Colibacillose en psychiatrie
Conditions étiologiques : – Les accidents psychiques de la colibacillose s’observent dans les états puerpéraux, dans les pyélonéphrites aiguës ou torpides ou dans les appendicites, opérés ou non. Plus rarement ils se manifestent chez des sujets constipés chroniques, porteurs bien souvent de malformations coliques, à la suite d’erreurs de régime, d’abus de lavements, de purgatifs, etc.
Le terrain joue un rôle considérable. L’hérédité psychopathique ou névropathique, le déséquilibre neurovégétatif, les chocs affectifs répétés méritent une mention toute particulière. Mais plus importantes encore sont les infections associées : fièvre typhoïde, syphilis (Guiraud) et surtout tubereculose. La colbacillose s’attaque, le plus souvent, au système neurovégétatif de sujets porteurs de lésions tuberculoses frustes, du type Burnand-Jacquelin (Aubin).
Formes cliniques :
1) La neurasthénie, étudiée par Desgeorges (de Vichy), se rencontre fréquemment chez les colibacillaires avérés ou ignorés, avec une nuance de morosité et d’anxiété assez particulière. Cette forme clinique s’observe surtout lorsqu’il y a association d’une tuberculose atypique.
L’hystérie, certainement favorisée dans son développement par la colibacillose, révèle d’autre part des conflits psychologiques qu’il importe d’étudier; elle peut annoncer un début de schizophrénie dont le diagnostic précoce doit être posé.
Des crises névropathiques, des syndromes obsessionnels se rencontrent à titre épisodique.
2) Les états confusionnels et oniriques, aigus ou prolongés, constituent des affections fréquentes, notamment dans les psychoses puerpérales.
L’évolution se fait beaucoup plus lentement que dans les formes banales de confusion : de longs mois, un an, parfois davantage.
On a cité des formes narcoleptiques (Baruk) simulant l’encéphalite épidémique et démontrant l’affinité de la toxine neurotrope pour les centres du sommeil.
Le tableau mental a pu réaliser le délire aigu avec d’autant plus de facilité que le traitement spécifique et de réhydratation était plus tardivement mis en œuvre.
3) La catatonie, expérimentalement réalisée par Baruk, se retrouve dans diverses observations.
4) Les états mélancoliques vrais, à distinguer des états dépressifs névrapathiques, comportent le tableau classique avec son anxiété, ses idées d’auto-accusation, ses impulsions suicides, etc.
De même, la manie authentique peut s’observer.
Diagnostic et traitement. – La notion de stase intestinale chronique avec ou sans malformation colique, surtout si l’abus de lavements et de purgatifs a favorisé l’irritation de la muqueuse, indique l’origine du processus; mais cette notion manque parfois et il faut se souvenir du rôle important que peuvent jouer les parasites intestinaux et même certaines substances (bile). L’étape sanguine de la colibacillose étant habituellement très fugitive, il ne faudra pas compter sur l’hémoculture pour établir le diagnostic.
Ce sont surtout les accidents de la 3e phase, celle de l’envahissement des organes, qui donneront les indications les plus utiles; avant tout, on recherche la triade entéro-hépato-rénale avec ses éléments habituels.
On peut retenir, du point de vue nerveux, certains signes prémonitoires importants (céphalées, asthénie, dépression, fatigabilité psychique et physique, algues), accompagnés de sensation de fièvre et d’hypotension.
La colibacillurie étant établie après prélèvement aseptique, il faut se demander si la psychose provient de cette étiologie ou si elle était antérieure. Les considérations cliniques précédentes se limitent à la première alternative.
La seconde n’est pas exceptionnelle; on conçoit qu’un mélancolique constipé et négativiste puisse faire une complication de cette nature; son état en est aggravé. Mais il ne faudra pas espérer obtenir une guérison totale par un simple traitement étiologique.
Celui-ci doit être local et général; on oublie trop souvent la nécessité de cette double attaque. Or, il est nécessaire, d’une part, de drainer une pyélonéphrite, d’opérer une appendicite, de combattre une stase colique. Mais il faut aussi, d’autre part, utiliser la sérothérapie (sérum de Vingent) d’une manière intensive et prolongée (33 cc par jour, par voie sous-cutanée pendant plus d’un mois). On évite les accident sérothérapiques par la potion : salicylate de soude-benzoate de soude à 6 g; eau de Vichy 300 cc à absorber dans les vingt-quatre heures, par prises régulières diurnes et nocturnes. L’uroformine est utile. Les antibiotiques seraient inefficaces pour les accidents mentaux, car la toxine neurotrope, fixée sur les centres nerveux, ne peut être neutralisée que par l’antitoxine qui fait la valeur du sérum de Vincent. Toutefois, la streptomycine a donné, ces derniers temps, des résultats intéressants dans les formes aiguës fébriles.
Dans les cas rebelles, la décision favorable ne surviendra qu’après une cure complémentaire par chocs.
H. Aubin.
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