Assurer la liberté au Canada par la sécurité
(Réflexions qui nous viennent du février 1950)
Apôtre fervent d’un véritable canadianisme et souhaitant un Canada vraiment bilingue, l’honorable Édouard Rinfret prêche d’exemple. Parlant samedi au Club de Réforme, en français et en anglais, il a tenu dans l’une et l’autre langue le même langage authentiquement canadien, un langage qui doit être parlé et entendu partout à travers notre vaste et beau pays, car c’est le langage du patriotisme le plus éclairé, le plus généreux.
C’est, aussi, le langage du libéralisme – mot qui « comporte la notion de liberté, la recherche du bonheur, la prévention de la misère ». Parlant de la justice sociale, le ministre des Postes a déclaré :
Nous croyons, nous libéraux, que le premier devoir de l’État est de procurer le maximum de protection et d’avantages à tous ses citoyens. Nous jugeons de première importance d’assurer la liberté par la sécurité par l’éradication de la crainte.
Et M. Rinfret de poursuivre : Nous ne serons satisfaits que le jour où, en coopération avec les autorités provinciales, nous aurons atteint un standard national de sécurité sociale et de bien-être humain assurant la plus complète mesure de justice sociale à tous les Canadiens.
Voici, comme les expose le jeune collègue de M. Saint-Laurent, les objectifs que poursuivent énergiquement les libéraux : répandre le véritable esprit canadien, l’amour de la patrie canadienne, faire du Canada un pays vraiment bilingue, et donner à tous les citoyens la liberté véritable et la sécurité véritable. Ce sont là des objectifs autour desquels peut et doit se rallier la nation tout entière.
Lettre d’un Esquimau à un autre Esquimau
Les impressions et les opinions sur nos us et coutumes recueillis par Cebeuq, natif de la Terre de Baffin temporairement domicilié à Montréal, telles que relatées à son cousin Oiratno, habitant des régions arctiques
Pour renforcer nous revendications
Je ne t’ai lu, Cebeuq, que le commencement de l’article du journal unioniste national, en voici une suite :
« Membre d’un gouvernement centralisateur, M. Édouard Rinfret se mêle de donner des conseils aux Canadiens français. Parlant à la radio d’État, il redoute que les représentants des provinces se soient trompés en marquant leur préférence pour rendre inattaquables les droits du français. Il est d’avis que seule la province de Québec en bénéficiera, mais que nos compatriotes des autres provinces continueront à voir leur langue maternelle considérée et traitée, du moins sur le plan provincial comme une langue seconde.
Si la répartition ethnique au Canada était différentes de ce qu’elle est, cette opinion pourrait se soutenir. Dans la réalité des faits, il n’y a une majorité francophone que dans la province de Québec, même s’il demeure possible de prévoir, à l’est, une seconde province à majorité française d’ici une trentaine d’années. Pour notre part, nous ne voyons pas très bien en quoi nous aiderions à consolider les positions linguistiques de nos compatriotes des autres provinces en affaiblissant la forteresse de Québec. Il n’est que de regarder ce qui s’est fait depuis la Confédération dans le domaine scolaire pour se rendre compte que s’était d’esprit général est encore plus important qu’un texte constitutionnel.
Voici ce que disait M. Rinfret dans son allocution du 31 janvier : « Le danger que je vois à laisser cette question dans la catégorie No 5, parmi celles où il faudrait l’unanimité des provinces pour la modifier est une perte d’autonomie pour les provinces de par le fait qu’elles n’auraient pas d’elles-mêmes le droit de décréter la langue française officielle, si tel est leur désir.
La souveraineté des provinces, leur autonomie, requièrent qu’elles aient, d’elles-mêmes, le droit individuel de requérir cet amendement si elles le veulent, nonobstant l’opposition de toute province où le français n’est pas déjà reconnu.
La situation actuelle permet aux Canadiens de langue française du Québec de parler officiellement leur langue. La classification présente enlèverait, il est vrai, toute possibilité du retrait de ce privilège à Québec, mais elle n’offrirait aucune possibilité individuelle aux autres provinces d’exercer le même droit ni de demander la même garantie.
La minorité française du Québec se doit d’être plus unanime et de ne pas se satisfaire de ses droits de langue, mais, de plus, d’aider les minorités françaises des autres provinces à obtenir éventuellement les mêmes privilèges et à se voir reconnaître leurs justes revendications. »
Comme ajoute M. Rinfret, la question présente des difficultés ; mais elle mérite d’être étudiée parc qu’elle offre toutes les apparences de la vérité et de la justice. Toutefois une chose particulière me frappe dans l’exposé de ces deux points de vue : c’est que le véritable champion des droits autonomistes, des provinces et justement celui que l’on accuse de faire partie d’un régime de centralisateurs.
Pour ma part je m’imagine que tous les Canadiens devraient s’entendre sur des points aussi essentiels que celui de la langue ; que nous devrions cesser nos dissentiments et user de stratégie pour renforcer nos revendications. Nous n’avons pas le droit d’amortir nos efforts de lutte dans ce domaine où les réclamations générales de notre nationalité auraient chance de triompher ; nous ne pouvons pas détacher de nous un groupe considérable des nôtres.
(Le Canada en février 1950).
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