Maladie de Pick
Forme de démence décrite par Pick en 1903, survenant à l’âge présénile, principalement chez la femme, et correspondant à une atrophie spéciale de certaines zones corticales (frontale, temporale).
Elle débute vers 50 à 60 ans, parfois plus tôt, par un fléchissement du jugement, de l’attention dirigée, de la mémoire de fixation, causant de graves perturbations dans la vie courante du malade et dans toutes les opérations de synthèse intellectuelle nécessitant association des idées, réflexion.
Cet affaiblissement mental va s’accroissant progressivement jusqu’à un état démentiel. L’apathie affective est très prononcée et l’indifférence émotionnelle très accusée.
À ces troubles démentiels s’ajoutent des signes de lésions en foyer : 1) L’atrophie frontale toujours très marquée entraîne l’absence d’initiative, la désorientation, la « préhension forcée » (« grasping reflex »); 2) L’atteinte de la zone de Wernicke entraîne des troubles du langage, aphasie surtout de type amnésique. Les mots sont rarement déformés; il n’y a pas de dysarthrie. Plus tard, on peut avoir de la paraphasie et le tableau complet d’une aphasie de Wernicke; 3) On a décrit, par extension des atrophies, d’autres signes neurologiques (apraxie idéatoire, cécité corticale). L’évolution est progressive vers l’inactivité totale et le gâtisme. La durée moyenne est de deux à six ans.
Le substratum de cette variété de démence est une atrophie corticale assez élective des lobes frontaux et temporaux antérieurs, mais susceptible de gagner des zones voisines (pariéto-occipitales). L’encéphalographie gazeuse met en évidence, durant la vie du malade, cette atrophie corticale. Histologiquement on trouve de la dégénérescence lipo-pigmentaire des cellules de toute l’écorce (cellules dilatées et ballonnées), pouvant quelquefois gagner les ganglions de la base. Pas de lésions vasculaires, pas de plaques séniles. Altérations neurofibrillaires très localisées et discrètes.
Cette démence présénile est assez voisine de la maladie d’Alzheimer et, pour certains auteurs, ces deux maladies ne seraient que des variantes d’un même processus histométabolique. Toutefois, sur le terrain clinique, on peut opposer l’indifférence et l’apathie de la maladie de Pick à l’agitation plus fréquente, aux troubles de la marche, aux réactions impulsives et aux crises convulsives rencontrées dans la maladie d’Alzheimer. Enfin, l’aphasie dans cette dernière maladie prend l’aspect d’un bavardage paraphasique avec altération des mots. En outre, les asymbolies multiplies, l’apraxie, sont plus rares dans la maladie de Pick que dans la maladie d’Alzheimer.
Le diagnostic d’avec les autres démences préséniles n’est guère à faire qu’avec une artério-sclérose cérébrale précoce; mais celle-ci s’accompagne de céphalées, de vertiges et procède souvent par petits ictus avec régression partielle des symptômes, tandis que dans la maladie de Pick l’évolution est assez régulièrement progressive (v. Artério-sclérose cérébrale).
La paralysie générale survenant à cet âge a, pour elle, ses signes humoraux et anamnestiques.
La pathogénie de la maladie de Pick n‘est pas clairement élucidée. Pour Marchand, il s’agit d’une encéphalose, comme dans la maladie d’Alzheimer assez voisine; pour Ferrero, il s’agit d’une atrophie par ischémie consécutive à des spasmes vasculaires. Pour d’autres, il s’agirait d’une hypovitaminose. Beaucoup d’auteurs la considèrent comme une affection du groupe des hérédodégénérations nerveuses, d’une maladie par abiotrophie dans laquelle la prédisposition héréditaire joue un rôle important. Plus récemment, Schenk, s’appuyant sur des constatations anatomiques de 8 cas personnels tout en accordant une importance majeure au facteur hérédité, pense que des lésions vasculaires, des poussées de leptoméningite, surajoutées donnent à cette pathogénie une certaine complexité.
Ant. Porot.
Voir aussi :
