Mauvais Souvenirs
par Naïm Jeanbart
McGill peut aujourd’hui s’enorgueillir de la réputation de ses départements de psychologie, de psychiatrie et de neurologie, ainsi que de son histoire en tant que pionnière en la matière. Cette histoire n’en est pas moins ponctuée de contributions scientifiques qu’elle s’attache à faire oublier: l’institut Allan-Memorial (AMI) ou l’institut neurologique de Montréal ont été, à leurs débuts, le théâtre d’un certain nombre d’expériences dont les fondements éthiques sont aujourd’hui remis en question.
Le cas de Janine Huard n’est pas isolé. Il s’inscrit, au contraire, dans le contexte tant scientifique que politique d’une époque, celle des années 70. La Guerre froide conjuguée à la neuroscience naissante et à l’absence de protocoles éthiques ont lancé chercheurs et gouvernements dans l’exploration des possibilités du cerveau humain et de ses fonctions neuronales, notamment dans le but de conditionner le cerveau humain en vue de façonner le comportement de l’individu face à l’information. Elles reflétaient la volonté des gouvernements de renforcer leur emprise sur les esprits en s’assurant la perméabilité des populations à la propagande, ainsi que la docilité des détenus lors des interrogatoires.
Donald O. Hebb
En 1951, Donald Olding Hebb mène des expériences sur le psychisme humain, particulièrement sur les conséquences de l’isolement sensoriel sur l’individu. Cet éminent professeur de McGill est financé par la CIA qui désire vérifier si cette méthode peut affaiblir les détenus afin de les pousser aux aveux.
Le protocole expérimental d’Hebb est le suivant: il allonge ses sujets individuellement dans des chambres insonorisées, en les attachant et en faisant en sorte qu’il reçoivent le moins de stimulation sensorielle possible; le moins de contact avec quoi qui ce soit. Au bout de quelques heures de ce régime, les cobayes commencent à être en proie à des hallucinations et autres perturbations sensorielles. La conclusion de Hebb: en l’absence de contact avec le reste du monde, le cerveau «s’auto-stimule».
De nouvelles expériences qui ont été menées à partir de ces découvertes, notamment aux États-Unis avec John C.Lilly, qui s’était enfermé dans un caisson d’isolation afin d’explorer lui-même le potentiel d’apport du monde extérieur.
Le professeur Milner se souvient du docteur Penfield
À McGill notamment, les neurosciences se sont développées dans un climat de prise de risques, indépendamment du contexte encourageant de la guerre froide et de la paranoïa occidentale pour les prétendus secrets soviétiques du lavage de cerveau.
Peter Milner, professeur émérite de psychologie de McGill et ancien élève de Hebb, se souvient des expériences révolutionnaires du docteur Wilder Penfield, lorsque celui-ci opérait des sujets épileptiques. À la stupeur générale, il «effectuait ses opérations chirurgicales sur le cerveau tout en maintenant ses patients en état de veille, raconte Milner, le cortex exposé», au moyen d’une anesthésie locale. Penfield a ainsi découvert qu’en touchant telle ou telle partie du cerveau, il pouvait susciter tel ou tel souvenir, telle ou telle odeur, etc.», se rappelle Milner.
Avec la collaboration de Maysa Pharès et de Laurence Bich-Carrière.
Le Délit, le 23 janvier 2007 (droit de reproduction libre, à condition de citer la source et les auteurs).
Volonté
Pouvoir de détermination et surtout d’exécution que possède tout individu normal pour régler et coordonner la conduite de sa vie et pour résoudre d’une façon générale tous les problèmes qui se posent journellement à lui.
Cette potentialité est très variable, suivant les sujets et selon les circonstances. Il est des volontés puissantes, fermes et d’une rigidité inflexible ; par contre, il en est de faibles, instables et labiles. Certaines acceptent les suggestions faites par la réflexion, d’autres se laissent perturber par les ingérences affectives ou subissent des influences morbides; ces dernières sont du domaine de la psychiatrie.
Nous renvoyons au mot Aboulie pour l’exposé de ces carences et de ces perturbations qui peuvent être, les unes constitutionnelles, les autres, acquises.
Ant. Porot.
Syntonie
(Synonymes : cycloïdie, cyclothymie)
Type de constitution mentale. Les deux mots cyclothymie et syntonie désignent la même constitution, mais l’envisagent sous deux aspects différents.
Dans la cyclothymie, Kretschmer insiste surtout sur la bipolarité des réactions du sujet : il oscille entre la gaieté et la tristesse, entre l’épanouissement et l’inhibition.
En la dénnommant syntonie, Bleuler envisage la fusion intime et harmonieuse du sujet avec l’ambiance et l’oppose à la constitution schizoïde où le sujet ne vit pas en contact avec le monde extérieur. Syntonie signifie aussi unité et harmonie intrapsychique : chez le syntone, c’est la totalité de la personne qui réagit; il est joyeux dans une ambiance joyeuse, triste dans une ambiance triste ; mais chaque mouvement affectif engage tout l’être sans laisser de place à d’autres sentiments.
La syntonie correspond à la psychose maniaque-dépressive. Elle en représente la réduction dans le domaine subnormal et aussi le terrain prédisposant.
Du point de vue morphologique, la statistique des syntones comporte une proportion prédominante de pycniques : développement important de la cavité abdominale, obésité du tronc, angle épigastrique très ouvert, extrémités grêles, tête ronde, face large.
Glischroïdie
Synonyme : épileptoïdie. – Constitution mentale propre aux épileptiques et bien étudiés par Mme Fr. Minkowska, à l’aide du teste de Rorschach modifié.
Cette méthode a permis de souligner l’affectivité « collante » et « visqueuse » des épileptiques et des épilepthoïdes qui va de pair avec leur bradypsychie.
E. Minkowski a mis en relief ce qu’il appelle les deux pôles de l’épileptoïdie ou glischroïdie : l’adhésivité et l’explosivité, formule qui s’oppose à celle de la schizoïdie.
A.P.
Auto-suggestion
Modalité de suggestion appelée aussi «la suggestion réfléchie», dans laquelle le sujet utilise lui-même la propriété que possède l’idée, dans certaines conditions, de déclencher un travail subconscient qui la réalise.
Elle met en jeu les mêmes mécanismes que la suggestion, mais ne dispose pas de tous ses facteurs adjuvants; l’élément émotif, la conviction suscitée par une autorité extérieure lui manquent. Par contre, l’absence de ces facteurs est compensée par la possibilité d’un entraînement régulier et persévérant. L’état propice à l’auto-suggestion consiste dans un équilibre particulier entre l’attention et la détente, attention stagnante, qui demeure fixée sans effort aux idées qui lui sont présentées (BAUDOUIN). Il existe des procédés nombreux pour réaliser cet état: fixation d’un point lumineux, audition d’un bruit continu, concentration sur une image mentale, etc. Après un certain entraînement, le sujet parvient à l’obtenir et à l’appliquer à une idée déterminée.
L’auto-suggestion est la méthode vers laquelle doit tendre toute suggestion éducative ou thérapeutique. Ses indications sont très nombreuses.
Th. KAMMERER.
Choc affectif
On appelle choc affectif l’intervention brusque d’un facteur inattendu dans une attitude affective donnée, mettant le sujet dans l’incapacité d’y répondre par une réaction adaptée. Il s’agit d’un traumatisme psychique portant sur des instances affectives élevées. Le choc affectif sera par exemple un deuil, une rupture (amour, amitié), un échec (vie amoureuse, vie professionnelle) ou un succès, une perte matérielle, un isolement soudain (détention, exil), une surprise, une intuition brusque, etc.
Tout choc affectif peut déclencher des réactions pathologiques dans lesquelles interviennent des processus de défense, de compensation, d’inhibition : ce sont les psychoses réactionnelles.
J. Delay a montré que les réactions neurovégétatives et humorales qui accompagnent le choc émotionnel, sont comparables à celles du choc biologique. Dans les deux cas, on retrouve les éléments de la réaction d’alarme de Selye, d’origine diencéphalo-hypophysaire avec sécrétion de stimuline.
Th. Kammerer.