Tranquillisants

Tranquillisants en psychiatrie

On appelle tranquillisants une série de corps qui, avec les neuroleptiques, constituent un secteur important de la chimiothérapie psychiatrique actuelle. Ni leurs propriétés, ni leurs indications, ni leur constitution chimique ne sont spécifiques. La dénomination elle-même n’est pas définitive, et l’on a créé pour désigner ces produits toute une terminologie nouvelle. On a parlé d’ataractiques, d’équanimisants, etc. Autant dire que l’on est tenté de ranger dans les tranquillisants toutes les drogues psychotropes, qu’elles soient sédatives, euphorisantes, hypnogènes, voire antispasmodiques.

Il faut néanmoins tenter de délimiter ce groupe par certains caractères généraux plus souvent négatifs, d’ailleurs que positifs.

1. Les tranquillisants n’ont pas d’activité neuroleptique proprement dite. Ils sont donc sans action sur les états psychotiques. Une légère réserve est à introduire ici pour un produit : il s’agit de l’azacyclonol qui aurait un effet anti-hallucinatoire et présenterait certaines propriétés des neuroleptiques. Ce n’est qu’après son utilisation plus longue en France qu’il sera possible de dire s’il faut le ranger parmi les neuroleptiques ou les tranquillisants. Les premiers résultats de l’utilisation en France ne semblent pas confirmer l’optimisme des auteurs américains.

2. Ce sont des sédatifs non hypnotiques, ou tout au plus légèrement hypnogènes; tout en ayant parfois un léger pouvoir renforçateur des barbituriques. Ils sont parfois anticholinergiques. Ces caractères empêchent de ranger parmi les tranquillisants des produits peut-être apparentés au point de vue chimique, mais dont l’action et plus tonique que sédative.

3. Il s’agit de substances peu toxiques, se prêtant davantage à des cures ambulatoires qu’à des cures hospitalières, et visant à corriger surtout les troubles névrotiques légers ou les petites manifestations réactionnelles d’allure dysthymique ou dépressive.

Le tableau ci-dessous indique les principaux corps répondant aux caractères précédents avec les indications de doses usuelles.

Catégorie chimique Doses usuelles (en mg) Désignation commerciale

UCB 4492 Azacyclonal 60- 200 Frenquel

Hydroxyzine 50-200 Atarax

AY 5406-1 Bénactyzine 4-10 Bénactyzine

Méprobamate 800-2,400 Equanil

Procalmadiol

B586 Phénaglycodol 600-1.800 Sinforil

Carbamate de méthyl-pentynol 300-600 N-Oblivon

L’indication majeure des tranquillisants est l’angoisse. Mais précisons d’emblée qu’il faut exclure l’angoisse psychotique, aussi bien mélancolique que schizophrénique. Il s’agit donc d’angoisse névrotique ou réactionnelle. C’est dire que l’indiction ne saurait être que symptomatique, et l’effet à attendre du traitement, que palliatif. L’efficacité est d’ailleurs très irrégulière, ce qui se conçoit aisément lorsque l’on envisage la multiplicité des structures et des personnalités sous-jacentes au symptôme névrotique.

Le produit le moins décevant est le méprobamate. C’est la drogue qui sous le nom de Millown est consommée aux U.S.A. en quantités véritablement effarantes. Car elle est considérée comme « pilule de bonheur ». Il est difficile de ne pas évoquer Huxley…

La cure devra être prolongée pendant de nombreuses semaines. Et il faudra savoir associer une psychothérapie de profondeur variable selon le degré de structuration de la névrose sous-jacente si l’on veut éviter une réapparition précoce du symptôme.

Les états dysphoriques, dysthymiques et dépressifs légers bénéficieront de thérapeutiques où le méprobamate pourra être remplacé parfois par la bénacyzine ou le carbamate de méthylpentynol. Les appréhensions et les craintes qu’éprouvent certains malades au cours d’affections organiques ou avant une intervention chirurgicale seront efficacement combattues par les tranquillisants.

C’est dans de tels cas de troubles légers que l’on pourra utiliser efficacement des produits très bien tolérés comme l’hydroxyzine ou le phénaglycodol. Quant aux symptômes névrotiques caractérisés, leur sédation ne sera obtenue que dans des cas relativement rares, après des traitements prolongés, et c’est encore au méprobamate qu’il faudra avoir le plus souvent recours. Les différents types de symptômes névrotiques offrent d’ailleurs des résistances variables : les phobies sont les plus accessibles. Viennent ensuite tics et bégaiements, ainsi que certaines insomnies. Les obsessions offrent peu de prise à ces thérapeutiques. Quant aux conversions hystériques vraies, elles sont totalement inaccessibles.

En matière de troubles psychosomatiques et également de névrose d’organes, certains tranquillisants, en particulier la bénactyzine, amènent le malade à attacher moins d’importance à ses troubles, créant en quelque sorte une cloison entre le moi et la maladie.

Restent à considérer les manifestations d’intolérance aux exigences de l’environnement, troubles que Decourt a groupés sous le terme d’agapactiques. Ces troubles bénéficient d’un traitement tranquillisant. Mais il faut introduire ici un groupe nouveau de médicaments qui, bien que reliés en particuliers par leur constitution chimique aux tranquillisants vrais, en diffèrent par certaines propriétés.

Il s’agit du groupe des euphorisants psychotoniques, qui n’ont évidemment pas les propriétés sédatives des tranquillisants, et qui, au contraire, déterminent un certain état d’excitation et d’hyperactivité, évoquant même les effets des amphétamines. Ces psychotoniques, loin de renforcer les effets des neuroleptiques, corrigent l’asthénie qu’ils déclenchent parfois. Parmi les produits les plus efficaces de ce groupe, il convient de citer le pipradiol (MRD 108, Mératran) qui est un isomère de l’azacyclonol bien qu’ayant des propriétés opposées, le N68 (Covatine) particulièrement indiqué dans les troubles agapactiques cités plus haut, et enfin l’héptaminol (2831 RP, Heptamyl) qui est surtout un correcteur des effets de fatigue des neuroleptiques majeurs.

Pour ce dernier groupe, il faut souligner quelques contre-indications importantes : ces cures sont à éviter dans les syndromes anxieux qu’ils aggravent fréquemment, allant même jusqu’à déterminer des états d’agitation et de panique. Il faut également éviter de les prescrire le soir, car ils ont une action antihypnique.

Afin d’être complet, il convient de signaler encore deux produits que l’on a parfois rangé parmi les tranquillisants. Il s’agit du succipregnandione (Viadril) et du S.C.T.Z. (Hémineurine) qui ont une activité sédative dans les grands états d’agitation. Il s’agit de produits à administrer en perfusion intraveineuse, qui sont donc classés à tort sous la rubrique des tranquillisants.

L. Israël.

Conversion

Selon la théorie psychanalytique, l’excitation psychomotrice, qui actionne le processus névrotique, peut être reportée dans le plan des fonctions corporelles. Ce phénomène dit de conversion est caractéristique de névrose hystérique.

Il correspond à cette aptitude particulière des maladies dites hystériques ou pythiatiques à exprimer, en pleine sérénité, leurs tendances refoulées et leur désir inconscient de se faire considérer comme des malades évidents, par des symptômes physiques, tels que paralysies, anesthésies, contractures, etc. (complaisance psychosomatique de Schnyder, mytho-plasticité de E. Dupré et Logre, aptitude expressionnelle de Porot A. et Hesnard).

Ce mécanisme de la conversion est à différencier de la dérivation de l’excitation émotionnelle dans le système neurovégétatif qu’on observe chez les autres névropathes et tout particulièrement chez les anxieux (réponse neurovégétative de la médecine psychosomatique).

Car, chez ces derniers malades, l’aspect somatique de la névrose est dû à son retentissement, toujours pénible, sur les fonctions sensitivo-motrices et glandulaires du système vago- sympathique, alors que le processus de la conversion hystérique met en jeu, avant tout, les fonctions d’expression émotionnelle extérieure du système nerveux de relation.

Ces deux processus distincts ont été rapprochés, à tort, semble-t-il, par certains psychanalistes, à propos de la phobie, qu’ils considèrent comme un état intermédiaire entre la conversion – aboutissement corporel d’une psychogénèse – et la dystonie neurovégétative des anxieux. D’où le terme qu’ils donnent à cette névrose : Hystérie d’angoisse. La plupart des auteurs y répugnent. Si le phobique et l’anxieux sont apparentés cliniquement, leur groupe se différencie nettement de l’hystérique, qui se trouve, par sa conversion somatique, libéré de toute anxiété (v. psychanalyse, névroses).

À lire également :

« Le rire est un tranquillisant sans effets secondaires. » (Arnold H. Glasgow, humoriste américain). L’âge ne compte pas, à moins d'être un fromage (Billie Burke, comédienne américaine)
« Le rêve et le rire sont des tranquillisants sans effets secondaires. » (Arnold H. Glasgow, humoriste américain). L’âge ne compte pas, à moins d’être un fromage (Billie Burke, comédienne américaine). Photographie de Megan Jorgensen.

Laisser un commentaire