Folie

Folie

Expression ancienne et générale servant à désigner tous les dérèglements de l’esprit. Cette appellation visait surtout les manifestations extérieures des désordres mentaux, leur apparence immédiate, à une époque où l’on n’avait pas encore pénétré leur mécanisme de production, leur conditionnement organique ou leur déterminisme psychologique, leurs formes évolutives.

A mesure que l’étude des troubles mentaux se fait plus scientifique, ce mot, trop imprécis et trop vague, tendit à disparaître du vocabulaire médical pour être remplacé par des termes mieux adaptés aux conceptions modernes. Toutefois, il a gardé longtemps et garde encore droit de cité en psychiatrie lorsqu’un qualificatif, associé à lui, précise et limite sa signification à un groupe déterminé de faits cliniques : folie circulaire ou à double forme, folie morale, folie à deux, folies raisonnantes, folié puerpérale, etc. Encore est-il que, même dans ces formes catégorisées, le mot de psychose tend à remplacer celui de folie.

Il n’a pas été retenu non plus dans le langage administratif et judiciaire où le mot d’ « aliénation mentale » est resté terme légal.

A.P.

Folie circulaire

Nom donné parfois à un aspect de la psychose à double forme (maniaco-dépressive) lorsque les deux accès se succèdent l’un à l’autre sans intermittence. La cyclothymie représente cette disposition à l’état constitutionnel.

En dehors de la psychose maniaque dépressive, on a décrit quelques états pseudocirculaires, dans la confusion mentale, par exemple, lorsqu’à une phase d’agitation délirante succède un état de stupeur.

F.R.

Folie du doute

Névrose obsessionnelle dans laquelle l’élément affectif prend la forme du doute.

Le doute obsessionnel est l’une des variétés les plus pénibles et les plus graves d’obsession. Il entraîne un besoin constant et anxieux de vérification, un perpétuel recommencement des opérations les plus simples, pouvant provoquer un véritable épuisement.

Parfois le doute s’applique à un objet unique et précis : tel obsédé, chaque fois qu’il sort, craint de n’avoir pas fermé sa porte, tel médecin de d’être trompé dans la rédaction de ses ordonnances. D’autres fois, le doute s’étend à toute une catégorie d’objets, d’idées ou de situations, en particulier dans le domaine religieux où il prend généralement la forme du scrupule. Mais, le plus souvent, le doute embrasse toutes les activités du malade, introduisant dans les actes les plus simples un germe d’intolérable anxiété : il s’étend rétrospectivement au plus lointain passé, à une confession faite dans l’enfance et qui a peut-être été incomplète, à une déclaration sans importance, mais qui risque d’avoir été inexacte ; toute décision prête à d’interminables tergiversations et lorsque enfin, l’action est engagée, il apparaît aussitôt que la solution écartée était probablement la meilleure. Le domaine des sensations comme celui des connaissances ne recèle plus aucune certitude et certains malades en viennent à douter de leur propre existence.

Le doute obsessionnel, comme toute obsession, peut revêtir une forme transitoire, parfois liée à l’évolution de syndromes psychiatriques ou somatiques, dont il représente seulement un symptôme. Le plus souvent, il affecte une allure chronique et résiste aux thérapeutiques les plus diverses. La psychothérapie et, en particulier, la psychanalyse, viennent cependant à bout d’un nombre appréciable de cas.

J.- M. Sutter.

Folie érotique

Appellation tombée en désuétude qui, au siècle passé, réunissait aussi bien les simples exaltations du sens génital que les perversions sexuelles et les délires étotomaniaques (v. Erotisme, Erotomanie, Perversions sexuelles).

Ch. B.

Folies raisonnables

Sous ce nom, Sérieux et Capgras ont groupé, en 1909, tous les états délirants chroniques systématisés dans lesquels le désordre primitif et le mécanisme constructif paraissent essentiellement d’ordre intellectuel : idée prévalente et surtout interprétation. Ce groupe s’oppose à celui des délires systématisés chroniques hallucinatoires par le double fait qu’il n’y a pas de troubles psychosensoriels et jamais de fléchissement intellectuel. Aussi les thèmes développés peuvent-ils avoir parfois à première vue une apparence de vraisemblance tant qu’ils restent dans une ligne de déductions coordonnées ; la fausseté d’esprit foncière est cependant possible à discerner. Il s’agit, le plus souvent, d’une viciation constitutionnelle.

Dans ce groupe de folies raisonnables, se rangent les délires d’interprétation essentiels, type Sérieux et Capgras, les délires de revendication, de quérulence, certains délires de préjudice et, d’une façon générale, tout ce qui ressortit à la paranoïa (v. Paranoïa, Interprétation, Délires systématisés).

A. P.

Intervalles lucides

Période de rémission, plus ou moins complète et plus ou moins longue, au cours d’un état d’aliénation mentale.

Classiquement, on peut distinguer :

1) La rémission ou atténuation plus ou moins marquée des symptômes pouvant annoncer une guérison.

2) Le moment lucide, court éclair de lucidité dans une maladie dont l’évolution n’est pas interrompue.

3) L’intermission, retour complet à l’état normal entre deux accès se rencontre surtout dans les psychoses maniaques et mélancoliques intermittentes ou à double forme.

Ces états posent de délicats problèmes médico-légaux :

1) Il ne faut pas perdre de vue que les actes de l’aliéné interné non interdit ne sont pas nuls de droits, mais son annulables si l’on peut faire la preuve de l’« état de démence » au moment de l’acte. En conséquence, un acte accompli au cours d’un intervalle lucide, dûment constaté, ne peut être annulé.

2) Pour le maniaque ou le mélancolique en rémission et sorti de l’hôpital, le problème est encore plus délicat à résoudre.

En principe, sa capacité civile est entière. Mais il est, particulièrement pour le maniaque, très difficile de préciser le début de la crise et moment où l’excitation fait perdre au maniaque le contrôle de ses actes.

Il est alors indispensable de ne se prononcer que sur des faits précis et dûment établis par une enquête approfondie.

3) Par contre, l’existence d’intervalles lucides au cours d’une maladie mentale ne serait pas une raison suffisante pour que l’interdiction ne soit pas prononcée, si elle est justifiée par ailleurs.

4) Si l’interdiction a été prononcée, apparition d’un intervalle lucide peut amener à envisager la levée de l’interdiction (v. Interdiction, Capacité civile).

F. Ramée.

États mixtes

On entend par états mixtes des syndromes se rattachant à la Maniaque-dépressive dans lesquels sont combinés des symptômes d’excitation et des symptômes de dépression.

La coexistence de ces symptômes en apparence opposés n’avait pas échappé aux vieux cliniciens français, tels que Guislain, Baillarget, Falret, mais c’est à Kraepelin qu’il appartient d’avoir bien mis en lumière ces états mixtes dont il définit 6 variétés :

  1. La manie coléreuse ;
  2. La manie dépressive ;
  3. La manie improductive ;
  4. La stupeur maniaque ;
  5. La dépression avec fuite des idées ;
  6. La manie akinétique.

En France, si cette conception reçoit l’approbation de Deny et Camus et de Gilbert Ballet, elle est formellement repoussée par Régis, puis par Devaux et Logre.

Tout récemment, dans une intéressante étude critique, Michaux s’est efforcé de préciser quels états méritent véritablement le qualificatif d’états mixtes.

Après avoir éliminé ce qu’il appelle : « les faux états mixtes » – appartenant à la démence précoce, à la paralysie générale ou à la bouffée délirante polymorphe 0 ou dus à la succession incessante et rapide de l’excitation et de la dépression – il admet l’existence de manies atypiques et de mélancolies atypiques provenant le plus souvent de tendances constitutionnelles sous-jacentes ou d’une dissonance idéo-affective par persévération idéique.

Quelle que soit l’explication admise, la réalité et aussi la rareté des vraies états mixtes paraît devoir être admise.

F. Ramée.

Voir aussi :

Folies raisonnables
« La pensée naît du doute. » (Laurent Genefort, auteur de science-fiction, Rézo). Tous étant poètes, tous étant savants, tous sachant se servir de facultés jusqu’alors rudimentaires, rien de nos sauvageries présentes ne subsistera.Louise Michel L’ère nouvelle – Pensée dernière – Souvenirs de Calédonie (Champ des Captifs). Crédit photo : Megan Jorgensen.

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