La langue au Québec

La langue au Québec

Le français parlé au Québec ou, si l’on emprunte le terme officiel le français standard d’ici, est largement teinté par le contexte sociohistorique et par la situation géographique qui l’ont vu naître et se développer. Cette expression désigne la norme linguistique québécoise et c’est en 1977 que l’Association québécoise des professeurs de français adopte l’expression « français standard d’ici ».

La norme a été définie comme « la variété de français socialement valorisée que la majorité des Québécois francophones tendent à réaliser dans les situations de communication formelle » (Gilles Bibeau, Français standardisé ou français naturel, n 91, Publications Québec français, 1993, p.36).

Ce langage québécois représente le besoin primaire d’un peuple de s’affirmer comme membre actif de la collectivité nationale francophone ou, tout simplement, la francophonie. Le peuple est donc loyal envers la culture ainsi que la langue d’origine qu’il conserve et protège quasi religieusement.

Bref, le français québécois est tributaire de l’histoire du peuple et de son contexte sociogéographique qui l’ont façonné et modelé à l’usage de ses utilisateurs.

Graffiti à Montréal
Langue au Québec. Photo par GrandQuebec.com. Source de la photographie : Megan Jorgensen.

Une seconde loyauté (Gilles Bibeau la qualifie de fonctionnelle), enjoint le peuple de participer activement à la vie économique, au développement de la technologie et de la science de l’Amérique du Nord et du Canada. Le français standard d’ici subira donc le contrecoup de la situation géographique et historique qui fait du Québec le voisin de centaines de millions d’anglophones, têtes de file dans plusieurs domaines,

Registre de langue courant

Au Québec, le français parlé du niveau de langue courant possède plusieurs caractéristiques particulières phonétiques et lexicales. En effet, les Québécois, du point de vue de la prononciation, se distinguent par ce qu’il est convenu d’appeler l’accent québécois. Sa syntaxe, cependant, ne montre que très peu d’écarts par rapport à la norme du français international.

Phonétique

L’accent québécois vient de :

L’affrication du [t] et du [ d] : On sait ce que cela veut dire [dzir]

L’ouverture de certaines voyelles : elles sont toutes belles.

Lexique

Les Québécois ont emprunté pas mal de néologismes bien que leur vocabulaire vienne du français international :

Mots inventés : Motoneige, banc de neige, cabane à sucre, didacticiel, nordicité, cégép, débarbouillette…

Sens nouveau : Tourtière, gravelle, coquerelle, chaudière, poudrerie…

Mots empruntés des langues autochtones : Achigan, mocassin, carcajou, babiche, calumet, Rimousi, Abitibi, Québec (!)…

Syntaxique

De façon générale, la syntaxe du français standard d’ici n’a que très peu d’écarts par rapport à la syntaxe du français international, mais on y voit des exceptions :

Mots inventés : magasiner, chanter la pomme, faire du pouce

Archaïsmes : Aplomber, champelure, ravauder…

Anglicismes : bumper, draft, hood, plywood, marketing, scanner … (notons que les anglicismes comprennent beaucoup de termes qui entrent dans l’usage des ouvrages spécialisés).

Plusieurs québécismes dits de bon aloi et plusieurs emprunts sont acceptés, mais d’autres sont à surveiller ou même à proscrire (joual).

En effet, dans certains cas, le français standard d’ici connaît des relâchements et il y a alors changement de registre de langue. On passe du niveau courant au niveau familier et on peut parler finalement de joual ou de niveau populaire.

On connaît plusieurs expressions « joalisantes ». À ce niveau, la tendance serait à la simplification. Le niveau populaire présente de nombreux écarts syntaxiques et on utilise des phrases simples, des propositions juxtaposées, la négation sans « ne » :

L’homme que j’travaille pour.

Du point de vue morphologique, on peut omettre des morphèmes : C’est écrit dans gazette.

On en ajoute des morphèmes : Ôte-toi de sur le fauteuil!

On utilise des morphèmes erronés : Mon livre est resté dans mon case.

Notons finalement qu’une prise de position se rend nécessaire pour temporiser les débats suscités par la propagation du joual, un phénomène linguistique dans les années 1960 et 1970 : le joual quitte l’écurie et prend d’assaut tous les milieux ou presque, même littéraires. On assiste à la prolifération d’un nombre de discours en faveur du joual ou contre le règne de cet forme d’expression.

Dans leurs essais, Jean-Paul Desbiens (Les Insolences du frère Untel) ou Jean-Marcel Paquette (Le joual de Troie) jettent un regard particulier sur le sujet.

La spécificité de la langue française québécoise fera dire au chanteur français Yves Duteil (né à Neuilly-sur-Seine en 1949) : C’est une langue belle, avec des mots superbes qui porte son histoire à travers ses accents ». (Yves Duteil, La Langue de chez nous).

Notes : Gilles Bibeau : auteur de plusieurs travaux sur des questions linguistiques, professeur de l’Université de Montréal.

Saviez-vous que l’expression « je m’en moque comme de l’an quarante » remonte à plusieurs siècles. Son origine est incertaine. Certains y voient un lien avec des craintes fort répandues dans le monde vers l’an 1000 relatives à la fin du monde. On disait à l’époque que ce danger existerait jusqu’en l’an quarante du XIe siècle. C’est ainsi qu’une fois la date fatidique passée, en guise de raillerie, tout le monde se mit à dire « Je m’en moque comme de l’an quarante. »

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