Destructivité, mutilation et automutilation

Destructivité, mutilation, automutilation en psychiatrie

La mutilation est une manifestation de l’instinct d’agressivité et de destructivité ; elle est, le plus souvent, le fait d’une perversion instinctive et, à ce titre, peut apparaître précocement chez certains enfants sous forme de cruauté envers les animaux.

Chez l’adulte, elle s’associe parfois aux perversions sexuelles dont elle constitue un élément principal (sadisme, sadmasochisme). Elle accompagne quelquefois l’homicide (mutilation de cadavres) et a été relatée dans des crimes d’alcooliques ou d’épileptiques.

Elle s’observe dans les mœurs rituelles de quelques peuples primitifs et les mutilations infligées par les guerriers à leurs adversaires vaincus sont une tradition barbare, mais fréquente encore dans certaines peuplades.

D’autre fois, une justice sommaire punissait le coupable par une mutilation appropriée au délit commis ; on coupait le poignet des voleurs. Récemment encore, en Afrique du Nord, les mutilations au cours de la rébellion n’étaient pas rares : on coupait les lèvres ou le nez d’un indigène qui avait enfreint la défense de fumer ou de priser ; le rite de l’égorgement, employé par les fellagahs, n’était qu’une survivance de la façon de sacrifier les animaux, ou d’une certaine croyance qui voulait qu’au paradis d’Allah on ne pouvait être agréé avec une mutilation.

Automutilation. – Elle a été pratiquée parfois délibérément et de sang-froid par certains sujets désireux de se créer une invalidité qui les exonère du service militaire ou les soulage, pour un temps, du régime pénitentiaire par un passage à l’infirmerie ou à l’hôpital. Le cas était bien connu autrefois des médecins militaires préposés au service des Bataillons d’Afrique français et des Pénitenciers.

A ces cas dont la signification est nettement utilitaire, on peut ajouter certaines plaies suspectes chez des hystériques. En dehors de ces faits particuliers, l’automutilation a toujours une signification pathologique.

On la rencontre chez certains obsédés, qui, dans un paroxysme anxieux, peuvent se livrer sur leur propre corps à une tentative de libération par un geste de destruction ; le fait se voit surtout chez les obsédés génitaux et l’on a cité plusieurs tentatives d’autocastration n’aboutissant souvent qu’à des mutilations regrettables.

C’est surtout chez les anxieux et les mélancoliques que se rencontrent les automutilations : parfois tentatives de suicide n’ayant pu se réaliser complètement, parfois lacération volontaire du visage, tentatives d’ouverture des veines, coups violents de la tête contre les murs, etc.

D’autres idées délirantes que celles des mélancoliques peuvent commander l’automutilation : idée de sacrifice sous une inspiration mystique ou ascétique ; autopunition dans le délires de culpabilité on d’autoaccusation quelles qu’en soient la nature et l’origine.

Ant. Porot.

Destructivité

Terme proposé par Spurzheim (1918) pour désigner une variété de perversion instinctive caractérisée par un penchant morbide à la destruction. La destructivité est indépendante à la fois du niveau mental de l’individu et de son éducation, de l’objet visé et des moyens employés à le détruire. Elle fait « mordre, déchirer, brûler, dévaster, démolir, ravager, noyer, étrangler, empoisonner et assassiner » pour le plaisir d’anéantir les choses, de torture et de voir souffrir les êtres animés.

Il s’agit d’une forme très générale de dispositions psychopathologiques dont la malignité ne serait qu’un des aspects (Dupré). Ces dispositions sont souvent latentes et plus ou moins tenues en échec par les conditions mêmes de la vie sociale. Mais que ces contraintes soient relâchées, qu’elles disparaissent du fait d’une psychose aiguë (manie ou confusion) ou d’une démence, et on la voit se révéler librement.

L’intervention des facteurs ethniques est assez apparente dans certains cas.

La destructivité est parfois contagieuse et collective, déclenchée et exaltée dans certaines circonstances sociales (émeutes, révolutions, guerres) ; des exemples effroyables en ont pu être observés dans les guerres récentes.

Clastomanie

Manifestation de la destructivité. L’orientation systématique, précoce et primitive de l’activité motrice vers la démolition se traduit, chez certains idiots, par le bris, la lacération avec les membres ou avec les dents de tout objet qui se trouve à leur portée.

Onn observe encore la clastomanie (Capgras) sous une forme paradoxale, impulsive et obsédante dans les séquelles de psychoses agitées comme la manie.

Ch. Bardenat.

Automutilation

Accidents fréquents dans la mélancolie et surtout dans ses formes anxieuses ou délirantes, où il prend sa place à côté du refus d’alimentation ou des tentatives de suicide; mais on peut la rencontrer aussi dans d’autres états anxieux où elle se produit à l’occasion d’un raptus. Chez les obsédés, surtout les obsédés génitaux, elle revêt la signification d’une autopunition, surtout chez les sujets tourmentés par des scrupules religieux; elle devient alors un geste auto-punitif du sentiment de culpabilité.

L’automutilation peut porter sur tous les organes, mais spécialement sur les organes génitaux.

On l’a signalée sur les yeux (A. WAL-KENHEIM, Y. BECKER et Mlle NEVERJ. Cahiers de psychiatrie, 1956, n° 11, Strasbourg).

La psychoanalyse peut aider à dégager le processus psychologique en cause.

L’automutilation peut exister enfin danscertains delires chroniques très systématisés et parfois dans le comportement étrange et paradoxal des schizofrènes.

Ant. POROT.

Ethno-psychiatrie (Facteurs ethniques)

Les facteurs ethniques encore très insuffisamment étudiés, offrent pour le déterminisme des maladies mentales et dans la compréhension de leurs manifestations un intérêt certain.

L’anatomie et les diverses sciences fondamentales nous renseignent sur la morphologie générale des populations, les cadres typologiques auxquels elles appartiennent, leurs caractéristiques physiologiques, le fonctionnement des endocrines si important au point de vue psychique. Divers notions biologiques mériteront d’être mises en évidence (l’hypoglycémie de diverses nations) et rapprochées des données de la géographie médicale et des fragilités morbides électives (vulnérabilité à l’alcool vis-à-vis du pneumocoque ; résistance à la tuberculose évolutive).

L’ethnographie signale les coutumes susceptibles de favoriser certaines affections (l’intervention des matrones dans les accouchements entraîne parfois des traumatismes crâniens générateurs d’épilepsie, les rites funéraires répandent certaines maladies infectieuses). Enfin, la psychologie ethnique nous apportera des matériaux de la plus haute importance, immédiatement utilisables.

Les données sociologiques méritent d’être étudiées séparément.

Sémiologie. – Nous possédons encore peu de documents utilisables sur les groupes ethniques ; la connaissance de leur psychologie, du fonds commun de primitivisme, l’exemple des tribus et d’une civilisation fixée , doivent permettre, dans une certaine mesure, de comprendre l’aspect des psychoses dans les divers milieux de la civilisation humaine.

H. Aubin.

Voir aussi :

La mutilation peut apparaître précocement chez certains enfants sous forme de cruauté envers les animaux (Antoine Porot). Photo : Megan Jorgensen
La mutilation peut apparaître précocement chez certains enfants sous forme de cruauté envers les animaux (Antoine Porot). Photo : Megan Jorgensen.

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