Discordance

Folies discordantes

« Les symptômes simulent très souvent la démence : délire incohérent à froid, indifférence, actes bizarres de divers genres ou bien inactivité complète de l’intelligence avec occupations devenues d’ordre inférieur, stupeur avec attitudes bizarres, actes incohérents, etc., et, malgré cela, le plus souvent, aucun signe d’affaiblissement intellectuel proprement dit, même passager.

Tout ce que l’on peut dire, ajoutait-il, c’est que ces symptômes incohérents, discordants, indiquent qu’un jour il y aura très probablement, dans l’évolution de l’affection, une période de démence. » Il avait noté aussi, en effet, les rémissions de longue durée, puis les rechutes définitives.Comme on le voit, l’idée directrice de cette conception était superposable à celle qui amenait Bleuler à la même époque (1911) à créer le mot schizophrénie pour le même groupe de faits.

La discordance de Chaslin et la dissociation de Bleuler évoquent le même désordre fondamental et groupent autour de ce noyau principal les mêmes faits cliniques rangés autrefois sous les rubriques d’hébéphrénie, d’hébéphréno-catatonie, de démence précoce.Au demeurant, Bleuler lui-même a reconnu que si ce terme de « folie discordante » était venu à sa connaissance, il l’aurait tout aussi bien employé que celui de schizophrénie.Il s’agissait, dans un cas comme dans l’autre, d’une réaction à la conception kraepelinienne de la démence précoce. Kraepelin avait fait de la démence terminale le lien commun et l’aboutissement de toutes ces formes de démence précoce.

Kraepelin avait fait de la démence terminale le lien commun et l’aboutissement de toutes ces formes de démence précoce. Chaslin, comme Bleuler, cherchait au contraire l’unité de leur groupe dans l’analyse du mécanisme symptomatique. Rappelons les 4 types principaux de folies discordantes présentés par Chaslin :

L’hébéphrénie, qui débute de 8 à 25 ans, avec son début brusque ou lent, avec tous ses différents aspects cliniques, ses formes atténuées et profondes (les symptômes sont ceux de la schizophrénie de Bleuler).

La folie paranoïde, qui débute plutôt dans la jeunesse que dans l’enfance, parfois dans l’âge adulte, à installation souvent assez rapide avec son délire multiforme et incohérent, ses phases d’agitation et son évolution démentielle vers l’absurde.

La folie discordante verbale, forme originale, mais plus rare dans laquelle, après un début d’allure hébéphrénique, la folie se résume en un langage ou des écrits complètement incohérents avec surabondance de mots fabriqués constamment ; la mimique du discours est conservée contrastant avec l’incompréhensibilité du sens. Cette folie discordante verbale correspond, dans la terminologie bleulérienne à la « schizophasie ». Si la schizophrénie a conquis le droit de cité dans la nosographie, plutôt que la folie discordante, il n’en reste pas moins que le mot discordance est couramment employé dans la terminologie psychiatrique.

Par ses bizarreries, ses contradictions et ses manifestations paradoxales, la discordance peut éveiller des doutes sur la sincérité d’un sujet ; en certains milieux (pénitentiaire, militaire), des hébéphréniques ou des schizophrènes au début de leur maladie ont pu être pris pour des simulateurs.

Verbigération

Dévidage automatique de mots sans suite, de lambeaux de phrases ou de phrases entières, mais mal enchaînées. Il s’y ajoute, dans certains cas, des altérations de la structure syntaxique, des déformations syllabiques de mots, des néologismes qui rendent le verbiage incompréhensible (salade de mots).

Aussi pourra-t-on observer de la verbigération chaque fois qu’il y a éclipse de la conscience : verbigération au cours de certaines absences épileptiques, marmottement des confus oniriques.

C’est surtout dans les dégradations démentielles que s’observera le phénomène : verbigération de quelques déments précoces, bavardage interminable et incohérent de certains séniles, des presbyophréniques en particulier.

Il y a des délirants chroniques qui parient sans arrêt, usent d’un langage elliptique truffé de néologismes qui, souvent, expriment par contraction des résidus de thèmes délirants et dont une étude attentive permet de retrouver parfois le symbolisme. Des intrusions de mots néoformés ou de locutions à première vue incompréhensibles, émaillent les propos des paraphréniques et Chaslin avait fait de la discordance verbale une de ses formes de folie discordante.

Mais en dehors de ces atteintes intellectuelles globales, on peut noter de la verbigération avec déformation des mots quand la zone seule du langage est atteinte (paraphasie et jargonaphasie de certains aphasiques).

Ant. Porot.

Voir aussi :

Folies discordantes
Les folies discordantes peuvent éveiller des doutes sur la sincérité d’une personne, mais existe-t-il une chose qui ne peut les éveiller? (citations de Megan Jorgensen). Photo : © GrandQuebec.com.

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