Phobie

La phobie en psychiatrie

La phobie : crainte ou répulsion angoissante spécifiquement liée, pour un sujet déterminé, à la présence d’un être, d’un objet ou à certaine situation dont les caractères ne justifient pas une telle émotion (du grec phobos – peur).

L’angoisse saisit le sujet dans une circonstance, toujours la même, étroitement définie et limitée; il présente alors tous les signes d’une peur intense, parfois nuancée de dégoût ou d’aversion. Bien qu’il reconnaisse que cette peur est immotivée ou du moins très excessive, il ne peut la dominer ; il évite autant qu’il le peut la situation qui la provoque, ce qui aboutit dans certains cas à une restriction importante de son activité.

On a décrit des variétés innombrables de phobies et « le jardin des racines grecques refleurit tout entier » dans leur nomenclature (Devaux et Logre) ; ce catalogue est sans grand intérêt. Citons, avec Guiraud, les phobies concernant des objets : armes, objets coupants, pointus ou sales, sangs, celles des lieux : précipices, espaces libres, lieux clos, cimetières, véhicules; celle des maladies ou nosophobie : crainte des microbes, des maladies vénériennes, de la folie; celles des éléments : eau, mer orages, obscurité; celles des animaux; celles qui ont pour objet les fonctions organiques : sommeil, déglutition, rougissement (Ereutophobie) ou les relations sociales; les phobies morales ou religieuses. La pantophobie doit être distraite du cadre des phobies proprement dites.

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Les phobies s’observent à l’état normal au cours de la première et parfois de la seconde enfance. Précédées par des « phénomènes préphobiques. (Peur déclenchée par l’absence de la mère, par l’obscurité. Peur des espaces qui échappent au regard). Elles ont surtout pour objet les gros animaux domestiques. Ceux-ci pour les psychanalystes, figurent le père. Puis, généralement, un peu plus tard, les petits animaux qui auraient valeur de symboles phalliques (J. Mallet). La phobie de l’école, de structure complexe, est une éventualité plus nettement pathologique. L. Michaux a montré, d’autre part, que certaines phobies infantiles représentent une première manifestation de la névrose obsessionnelle.

Chez l’adulte, les phobies figurent très fréquemment dans le tableau clinique des diverses variétés de névroses. En particulier dans la névrose obsessionnelle. Elles peuvent aussi s’incorporer à la structure de certaines psychoses.

Il existe enfin une névrose phobique, isolée par Freud. Celui-ci la nomme « hystérie d’angoisse » pour souligner son étroite parenté structurale avec l’hystérie. Elle prend fréquemment la forme de claustrophobie, d’agoraphobie, de phobie des rues. Elle peut être fort discrète. Nombreux sont les sujets qui éprouvent uniquement la phobie des rats, des araignées, des objets rugueux ou celle des orages, par exemple. Sans présenter d’autres symptômes nettement pathologiques.

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Dans les formes plus accentuées, l’évolution peut se faire, surtout au début, sur le mode intermittent, mais elle tend toujours à la chronicité. Il s’agit alors de sujets hyperémotifs, inquiets, vulnérables, qui cherchent parfois à dissimuler et à circonscrire leur trouble par une affectation d’intransigeance dominatrice. Leur activité sexuelle se démarque alors par de fortes inhibitions aboutissant souvent à l’impuissance ou à la frigidité.

Pierre Janet considérait les phobies comme des manifestations de la psychasthénie. Au même titre que les obsessions, auxquelles beaucoup d’auteurs les assimilent. Sous l’influence des conceptions psychanalytiques, on tend aujourd’hui à dissocier les deux névroses, auxquelles ont reconnaît des structures différentes. Pour H. Nunberg, la phobie serait une forme remaniée et élaborée de la névrose d’angoisse. L’angoisse primitivement liée à un danger interne, à une pulsion refoulée, se déplacerait pour se fixer sur un objet externe substitutif. Les troubles de l’évolution affective par fixation et régression sont facilement identifiables. Comme dans toutes les névroses et le contenu sexuel des phobies apparaît souvent de façon évidente.

J.-M. Sutter.

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