Le préjudice et ses conséquences dans notre vie
Le sentiment de préjudice subi constitue l’une des expressions délirantes les plus fréquentes et le point de départ apparent de certains systèmes d’interprétation.
Assez commun chez les débiles mentaux et les mythomanes, il est le corollaire habituel des dispositions constitutionnelles des ambitieux qui échouent dans leurs entreprises. Alors, loin de reconnaître leur propre responsabilité dans leurs déboires, attribuent ceux-ci à des interventions étrangères.
– Idées délirantes de préjudice : – Un degré de plus, et la constitution paranoïaque apparaît comme le terrain d’élection des idées de préjudice. L’orgueil, la méfiance et la fausseté du jugement déforment les moindres déconvenues en atteintes aux intérêts matériels et moraux du sujet.
– C’est le jaloux qu’un rival heureux « a privé de ses droits » sur l’objet aimé. C’est le possessif qui s’estime lésé par la plus régulière des décisions si elle n’est pas en faveur de ses prétentions, etc.
La notion de persécution fait rapidement suite à la conviction de préjudice et, si le paranoïaque est sthénique et combatif, engendre la revendication.
Délires de préjudice
Mais les idées de préjudice peuvent constituer l’essentiel du thème délirant. Il en est ainsi au cours de certains épisodes transitoires gravitant autour de la psychose maniaco-dépressive, soit qu’ils alternent ave les accès maniaques et mélancoliques, soit qu’ils les accompagnent et généralement prolongent l’un d’eux.
Ces malades se prétendent injustement dépouillés de leurs biens, bafoués dans leurs convictions ou leurs affections, frustrés dans leurs droits civiques, contrecarrés dans leurs entreprises, internés par suite de complots ténébreux et de compromission révoltantes, etc.
Mais leur argumentation est variable, peu consistante, mal assurée; le délire s’estompe en laissant d’ordinaire peu de trace, au moins jusqu’à l’accès suivant qui reprend alors souvent la même forme.
Il faut, sans doute, voir dans ces expressions pathologiques l’effet d’une résonance spéciale de la psychose maniaco-dépressive sur une constitution paranoïaque larvée. (Psychoses associées de Masselon).
D’autres cas paraissent difficiles à rattacher à un groupe nosologique déterminé. Tels paranoïa intermittente de Mendel, délires polymorphes de Magnan, etc.). Il conviendra parfois d’observer une position prudente (psychoses interprétatives aigués de Sérieux et son école, de Genil-Perrin), sans préjuger ni de l’étiologie ni du retour possible des accidents délirants.
Le délire de préjudice présénile de Kraepelin est, par contre, une forme bien individualisée et des plus habituelles de l’involution. Son début est insidieux.
Le sentiment de préjudice et les interprétations pathologiques
À la faveur des premiers fléchissements psychiques (mémoire en particulier). Aussi du gauchissement du caractère (suspicion, égoïsme, irritabilité), surgissent les interprétations pathologiques. Le vieillard qui ne retrouve plus les objets qu’il oublie avoir cachés, accuse l’entourage de malveillance. Groupant d’autres faits de même ordre où la carence de son autocritique, des lacunes dans ses souvenirs, la mauvais foi souvent. Elle s’associe alors à la méfiance et à l’avarice. Elle en vient à soutenir que ses héritiers, ses fournisseurs. Également ses voisins, le Gouvernement cherchent à le dépouiller.
Pour peu que son excitation ou ses extravagances conduisent à l’interner, il présentera cette mesure comme une nouvelle manœuvre dolosive. Des procès complexes peuvent en résulter. Ils trouvent parfois les autorités hésitantes. Par la suite, l’opinion publique abusée est toute prête à soutenir la cause du malheureux délirant. Surtout si les restes d’une certaine vigueur lui confèrent les apparences de la lucidité.
Le plus souvent, toutefois, la systématisation de ces délires est assez lâche, peu cohérente. Leur marche peut être émaillée de troubles psychosensoriels (hallucinations). Ceux-ci donnent donc un élément nouveau aux interprétations,. Pourtant ils rendent aussi plus évident leur caractère morbide.
D’ailleurs, ils vont en se désagrégeant peu à peu à la mesure des progrès de la déchéance démentielle,. Ils se résolvent à la longue en rabâchages stéréotypés.
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