Métapsychique en psychologie
Terme adopté par Ch. Richet, pour désigner la science qui étudie « tous les phénomènes paraissant dus à des forces intelligentes inconnues, en comprenant dans ces intelligences inconnues les étonnants phénomènes intellectuels de nos inconsciences ».
Il distingue la Métaphysique subjective ou cryptesthésie et la Métapsychique objective. La première englobe toutes les perceptions qui peuvent être recueilles grâce à une sorte de sensibilité cachée : monitions, prémonitions, lucidité, divination.
La seconde est objective en ce sens que les phénomènes dont elle poursuit l’étude peuvent être observés par plusieurs sujets : il s’agit de télékinésies (mouvement d’objets à distance, sans contact ; bruits et coups frappés) et d’ectoplasmies (matérialisation de formes vivantes, d’objets, de figures, de personnages).
Du point de vue psychiatrique, tous ces phénomènes dont le grand physiologiste a voulu entreprendre une étude scientifique à la suite d’autres savants (Crookes, Flammarion, etc.), sont un aliment de choix pour les délirants. Nous en avons décrit les manifestations dans notre thèse (Les délires de Métaphysique, Bordeaux, 1927). Les malades font appel à des notions de cet ordre au même titre qu’à la magie, à la sorcellerie, aux superstitions vulgaires. D’autres, plus avertis, essaient d’expliquer les phénomènes étranges dont ils se voient le théâtre par une science mystérieuse plus compréhensive que la science orthodoxe, plus sérieuse que la magie populaire. Volontiers, ils s’adoptent au spiritisme, à l’occultisme, à la théosophie qui pourront satisfaire leurs besoins philosophiques ou religieux.
A ce double titre (désir d’explication scientifique, angoisse métaphysique), ils donnent des indications précieuses sur la personnalité du malade.
H. Aurin

Intériorisation, vie intérieure
On doit entendre par « vie intérieure » toutes les formes d’activité psychique consciente et désintéressée auxquelles s’adonne un sujet dans l’intimité de son moi. Le caractère essentiel de cette activité intérieure est qu’elle ne s’applique par immédiatement à des fins pratiques et extérieures. Le sujet a, en quelque sorte, « débrayé » pour un temps variable de la vie extérieure, pragmatique, pour s’enfermer dans l’isolement et le recueillement : ce processus est l’intériorisation.
Il y a toute une série de formes de la vie intérieure qui se rattachent aux états normaux ou constituent parfois des états supérieures s’opposant à la vie psychologique commune orientée vers des fins pratiques et sociales. Senges, qui a donné une bonne études des formes normales et pathologiques de l’autisme, a bien fait remarquer qu’il a des formes et des aspects variables suivant l’âge, le tempérament, la richesse intellectuelle et imaginative, le potentiel affectif.
Le monde intérieur de l’enfant est peuplé d’images, attractives ou répulsives, qui peuvent donner naissance à des rêveries charmantes ou fantastiques, à des refoulements affectifs, gros de conséquences ultérieures. Chez les adolescents, la prise de conscience de la personnalité, l’ardeur sentimentale, l’enthousiasme pour des idéologies diverses, vont créer une vie intérieure riche et bouillonnante, mais toujours prête à l’expansion extérieure.
Avec la maturité et l’expérience de la vie, les tendances intériorisatrices se poursuivront, mais s’orienteront plutôt vers la méditation et la réflexion qui viendront renforcer les traits essentiels du caractère.
Toutefois, ces intériorisations normales ne s’accompagnent que d’une rupture momentanée et consciente du contact avec le réel, contrairement à certaines intériorisations pathologiques dans lesquelles la rupture est permanente et habituelle. On peut s’isoler, remarquait Senges, pour se reposer, rêver, se livrer à la spéculation métaphysique ou à l’intervention littéraire, selon son tempérament personnel, tout en respectant des obligations sociales. Cette vie intérieures, parfois très intense, chez les grands penseurs, les grands mystiques, les grand poètes, les grands philosophes ou les artistes, est essentiellement communicable et vient enrichir le trésor intellectuel de l’humanité.
Mais l’intériorisation présente parfois, pour certains sujets, de réels dangers et peut dévier vers des formes anormales et morbides : les éléments affectifs et imaginatifs, qui en sont la matière principale chez les jeunes, peuvent les conduire aux confins de la psychopathologie émotionnelle et susciter des névroses. La plus grande surveillance et la plus grande discipline s’imposent en pareil cas.
Comme aspect franchement pathologique de l’intériorisation, rappelons l’autisme des schizoïdes et des schizophrènes, qui entraîne une rupture permanente du contact vital avec le réel ; c’est une sorte d’enkystement ou d’isolement d’une vie psychologique réduite, désagrégée, plus automatique que dirigée et qui n’est plus en communion avec le reste des hommes.
Fort troublée aussi est la vie intérieure des douteurs, des obsédés, des scrupuleux. Leur torture morale est souvent grande et l’inhibition qui l’accompagne, le travail incessant de leur esprit, les mettent souvent en état d’infériorité pratique, mais ils n’ont pas perdu, pour cela, la connaissance et le sens des réalités qu’ils ne peuvent accomplir aisément.
De plus, les contacts affectifs persistent chez eux et sont souvent même exagérés. Le psychasthénique, qu’il soit obsédé, douteur, scrupuleux, aboulique, dépersonnalisé, n’est jamais indifférent. On saisit là la différence fondamentale qui sépare en réalité l’autisme du schizophrène de l’intériorisation affective ou émotionnelle des psychasthéniques. « La vie intérieure n’est pas interdite à de pareils malades ; on trouve parfois parmi eux de grands rêveurs, des hommes de talent, et peut-être des génies » (Senges).
Ant. Porot.

Divination, Divinatoire
Les sciences divinatoires, la divination ont toujours fait partie de la Magie et constitue, dans le domaine du Merveilleux, l’une des formes les plus désirables de puissance. C’est, il est vrai, la forme de connaissance la plus immédiate et la plus complète ; c’est aussi, en un sens, la plus économique, celle qui demande le moins d’effort intellectuel et qui, trop souvent associée au Fatalisme, dispense de l’effort physique et du labeur soutenu. A tous ces titres, elle ne peut que séduire le primitif tel que nous le connaissons et tous ceux qui s’en rapprochent.
Le besoin de connaître et de prévoir, toutefois, constitue une tendance légitime à connaître les dangers qui nous menacent et à les combattre avant qu’ils ne soient trop forts : c’est la sagesse même.
Le Primitif n’entreprend rien (chasse, guerre, travail agricole, recherche du responsable d’un accident ou d’un crime) sans interroger les présages familiers, méditer sur ses rêves, en provoquer au besoin. Chose importante et trop peu connue : le présage et tous les moyens magiques de connaissance sont en même temps des Forces en action qui tendent à la réalisation du fait prédit. Prédire et produire sont liés par un même déterminisme auquel, par surcroît, il est dangereux et sacrilège de s’opposer. Cette notion dont les traces s’observent en psychologie normale (rancune contre les prophètes de malheur), apparaît fréquemment en psychologie pathologique. A côté du rêve, des pressentiments et intuitions délirantes (Dublineau), il faut insister sur l’interprétation délirante et les oracles hallucinatoires qui ont tous ce triple caractère d’avertissement, d’efficience et de « sacré » (au sens du mot latin : sacer). On peut en dire autant de certains phénomènes autoscopiques et cénesthésiques (id.)
La divination de la pensée (Heuyer et Lamache, Congrès des Aliénistes et Neurologistes, 1925, p. 197) constitue, pour certains malades, une faculté exceptionnelle qui leur permet de connaître directement la pensée d’autrui.
Le délire prophétique peut en être rapproché.
Du point de vue séméiologique la divination, sous ses diverses formes, peut s’observer dans tous les états.
Elle exprime chez le mélancolique les châtiments qui sanctionnent sa culpabilité et son indignité : intuitive ou sous la forme d’hallucinations brèves stéréotypées (« Tu vas mourir » ; « Te es le déshonneur de ta famille » ; « Tu feras le malheur de tous les tiens »), ou encore d’interprétations typiques. Elle porte en elle son potentiel d’efficience et doit suivre son cours, ainsi que nous l’avons montré (Explication sociologique du délire mélancolique, Congrès des Aliénistes et Neurologistes, 1947).
Fabulation et activité de jeu chez le maniaque, forme de mythomanie chez l’hystérique, elle intervient à tout moment dans les délires d’influence, les paraphrénies, les états démentiels, etc. Elle signifie volontiers un certain contentement de soi, une vanité puérile, plus rarement un don sacré et redoutable.
H. Aubin.
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