Saguenay-Lac-St-Jean

Géographie du Saguenay-Lac-St-Jean

Géographie du Saguenay-Lac-St-Jean

Esquisse géographique de la région du Saguenay et du lac St-Jean

La région Saguenay-Lac St-Jean est vraiment singulière. Au milieu des paysages riants et gracieusement modelés du pays laurentien, elle ressemble dans les caractères tourmentés et sauvages des côtes du Saguenay un paysage de Norvège. Et puis, à la source de la grande rivière, en contraste frappant, elle étale de vastes plaines unies et fertiles, qui montent en pente douce depuis le lac St-Jean jusqu’aux montagnes lointaines qui forment une frontière bleue à l’horizon, et fournit aussi à la Province du Québec un de ses plus beaux districts agricoles.

C’est évidemment cette singularité qui rend inoubliable, pour tous ceux qui l’ont faite, la visite de ce territoire d’une grandiose originalité.

Il semble que les glaces préhistoriques, en un formidable remous, aient creusé dans le granit de nos montagnes, à quelque cent milles à l’ouest de Tadoussac, un large cratère, puis que les couches supérieures du glacier, trouvant deux issues convergeant vers l’est, aient glissé dans cette direction en élargissant et creusant le les crevasses où des cataclysmes antérieurs leur avaient ouvert une route. Ces deux fleuves solides et froides, se rencontrent dans leur descente, mêlant leurs masses colossales, additionnant leur effort, auraient continué de conserver leur course lente mais irrépressible et creusé dans le plateau laurentien un sillon large et profond, un véritable fjord, débouchant dans le St-Laurent à Tadoussac.

La mer, succédant aux glaces fondues par un climat devenu plus doux, vint noyer les dépressios creusées par le glacier et déposa sur leurs bords, pendant des siècles, les produits d’érosion apportés dans son sein par les rivières dévalant des montagnes en bordure.

Puis, la mer s’est retirée, découvrant les alluvions qu’elle avait accumulées. Le cratère est devenu le Lac Saint-Jean et la région agricole qui l’entoure. Des deux crevasses par où les glaces s’échappèrent vers l’est, l’une est devenue la vallée qui contient les lacs Kénogamichiche et Kénogami, les Paroisses de Laterrière, de St-Alexis et de St-Alphonse et qui rejoint le Saguenay par la baie des Ha!Ha!. Dans l’autre, le lac St-Jean précipita durant des siècles, en cascades tumultueuses, les eaux furibondes que l’homme a aujourd’hui domptées et attelées au service de l’Industrie.

Ainsi modelée par la rude usure des glaces et les lents et paisibles dépôts de la mer, la région se présente sous la forme d’une vallée à peu près perpendiculaire au St-Laurent et dont l’axe, dans la moitié d’aval, est marquée par une fosse profonde s’ouvrant dans la côte nord du grand fleuve à Tadoussac, à 140 milles en aval de Québec, courant ouest-nord-ouest, large d’un à deux milles et, à 55 milles de son estuaire, se bifurquant et poussant vers le sud-ouest une tranchée de sept milles : la Baie des Ha! Ha!

Dans cette fosse la marée roule ses vagues jusqu’à 75 milles du St-Laurent, aux Terres Rompues, où le fond de granit en se relevant oppose à son élan un obstacle infranchissable.

La fosse où la marée agite son va-et-vient, c’est le Saguenay ; à l’ouest de la limité où s’arrête le flux marin, elle prend le nom de Grande Décharge. Son fond de roc s’élevant par degrés vers l’ouest, les eaux du lac St-Jean produisaient en s’y précipitant de formidables rapides. La Grande Décharge garde encore ce caractère tumultueux sur une couple de milles en amont de la marée. Mais, à cette distance, là où la Chute à Caron culbutait naguère ses remous écumants dans une gorge étroite, le barrage construit par l’Alcoa Power Compnay a transformé en un lac paisible 25 milles de ce cours tourmenté et mis à la disposition de l’industrie 800,000 h.p. Que la fureur des cataractes dispersait jadis en écume et en bruit.

À l’amont de ces 25 milles, la fosse se bifurque enserrant de ses deux branches l’île Alma et nombre d’îles moins étendues. La branche nord garde le nom de Grande Décharge, celle du sud, moins considérable, prend le nom de Petite Décharge.

À deux milles du confluent des deux Décharges, Duke-Price Power Company a jeté en travers de la Grande Décharge et de l’île Maligne un système de barrages et une centrale électrique capables de produire 540,000 h.p. Et les chutes qui grondaient dans la Petite Décharge, restée indomptée, la clameur des ondes bondissantes.

Nivelées par l’industrie humaine, les eaux de la Grande Décharge, élevées à plus de trois cents pieds au dessus du niveau de la mer, confondent leur nappe avec celle du lac St-Jean à six milles plus à l’ouest.

La rive nord de la fosse saguenayenne se prolonge vers l’ouest en ligne presque droite, la rive méridionale, tournant brusquement vers le sud, vis-à-vis l’extrémité occidentale de l’île Alma, remonte vers le nord ouest et vient rejoindre la rive septentrionale. Leurs méandres enserrent les eaux du lac St-Jean sur une superficie de 375 milles carrés, immense miroir d’argent sous le calme ensoleillé, sombre tapis aux tons fauves et frangé de gris quand le vent du nord-est ou norois tourmente ses flots bruns et les écrase en écume sur les plages sablonneuses qui le bordent.

De Tadoussac à St-Fulgence, soit une distance de soixante milles, les bords du Saguenay s’élèvent, abrupts et sauvages, limitant de chaque côté un plateau élevé de 900 à 1000 pieds au-dessus des eaux, et atteignant jusqu’à 1400 et 1500 pieds d’altitude aux caps Éternité et Trinité. Rochers fantastiques, parfois dénués, souvent couverts d’arbres résineux, plusieurs plongeant dans les eaux une face verticale, ils encadrent un paysage unique dans l’est du continent nord-américain. Paysage à la physionomie sévère, où les flancs des montagnes, à peu près ou complètement inaccessibles, assurent à cette nature une parfaite immutabilité, un caractère de sauvagerie ineffaçable. Les établissements de la baie Ste-Marguerite, de l’Anse St-Jean, du Tableau, de la Descente des Femmes, tentent bien se jeter une note moderne dans ce tableau d’âge séculaire, mais ils disparaissent forcément, ils se perdent dans l’immense scène. De sorte que, si vous suivez le cours du Saguenay, vous contemplerez ce témoin des âges écoulés, ce monument immuable des forces colossales de la nature que l’ont vu, Champlain, les premiers missionnaires et les premiers coureurs des bois.

La nature majestueuse du Royaume du Saguenay. Photo de Megan Jorgensen.
La nature majestueuse du Royaume du Saguenay. Photo de Megan Jorgensen.

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