Affectivité et affects

Affectivité et affects en psychologie

On fond dans le mot affectivité l’ensemble des réactions psychiques de l’individu devant les situations occasionnées par la vie : soit contacts avec le monde extérieur, soit modifications intérieures de l’organisme. Beaucoup plus qu’un domaine, la vie affective est un aspect fondamental de la vie psychique absolument indissociable de la vie instinctive d’une part, de la pensée et de l’activité d’autre part. D’où la fréquence des expressions « instinctivo-affectif », « idéo-affectif ».

L’affectivité trouve ses premières ébauches dans le domaine de l’inconscient : les activités réflexes et les conduites instinctives comportent toujours une tension suivie d’une décharge; c’est-à-dire d’une détente qui est l’analogue inconscient du plaisir et qui constitue la source biologique de tout plaisir.

Les aspects les plus élémentaires de l’affectivité sont les affects : ce sont des états psychiques immédiats inanalysables qui caractérisent le sens d’une réaction. On peut les réduire à trois (Piéron) :

  • L’intéressant, avec réaction d’attention et d’exploration ;
  • L’agréable (plaisir), avec réaction d’expansion et de recherche ;
  • Le désagréable (douleur), avec réaction de retrait et de fuite.

Par émotions on désigne l’ensemble des phénomènes psychiques et physiologiques qui caractérisent une réaction à une situation donnée. L’émotion englobe donc l’affect et toutes les réactions neuro-végétatives : motrices, sécrétoires, viscérales, vaso-motrices, etc., qui l’accompagnent. À l’effet élémentaire d’intérêt correspond l’émotion-choc, à l’affect de plaisir l’émotion-joie, à celle de douleur l’émotion-chagrin ; l’importance de la réaction de retrait et de fuite détermine l’émotion-peur; le conflit qui peut surgir entre le retrait et l’expansion, la défense te la poursuite engendre l’émotion-colère.

Les sentiments se distinguent malaisément des émotions. On peut les considérer comme :

Des émotions différenciées, affinées, décantes d’une grande partie de leur contexte physiologique;

Des états réactionnels répondant à des situations purement psychiques et non pas physiques, et par conséquent intimement liées au contenu de la pensée, aux associations mnésiques qu’il éveille, aux images et aux représentations qu’il évoque.

Les sentiments revêtent donc des formes innombrables et nuancées qui échappent à toute classification. On peut considérer les uns comme centrés sur le moi : orgueil, triomphe, jalousie, pudeur, timidité, etc.

D’autres résultent de la considération du toi ou du monde extérieur : sympathie, bienveillance, pitié, envie, haine, admiration, respect, etc. D’autres enfin ont trait à des recherches supérieures : le Vrai, le Bien, le Beau, etc.

Humeur, ton affectif. – La résultante des réactions affectives élémentaires (d’origine coenesthésique, sensorielle, psychique), l’orientation d’ensemble qu’elles adoptent, déterminent une atmosphère intérieure particulière et une attitude psychosomatique caractéristique qu’on appelle « ton affectif » ou « humeur ». Parmi les nuances infinies qu’on y trouve, on peut isoler des formes très générales : l’euphorie avec son exubérance et ses attitudes expansives; la tristesse avec son impression de malaise et ses attitudes repliées; l’indifférence, l’exaltation affective, l’insatisfaction, l’inquiétude, etc.

La passion est une polarisation acquise de l’affectivité sur un sentiment déterminé qui envahit toute la vie psychique et subordonne toute l’activité du sujet. Elle réorganise sa vie consciente et y crée un ordre nouveau qui modifie profondément toutes les valeurs antérieures.

L’affectivité en psychiatrie. – Les troubles de l’affectivité tiennent une place considérable en psychopathologie. Tous les conflits ont leur source soit dans les tendances instinctives, soit dans des réactions affectives. D’autre part, certaines expériences affectives ont la faculté de cristalliser autour d’elles – par des processus d’association – des représentations et des idées déterminées qui feront toujours corps au moment de leur évocation ou de leur oubli et qu’on appelle des complexes. La psychanalyse a montré l’importance des complexes dans la genèse des névroses et des psychoses.

L’anxiété, l’insatisfaction et le refoulement sont également des processus affectifs psychogènes. Ces allusions rapides suffisent à montrer l’importance des ressorts affectifs dans la psychopathologie. Les troubles affectifs peuvent se présenter sous trois aspects différents :

Troubles affectif constitutionnels : les réactions excessives définissent la constitution émotive ; les tendances passionnelles jouent un grand rôle dans la constitution paranoïaque; l’absence de contact affectif avec l’ambiance est l’une des caractéristiques essentielles de la constitution schizoïde.

Des troubles affectifs primaires sont à l’origine des délires chroniques progressifs, de la schizophrénie, de tout le groupe des psychoses réactionnelles.

Toutes les démences ont un retentissement secondaire sur l’affectivité; sa désintégration commence généralement par son sommet, c’est-à-dire par ses différenciaux (altruites, familiaux, amitié, sens civique). Le sujet devient égoïste et insociable. Seuls, les paralytiques généraux font exception à cette règle.

Th. Kammerer.

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L’affectivité a déjà accompli son œuvre quand se lève le monde. (L`Essence de la manifestation, par Michel Henry, écrivain et philosophe français). Image : © Megan Jorgensen.
L’affectivité a déjà accompli son œuvre quand se lève le monde. (L’Essence de la manifestation, par Michel Henry, écrivain et philosophe français). Image : © Megan Jorgensen.

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