
Quoi faire et ne pas faire si on se dirige vers le Yukon
Par cette première page publiée le 5 mars 1898, La Presse manifestait son opposition au projet du gouvernement canadien de céder aux entrepreneurs Mann et Mackenzie 25 000 arpents de terrain aurifère pour chaque mille de chemin de fer qu’ils construiraient au Yukon, soit au total 3.5 millions d’arpents, en plus de les dispenser de l’obligation faite aux mineurs de travailleur leurs « daims » sans interruptions de plus de 72 heures, et d’exiger des redevances de seulement 1 p. cent pour l’or découvert sur ces terrains alors que les mineurs devaient verser 10 p. cent.
Et au surplus, les deux entrepreneurs demeuraient propriétaires du chemin de fer et des revenus qu’il devait leur assurer. Devant la générosité, inacceptable à ses yeux, de l’offre gouvernementale. La Presse proposait donc que le gouvernement demeure le maitre d’œuvre de la construction du chemin de fer. et qu’il en défraie les coûts de construction en vendant, aux Canadiens, puis si nécessaire aux autres citoyens britanniques, les terrains aurifères à raison de S2 l’arpent. « Il n’est pas un Canadien, dit La Presse du jour, qui hésiterait un instant à payer deux piastres pour un claim d’un arpent carre en ce pays de Tor. » Et pour illustrer le tout. La Presse avait choisi principalement le mont Methakahtis. que Ton disait être une niasse solide de quartz aurifère.
La Presse consacrait une bonne partie de son édition du 5 mars 1898 au Klondike et aux chercheurs d’or qui rêvaient de faire fortune d’un seul coup de pic. Et le journal y allait de conseils sans doute précieux pour ceux qui se préparaient à partir vers l’aventure. Voici quelques-uns de ces conseils :
Choses à faire
Apprenez à nager. Préparez-vous à passer plusieurs jours sans vous laver. Habituez-vous à la solitude. Préparez-vous aux rhumatismes et aux refroidissements. Résignez-vous à porter les cheveux longs. Préparez-vous à souffrir de la famine. Pensez souvent que la farine coûte là-bas $1.50 la livre. Représentez- vous des œufs à deux piastres la douzaine. Apprenez assez d’architecture pour pouvoir vous faire une méchante cabane.
Dites-vous bien que là-bas les ni vers sont longs et les étés courts. Faites-vous le goût au poisson : ce sera peut-être votre seule nourriture Réconciliez-vous avec l’idée des maringouins, des moustiques, des brûlots, etc. Habituez-vous à ne dormir que d’un œil en cas que vos provisions ne vous soient volées. Apprenez la boxe : c’est plus utile que le fleuret là-bas.
Défiez-vous des gens qui vous offrent pour $5,000, un daim évalué à $100,000. Faites-vous les bras à la rame, c’est un sport à la mode là-bas.
Choses à ne pas faire
Ne vous laissez pas blaguer. N’oubliez pas vos gants. N’apportez pas avec vous de cravates blanches ni d’habit a queue. Ne vous effrayez pas des gros froids.
Ne vous moquez pas des viandes en conserves sous pré texte que ça goûte le ferblanc.
N’apportez pas avec vous une baignoire en faïence, c’est trop cassant. Ne partez pas si vous êtes pris de poitrine ou de rhumatismes chroniques.
Ne vous figurez pas que tout le monde aura la chance de trouver un claim d’un million.
Ne vous attardez pas au Klondike si vous y faites une petite fortune.
Ne dédaignez pas les pépites d’or moins grosses qu’un œuf de poule.
Ne vous embarrassez pas d’un bicycle, mieux vaut la raquette.
N’hésitez pas à vous munir d’un pistolet, cela vous donnera meilleure apparence.
Ne manquez pas au moment de partir pour le Klondike de vous acheter un billet de retour.
N’oubliez pas de vous pourvoir de médecines assorties avant de partir.
Ne vous laissez pas gagner par la folie quand vous trouverez votre première pépite d’or.
Ne vous attristez pas parce que le jour n’a que quatre heures de durée contre la nuit, vingt.
Ne jetez jamais une partie de vos effets pour arriver plus vite à un bonanza annonce quelque part.
N’apportez rien avec vous qui ne puisse supporter de grande froids. Ne vous attendez pas à faire le trajet de Vancouver à Dawson en moins de 35 jours.
N’oubliez pas qu’il y a de l’or dans la province de Québec et que son extraction est moins coûteuse que là-bas.
N’essayez pas de gagner le Klondike en passant par l’Amérique du Sud; c’est vers le nord qu’il faut cingler.
N’oubliez pas que les maisons de jeux ont été Instituées à Dawson pour plumer ceux d’entre les mineurs qu’on appelle des dindes.

En ce qui concerne la « Ruée vers l’or », nous connaissons son histoire grâce à Jack London, formidable écrivain américain. Je me rappelle très bien des noms du Yukon, Klondike et Dawson, mais j’étais toujours certaine que les événements se passaient en Alaska, territoire vendu par l’Empire russe aux Américains. Intéressant!