitamine B3, appelée niacine. Cette vitamine participe à de nombreuses réactions métaboliques et contribue particulièrement à la production d’énergie à partir des glucides, des lipides, des protéines et de l’alcool que nous ingérons. Elle participe aussi au processus de formation de l’ADN.

Le grain de seigle est une source d’acide pantothénique ou vitamine B5. Il participe à plusieurs étapes de la synthèse des hormones stéroïdiennes, des neurotransmetteurs et de l’hémoglobine.

Le pain de seigle est une source de folate (vitamine B9) qui participe à la fabrication de toutes les cellules du corps, dont les globules rouges. Cette vitamine joue un rôle essentiel dans la production du matériel génétique (ADN, ARN), dans le fonctionnement du système nerveux et du système immunitaire, ainsi que dans la cicatrisation des blessures et des plaies.

Comme elle est nécessaire à la production des nouvelles cellules, une consommation adéquate est primordiale durant les périodes de croissance et pour le développement du fœtus.

Précautions : La maladie cœliaque

Également connue sous le nom d’intolérance, d’entéropathie ou d’hypersensibilité au gluten, la maladie cœliaque touche environ 4 personnes sur 1 000 en Amérique du Nord. Les gens qui en sont atteints présentent une intolérance permanente au gluten, une protéine qui se retrouve dans le grain de plusieurs céréales. Le seigle contient du gluten, ce qui signifie qu’il est préférable de ne pas en consommer lorsqu’on est intolérant au gluten.

Précautions : l’ergotisme

On a recensé des dizaines, voire des centaines d’épidémies d’ergotisme au cours des siècles. Cette maladie, autrefois appelée « Feu de Saint-Antoine » ou « Mal des Ardents », résulte de la consommation de farines préparées avec des grains de céréales, surtout de seigle, infectés par l’ergot. Ce champignon produit deux types de symptômes, soit la nécrose et la gangrène des extrémités, qui entraînent souvent des convulsions et des hallucinations causant des comportements aberrants. C’est au XVIIIe siècle qu’on établit le lien entre ces divers symptômes et la consommation de farine ergotée.

Aux États-Unis, des chercheurs modernes ont émis l’hypothèse que l’épisode de « sorcellerie » qui s’est déclarée à Salem en 1632 et qui a touché une dizaine de jeunes filles – les célèbres sorcières de Salem – aurait été en fait attribuable à une intoxication à l’ergot de seigle. Cette hypothèse a fait son chemin et, en examinant les archives françaises rétrospectivement, on a pu constater qu’il n’était pas rare que les épisodes de sorcellerie coïncident avec les épidémies d’ergotisme. De fait, certains affirment que les chasses aux sorcières ont rarement eu lieu là où l’on ne mangeait pas de seigle, ce qui pourrait expliquer l’ampleur du phénomène en Allemagne, grande consommatrice de cette céréale.

Quelques précisions concernant les produits de seigle :

Le pain d’épices, dont il existe de nombreuses variantes, est composé, dans sa plus simple expression, de farine de seigle, de miel, de lait, d’œufs et d’épices dont on dispose au moment de sa confection, telles graine d’anis et de coriandre, cannelle, muscade, clou de girofle, zeste de citron ou d’orange.

Pain Pumpernickel : On considère que le pain Pumpernickel vendu au Québec est contient de la farine de seigle. En fait, la plupart des pains vendus sous ce nom ne renferment pas de farine de seigle ou s’ils en renferment, il s’agit d’une farine hautement raffinée. La coloration du Pumpernickel est attribuable à la mélasse ou au caramel que l’on emploie dans leur fabrication. Il faut lire la liste des ingrédients pour s’assurer qu’on a affaire à un véritable pain de seigle.

pain de seigle
Pain de seigle. Photo : © GrandQuebec.com.

Bibliographie :

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Voir aussi :

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