Vieillir n’est pas nécessairement dégénérer
Des chercheurs de l’université de Sherbrooke s’efforcent de présenter une nouvelle approche du vieillissement : celle de l’actualisation de soi que deux psychologues américains, Abraham Maslow et Carl Rogers, ont popularisé.
L’actualisation de soi, c’est la capacité de chacun de développer son potentiel psychologique et de l’exercer dans les diverses situations de la vie.
Plutôt que de marquer un déclin, le troisième âge est un temps de croissance, de dynamisme, d’intégration des possibilités de la personne. Considérer cette étape de la vie comme une phase de dégénérescence est une fausse perception à classer au rayon des mythes avec le préjugé de la personne âgée incapable d’apprendre, tournée vers le passé, solitaire et dépendante.
Pour le chercheur Gilbert Leclerc, directeur du programme d’enseignement et de recherche en gérontologie à l’Université de Sherbrooke, les principaux traits des personnes âgées qui s’actualisent bien sont : vivre magnifiquement bien le temps de grande liberté que donne la retraite et faire montre de créativité dans la manière d’organiser le temps libre.
Elles regardent le passé sans aigreur et avec une grande satisfaction de ce qu’elles ont accompli. Leur attitude face à l’avenir est positive : elles ne condamnent pas les valeurs différentes de la société et ne craignent pas la mort. En général elles sont très actives aux plans physique, intellectuel et social.
Bref, vieillir n’est pas nécessairement synonyme de dégénérescence. M. Leclerc croit que les personnes âgées peuvent se maintenir alertes à tous les points de vue jusqu’à ce que leur infrastructure se mette à décliner. Cette cassure peut se produire enter 75 et 85 ans et entraîne alors une détérioration psychologique.
Le troisième âge, renchérit M. Leclerc, fournit aux personnes âgées l’occasion de trouver le rôle qu’aucun autre groupe d’âge ne peut remplir à leur place. «Ce rôle consiste à rappeler au monde que les valeurs d’être priment sur celles de l’avoir, que le développement global de la personne est plus important que le développement professionnel et que la collaboration, le partage et l’amitié l‘emportent sur le rendement, l’efficacité et la compétition».
(La Presse, 23 novembre 1991).