Maladies contagieuses au Québec
Historique des maladies contagieuses dans la Province de Québec, décade 1922-1931
1. Tuberculose
La tuberculose tient le premier rang sur le tableau des maladies contagieuses et le cinquième sur celui des principales causes de décès dans la province de Québec. Ses victimes atteignent le total de 3,238 chaque année, soit 9.2 pour cent de l’ensemble des décès. Elle nous enlève presqu’autant de vies (47.6%) que toutes les autres maladies contagieuses ensemble. On voit ainsi tout le tort qu’elle nous cause. Ajoutons que nous constatons avec plaisir que la tuberculose diminue dans la province de Québec. Cette amélioration, commencée vers 1905, s’est accentuée de plus en plus particulièrement au cours de la dernière décade. Il s’y est ainsi réalisé une épargne annuelle de 636 vies. Voilà qui est encourageant, mais il faut ajouter que nous sommes encore en arrière de toutes les autres provinces. Demandons-nous pourquoi cette maladie nous enlève chaque année 3,238 victimes alors qu’elle ne s’en prend que 1,832 dans Ontario dont le chiffre de la population dépasse le nôtre? Il nous faut donc redoubler d’efforts pour rejoindre les autres provinces qui nous ont devancés.
2. Grippe
Nous ne connaissons pas encore sûrement l’agent causal de cette maladie. Nous savons cependant que la grippe est éminemment contagieuse. Dans ces conditions, pour entreprendre avec quelque profit l’étude de cette cause de décès, nous devons attendre que les savants nous aient fourni les précisions qui nous manquent actuellement.
3. Diphtérie
La diphtérie diminue dans notre province. Cette amélioration nous permet de réaliser une épargne annuelle de 252 vies. Or, avec les armes dont nous disposons actuellement pour lutter contre elle, on peut affirmer que cette maladie devrait complètement disparaître. Nous ne devons pas nous arrêter dans la voie de progrès dans laquelle nous nous sommes décidément engagés. Nous pouvons faire plus et mieux encore dans l’avenir ainsi que nous le démontrent les autres provinces, et en particulier, celle d’Ontario.
En effet, au cours de la dernière décade, pendant que la diphtérie nous enlevait une moyenne annuelle de 443 vies, la même maladie N’en prenait que 266 en Ontario. En d’autres termes, pendant que nous avions un taux de 16.8, Ontario en réalisait un de 8.4, soit la moitié du nôtre. Notre meilleur taux, soit 11.1 en 1930 et 1931, est dépassé par Ontario depuis 1923. Nous sommes donc de sept années en retard sur la province voisine. Pour expliquer notre situation moins favorable, on peut avancer que Québec compte 35.6 pour cent de sa population dans les groupes d’âge les plus aptes à prendre la diphtérie, soit moins de quinze ans, contre 27.7 pour cent en Ontario. Avec notre majorité de 63,679, il n’est pas surprenant que nous ayons plus de décès ! Disons plutôt que si nous avons un plus grand nombre d’enfants, nous avons plus raison ici qu’ailleurs de mettre à leur disposition les acquisitions de la science pour les préserver sûrement de la diphtérie et les conserver à la province qui a besoin de toutes ses unités.
4. Coqueluche
La coqueluche ne diminue pas. C’est que les savants paraissent n’avoir réussi que tout dernièrement à nous fournir l’arme précieuse de la vaccination. Formons des vœux que leurs expériences aillent en se confirmant pour qu’il nous soit possible de conserver à notre capital humain les 437 vies que cette maladie vient nous prendre chaque année.
5. Fièvre typhoïde
La fièvre typhoïde est en régression chez nous. Les deux dernières décades accusent les diminutions respectives de 23 et 40 pour cent. Le nombre moyen annuel de ses décès est descendu de 474 de 1912 à 1921 à 338 au cours des dix dernières années. L’épargne de vies ainsi réalisée donne un total de 231 par année. Il faut ajouter, toutefois, que, malgré cette amélioration, Québec est encore la dernière des provinces du Canada. Nous fournissons plus de la moitié de tous les décès du pays. Le taux le plus favorable que nous ayons touché, soit 8.1 en 1931, était déjà dépassé en Ontario en 1918 ; nous sommes donc 18 ans en retard sur la province voisine. Ici, la fièvre typhoïde est trois fois plus meurtrière que là. En face de ces chiffres, notre situation parait encore pour le moins anormale. Les remèdes apportés n’ont pas encore produit tous les résultats désirables. Empressons-nous de les étendre à toute la province pour en bannir pratiquement la fièvre typhoïde à l’exemple des autres provinces qui nous ont devancés.
6. Syphilis
Le nombre des décès attribués à la syphilis n’est pas et ne peut pas être complet. L’étude ne peut en être entreprise qu’avec la plus grande réserve. Il faut admettre, toutefois, que le péril vénérien existe chez nous peut être plus qu’on n’est porté à le croire. Que tous donc collaborent activement à la campagne entreprise contre lui pour en protéger notre population dans la plus large mesure possible.
7. Rougeole
La marche de la rougeole dans la province est classique ; elle est marquée par un retour cyclique d’une régularité remarquable. Il faut donc s’attendre à un retour offensif de la maladie tous les trois ans. Cependant, ses attaques se font de moins en moins meurtrières. Par suite de la proportion élevée de sa population parmi les premiers groupes d’âge, notre province donne le taux le plus élevé de mortalité par rougeole. Pour protéger nos enfants plus efficacement contre cette maladie, il nous faut attendre, de la part des savants, des armes plus efficaces que celles dont nous disposons actuellement.
8. Scarlatine
On peut dire autant de la scarlatine. Mais ici, nos espérances sont plus fondées puisque les expériences en cours nous permettent d’entrevoir le succès dans un avenir assez rapproché.
9. Appareil circulatoire
Si on excepte la mortalité infantile et les maladies contagieuses qui comprennent plusieurs rubriques, on constate que, ici comme partout ailleurs, les maladies de l’appareil circulatoire constituent la cause la plus importante des décès. Par suite du vieillissement graduel de la population, elles ont même partout une tendance à augmenter. Mais grâce à la distribution par groupes d’âge encore favorable de notre population, notre taux de mortalité se compare avantageusement avec ceux de la plupart des autres provinces. Comme nos connaissances sur l’étiologie de ces maladies se précisent de plus en plus, il est à espérer que la situation pourra quelque peu s’améliorer dans l’avenir.
10. Maladies des voies respiratoires
Les taux de mortalité par les maladies des voies respiratoires accusent d’assez notables différences. Favorables dans l’ouest, ils augmentent graduellement à mesure que nous atteignons les provinces de l’est. Pourquoi en est-il ainsi ? Faut-il y voir l’influence du climat ? Ou d’autres facteurs, comme la distribution moins compacte de la population dans les grandes plaines de l’ouest, entrent-ils en cause ? Quoiqu’il en soit, dans la province de Québec, ces maladies sont en régression, surtout depuis l’année 1924. Comment expliquer le phénomène ?
Faut-il y voir l’influence heureuse de progrès réalisés dans leur traitement? Est-il la conséquence d’une diminution réelle de la morbidité? Il paraît bien difficile de risquer une réponse. À cause du tort que nous font les maladies des voies respiratoires, il convient de rechercher les éléments de la lutte que l’on peut tenter d’entreprendre contre elles. Dans le cas de plusieurs maladies contagieuses, elles surviennent souvent pour terminer la scène. L’infection joue donc un rôle important. Un autre facteur que notre étude permet de confirmer, c’est le refroidissement.
En effet, faible en été, la proportion des décès causés par ces maladies est doublée et triplée en hiver. Pour limiter l’intervention de ces deux causes, il est un moyen sur lequel on ne saurait trop insister, c’est l’enseignement de l’hygiène à toute la population, particulièrement à la jeune génération qui fréquente les écoles. Il n’y a aucun doute que, s’il était systématiquement poursuivi, il serait en mesure de nous conserver plusieurs centaines de vies précieuses.
11. Maladies des reins
Les décès causés par les maladies des reins sont en augmentation partout. La province de Québec ne fait pas exception à cette règle. Pour résoudre ce problème, deux moyens s’offrent à notre disposition: d’abord l’enseignement systématique de l’hygiène dans toutes les écoles, cet enseignement étant essentiellement orienté dans le sens pratique; puis, l’examen médical annuel de toute la population. Voilà un effort qui s’impose puisqu’il est susceptible de découvrir à temps un bon nombre de malades qui ne sont qu’au début de l’évolution de leur maladie et qu’un régime approprié pourrait maintenir dans la bonne voie pendant de nombreuses années.
12. Cancer
Le cancer augmente constamment partout. Dans la province de Québec, les décès annuels en ont passé en deux décades de 1,103 à 1,902. Cependant, comparée à celle des autres provinces, notre situation est encore assez favorable. La lutte contre le cancer ne comprend pas seulement le traitement de la maladie par les irradiations, mais aussi par les interventions chirurgicales ainsi qu’on le constate par l’appel suivant adressé aux médecins par la Ligue franco-anglo-américaine contre le Cancer : « Pendant les premières périodes de son évolution, le cancer est une maladie curable chirurgicalement. Les statistiques récentes montrent que la guérison se maintient sans récidive pendant plus de cinq ans après l’opération. Ce sont les signes précoces du cancer qu’il faut surtout connaître. Un diagnostic précoce, suivi d’une intervention rapide, est actuellement la condition nécessaire pour obtenir la guérison. » Cette citation nous dit assez l’importance de l’éducation non seulement des médecins mais de la population dans toute campagne entreprise contre le cancer. Enfin, la nécessité de l’examen médical annuel de santé s’impose ici comme une mesure de première nécessité.
13. Morts violentes ou accidentelles
Ces décès prennent une telle ampleur qu’on ne saurait les passer sous silence. Cependant, nous sommes encore moins éprouvés à ce sujet que la plupart des autres provinces. Presque les deux tiers de ces décès surviennent à l’âge de la plus grande activité industrielle, soit de 15 à 70 ans. Mais des proportions de 13.3 pour cent chez les enfants d’âge préscolaire et de 14.5 pour cent parmi les écoliers de 5 à 14 ans ne sont pas sans causer quelque surprise.
Les suicides, plutôt rares dans les provinces de l’est, sont plus nombreux en Ontario et dans l’ouest. Ils se rencontrent trois fois plus dans le sexe masculin que dans le sexe féminin. Les homicides sont en nombre fort réduits partout, surtout dans les provinces de l’est. Ils portent plus sur les hommes que sur les femmes. Les accidents sont une cause assez importante de décès particulièrement chez les hommes.
Il faut convenir que cet aspect de la question n’en donne pas une image complète. À côté de ceux qui trouvent au cours d’un accident une fin tragique, il faut mettre aussi les victimes, encore plus nombreuses, qui en sortent avec une incapacité de travail plus ou moins complète et plus ou moins permanente. On a donc grandement raison partout d’organiser des ligues dans le but de prévenir les accidents. Souhaitons leur le plus franc succès. Pour l’obtenir, elles doivent s’occuper non seulement de l’industrie et de l’école, mais aussi de la maison où surviennent les décès des jeunes enfants causés par divers accidents.
14. Apoplexie, hémorragie cérébrale, embolie, thrombose et maladies du foie
Ces affections ne nous causent qu’un nombre relativement restreint de décès. Leur prophylaxie comprend nécessairement l’examen médical périodique dit de santé.
Le procédé permettrait le diagnostic plus précoce des cas, ce qui ne devrait pas manquer d’en faciliter souvent l’amélioration.
15. Mortalité maternelle
Les décès attribués à l’état puerpéral n’accusent guère de diminution chez-nous; ce qui n’empêche pas la province de Québec d’être à la tête du pays à ce sujet. Ils sont dus en majorité à des accidents qui surviennent lors de la naissance de l’enfant.
Pour améliorer encore notre situation, il s’offre à nous deux grandes directives : (a) mettre à la disposition de toutes les mères, lors de la naissance de leurs enfants et dans les jours qui suivent, les meilleurs services médicaux disponibles que réclame leur état par le moyen de gardes-malades graduées chargées d’exécuter fidèlement les traitements prescrits par le médecin ; (b) maintenir sous surveillance médicale toutes les femmes enceintes. La consultation prénatale répond à ce second besoin de la lutte.
16. Diabète
La mortalité par diabète est en augmentation constante dans la province de Québec. Mais le même phénomène se constate partout ailleurs et le nombre de ses décès est chez-nous encore assez limite.
Quelle sera la marche de la maladie dans l’avenir? À cette question tous les auteurs donnent maintenant une réponse encourageante. Divers facteurs peuvent ici intervenir pour autoriser la confiance en des jours meilleurs.
À l’enseignement de l’hygiène que nous devons nous employer à répandre de plus en plus et à la pratique qu’il faut encourager de l’examen annuel de santé, il faut ajouter la grande découverte de l’insuline, faite par Banting et Best en 1921.
On peut résumer cette seconde partie en disant que si la situation de la province de Québec est assez favorable au sujet de certaines causes de décès, elle n’en laisse pas moins à désirer au sujet de plusieurs autres qui s’affirment, cependant, des plus vulnérables. La conclusion qui s’impose, c’est que décidément nous sommes en retard. Nous perdons inutilement une proportion trop élevée de notre précieux capital humain.
Quelle en est l’explication? Par quels moyens pouvons-nous réagir et accélérer les progrès que nous avons été heureux de signaler en cours de route? Voilà des questions très opportunes qui s’imposent à notre attention et auxquelles il conviendrait de tenter de répondre.
C’est ce que nous tâcherons de faire dans une prochaine partie de notre travail.
Tableau qui reflète l’importance relative des maladies contagieuses au Québec entre 1921 et 1932
Maladies Nombre des décès Distribution proportionnelle
- Tuberculose 3238 47,6
- Grippe 1351 19,9
- Diphtérie 443 6,6
- Coqueluche 447 6,4
- Typhoïde 338 5,0
- Syphilis 248 3,6
- Rougeole 246 3,6
- Scarlatine 172 2,5
- Méningite cérébro-spinale 47 1,2
- Poliomyélite 193 0,7
- Autres 3323 2,9
Total : 6,794 100.0
Source : L’Action Universitaire, Janvier 1939, volume 5, numéro 5.
Syphilis
Le domaine mental de la syphilis est fort vaste et les modes d’action de cette maladie sont nombreux.
1. Réactions psychonévrotiques. – La simple hantise de la syphilis crée d’innombrables syphilophobes; chez les sujets, indemnes, la moindre érosion muqueuse, la moindre éruption cutanée va développer des préoccupations et des interprétations hypocondriaques tenaces. Des recherches humorales inutiles, un simple Wassermann douteux au milieu de 5 ou 6 autres négatifs, des traitements d’épreuve injustifiés renforceront leurs tendances obsédantes.
Quant à la révélation d’une syphilis réelle, elle déclenche chez beaucoup de sujets un véritable état dépressif qui peut se prolonger et aboutir à des gestes tragiques. Fournier, qui avait décrit la neurasthénie des syphilitiques, disait connaître pour sa part 18 cas de suicide. Parfois, après redressement moral, un nouvel accident tardif replongera un sujet qui se croyait guéri dans un nouvel état dépressif. Il y a donc, de la part du médecin soignant, une psychothérapie à ajouter au traitement spécifique strictement nécessaire.
2. Psychoses syphilitiques de la période secondaire septicémique. – Longtemps contestées, ces syphilopsychoses sont définitivement admis depuis les premiers travaux de Spilmann et Hagenstein (Nancy, 1894), Pierret et Jaquin (Lyon, 1899) et de nombreux travaux plus récents (Barnes, Plaut, Chodsko, H. Claude, Targowla, Marcus, Royer, Barbé, Schoenagel, etc.).
Elles s’observent peut-être plus fréquemment chez certains prédisposés. ; Aubin et Hecaen ont signalé leur fréquence chez les noirs, en rapport avec une réaction méningée cytologique. Elles revêtent généralement le type d’une confusion mentale asthénique, très souvent accompagnée d’une céphalée intense et, parfois, de paralysie (3e, 6e, 7e paires). Parfois, la confusion mentale va jusqu’à la stupeur avec gâtisme ; quelques-unes ont une courte durée de quelques semaines; d’autres se transforment en un état confuso-mélancolique prolongé; l’onirisme agité n’y est guère fréquent, mais Plaut a signalé de véritables hallucinoses syphilitiques.
Des formes catatoniques ont été signalées. Malgré la longue durée de certaines de ces psychoses (six mois à un an parfois) (Targowla), elles guérissent généralement.
3. Accidents mentaux de la période tertiaire. – Il ne s’agit plus d’une action septicémique, mais bien des lésions organiques, méningées, artérielles, gommeuses, à processus diffus ou focal. On a alors affaire à des psychoses évolutives, souvent d’apparence démentielle et presque toujours associées à des signes neurologiques nets. Le mélange de signes mentaux déficitaires avec des signes neurologiques objectifs rend parfois le diagnostic délicat et l’on a créé pour ces psychoses le terme de pseudoparalysies générales syphilitiques (H. Claude). Marchand, Abély et Bauer ont attiré l’attention sur ces formes d’apparence démentielle mais non évolutives. Ils distinguent : 1) des états qui sont peut-être des paralysies générales stabilisées et prennent alors secondairement le masque d’une hébéphréno-catatonie; 2) d’autres qui se présentent cliniquement d’emblée comme un syndrome hébéphréno-catatonique à évolution très lente, à signes neurologiques très discrets mais à formules humorales positives.
On a aussi attiré l’attention sur l’apparition de véritables états dépressifs simples ou mélancolique précédant l’installation de ces formes d’apparence démentielle (Régis, Gilbert Ballet). Puis, survient une phase confusionnelle avec stupeur ou agitation onirique qui précède l’installation du syndrome neurologique et démentiel.
Quoi qu’il en soit, à cette période, deux grands traits caractérisent ces psychoses tertiaires :
1. La présence de signes neurologiques précis : modifications oculo-pupilaires, dysarthrie, paraphasie, atteinte de certains nerfs crâniens, déficit moteur partiel, etc.
2. La prédominance de l’hébétude et de l’obtusion pouvant aller jusqu’à la stupeur et au gâtisme. Il ne faut pas de hâter de conclure à la démence; il s’agit – ainsi que l’ont fait remarquer Van Bogaert et Targowla – d’un déficit fonctionnel souvent encore réversible. On assiste, en effet, parfois sous l’influence, d’un traitement spécifique intensif, à des redressements surprenants dans l’ordre clinique et humoral, ce qui ne se voit jamais dans la vraie paralysie générale.
Toutefois, il persiste souvent une petite séquelle neurologique et un fléchissement partiel sur le plan intellectuel : petits troubles de l’attention ou de la mémoire en particulier.
Il n’est pas douteux qu’il peut exister des encéphalites tertiaires indépendantes de toute atteinte méningée, à évolution lente, aboutissant à un tableau de paralysie générale.
Euzière, Pagès, Lafon, Mirouze et Salvaing en ont rapporté un bel exemple; ils rappellent à ce propos que si l’atteinte méningée est souvent la première en date et commande secondairement les réactions encéphalitiques comme le défendaient Levaditi, Rousay et Ravaut, on peut, dans certains cas, penser que le tréponème attaque primitivement la substance encéphalique, selon la conception de Sicard.
Les investigations récentes (encéphalographie gazeuse, ponctions étagées, ventriculaires et méningées qui nous renseignent sur les différents états anatomiques du cerveau et de ses enveloppes) appuient dans une certaine mesure cette mesure cette façon de voir. Plus rares, mais néanmoins signalées, sont les psychoses hallucinatoires chroniques, d’origine syphilitique tertiaire (Anglade). Dublieneau a souligné la fréquence des hybrides morbides constitués par la conjonction chez certains sujets dégradés de syphilis, d’alcoolisme, de paludisme dans les antécédents, – faits intéressants non seulement au point de vue clinique, mais aussi médico-légal; c’est dans ces cas que le même auteur a signalé des réactions dissociées ou liminaires du liquide céphalorachidien.
L’épilepsie, d’origine syphilitique tertiaire, peut donner naissance à des équivalents mentaux (Marcus, A. Porot).
La forme disséminée des syphilis du névraxe (tyoe Guillain-Thaon) peut compter dans sa symptomatologie des manifestations mentales, ordinairement du type déficitaire.
Certains tabétiques peuvent constituer, à propos de leurs troubles fonctionnels ou douloureux, de véritables délires hypocondriaques.
Quand la maladie s’étend au bulbe, on peut voir des états anxieux aigus ou subaigus annonçant généralement une mort prochaine ou imminente.
4. Nous ne traiterons pas ici de la paralysie générale ailleurs (v. Paralysie générale).
5. Manifestations mentales de l’hérédosyphilis. L’enfance anormale paie un lourd tribut à la syphilis héréditaire. Les statistiques montrent que près d’un quart d’enfants amenés aux consultations de neuropsychiatrie infantile sont des hérédosyphilitiques. Hamel et Lopez-Albo ont bien étudié ce problème (Congrès de Barcelone, 1929). Ces enfants tarés présentent souvent les stigmates morphologiques habituels, fréquemment des convulsions et toujours un certain degré d’arriération mentale et des manifestations caractérielles surajoutées. Vermeylen estimait à 18% la proportion des déficients intellectuels relevant de l’hérédosyphilis. Streicher, parmi ces déficients mentaux hérédosyphilitiques comptait 60% d’idiots, 18% d’imbéciles et 22% de simples débiles. Plusieurs auteurs ont insisté sur les perversions instinctives rencontrées chez des hérédosyphilitiques ou des fils de paralytiques généraux Heuyer, Roger, Laignel-Lavastine).
Si la tare héréditaire est encore virulente, elle pourra se manifester plus tard sous forme de paralysie générale infantile ou juvénile, toujours riche en signes neurologiques concomitants.
6. Syphilis en démence précoce. Le rôle de la syphilis dans la production d’une démence précoce a fait l’objet de discussions nombreuses et de points de vue divergents. Plusieurs statistiques ont établi que la syphilis n’était pas plus fréquente chez les déments précoces que chez les sujets normaux (Hoven, Quebon, Rodier, Courtois).
Aussi, ce rôle, est-il contesté par certains auteurs (Hubner, Vernet, Lhermitte). Mais d’autres, plus nombreux, peut-être, pensent qu’elle intervient soit en préparant un terrain hérédosyphilitique (Drouet, Hamel), soit d’une façon active et virulente. Abély en Marchand pensent il existe une démence précoce authentiquement syphilitique et nettement autonome et Marchand a même signalé des lésions d’un type spécial, en pareil cas.
Si l’on veut bien ne pas confondre certaines paralysies générales juvéniles avec la démence précoce, on reconnaîtra avec Faveret et Rondpierre que le moment de la puberté auquel vont se former les mécanismes psychogénétiques de la schizophrénie n’est guère propice à une contamination syphilitique.
Quant à la syphilis héréditaire, ajoutent ces auteurs, elle a déjà épuisé son action virulente à cette époque et l’a orienté vers des lésions méningo-encéphalitiques organiques particulières.
En terminant rappelons qu’en raison des traitements précoces et intensifs et des mesures prophylactiques.
Voir aussi :