Femmes du Quebec

Le Centre des Femmes de l’Outaouais

Le Centre des Femmes de l’Outaouais

L’histoire du Centre des Femmes dans Outaouais

Le projet du Centre des femmes naît du besoin qu’éprouvent celles-ci de se rencontrer pour discuter de problèmes à partir de leur propre point de vue. Leur permettre de s’exprimer devient une étape essentielle pour favoriser le changement social. Les femmes qui s’occupent activement de la création du Centre sont déjà engagées dans d’autres organisations communautaires.
« Alors, on était quelques militantes déjà impliquées dans les groupes populaires. Nous autres, on voulait travailler plus sur des dossiers. Parce qu’à ce moment-là, c’était toutes les grandes questions : c’était la question de l’avortement libre et gratuit, la question des garderies (qu’on trouvait importante), la question de la contraception en général. Il n’y avait personne qui travaillait là-dessus à Hull »

Les enjeux du Centre des femmes sont ceux qui demeurent au cœurs des préoccupations des mouvements de femmes : les questions d’avortement et de l’information sur les problèmes de santé reliés à la reproduction sont toujours à la base des activités de mobilisation et d’organisation. Le Centre des femmes est aussi engagé dans des activités culturelles, qui demeurent un thème important du mouvement féministe.

« On a développé la question de formation sur le travail ménager à partir de ça. Ça avait débloqué avec une pièce de théâtre qui s’appelait « Maman, a travaille pas, a trop d’ouvrage,» du Théâtre des cuisines, qu’on avait faite le 7 mars 1975 au sous-sol de l’église Sacré-Cœur. Il y avait eu 300 femmes ; c’était mixte. Je me souviens qu’on avait eu des ateliers après. Ça avait été vraiment le « fun », parce qu’on avait rejoint beaucoup de femmes qu’on ne rejoignait pas sur d’autres dossiers. »

Les activités culturelles font partie du mouvement des femmes, du fait de leur objectif qui est de s’intéresser à tous les aspects de la société et non seulement à des domaines étroitement définis. L’importance de la culture réside aussi dans le fait qu’elle est vue comme un moyen de rejoindre et de sensibiliser un large auditoire populaire. Enfin, l’accent mis sur la culture permet d’affirmer que le plaisir et le divertissement doivent faire partie des activités collectives et la musique, le théâtre et le cinéma auront été des éléments importants des mouvements de femmes en Outaouais.

La vie culturelle

En 1975 est fondé le Théâtre des Filles du Roy et vers le milieu des années 1980 est lancée la Semaine de la culture des femmes. Une autre importante activité reliée au domaine de la culture est la publication, pendant quatre ans, du journal féministe Entrelles. Dans son premier numéro, en janvier 1979, Entrelles affirme que son principal objectif est « la création d’un lien entre les femmes de notre région et entre les groupes de femmes œuvrant dans l’Outaouais ». Ce journal s’intéresse surtout aux activités des groupes de femmes de la région, mais il contient aussi des textes d’information plus générale, des commentaires, de la poésie, etc.

La violence

L’un des principaux problèmes auxquels s’attaque le mouvement en Amérique du Nord, c’est celui de la violence faite aux femmes. Il n’en va pas autrement en Outaouais. L’année 1978 voit le début des activités du Centre d’aide et de luttes contre les agressions sexuelles de l’Outaouais ou CALACS – le groupe connaît plusieurs appellations différentes, dont Centre d’aide aux victimes de viol, mais sa motivation première, elle, ne change pas. Le Centre offre aide et soutien aux femmes victimes d’agressions sexuelles. Il joue de plus un rôle actif dans la sensibilisation du public, afin de rendre la population en général plus consciente de l’importance du problème. Très peu de temps après la création du CALACS, la première maison d’hébergement pour femmes est fondée. Le Centre Mechtilde voir le jour en 1979, grâce au travail de l’avocate rattachée à la Clinique juridique populaire. Au départ, une bonne partie du financement vient de communautés religieuses de la région, puis le ministère québécois des Affaires sociales fournit à son tour des fonds. D’autres maisons de dépannage ouvriront aussi leurs portes : les maisons Clair-de-l’une à Buckingham, Unies-Vers-Femmes à Gatineau et Vallée-de-la-Gatineau à Wakefield. En 1987, un programme appelé Espace est mis sur pied pour aider à prévenir les agressions sexuelles sur les enfants. Espace offre des programmes et des activités destinés à faire connaître aux enfants leurs droits.

Autre objet de mobilisation : la pornographie. Tant dans les milieux ruraux qu’en ville, les femmes s’engagent activement sur cette question, créant des liens de solidarité à travers toute la région. De fait, la mobilisation autour du problème de la pornographie à Chénéville constitue un exemple qui incitera à des activités semblables d’autres municipalités du Québec. L’Association féminine d’éducation et d’action sociale (AFÉAS) de Chénéville prend les devants dans ce domaine et organise, en 1982, une rencontre avec le conseil municipal, afin de protester contre le genre de spectacles qu’on présente dans les bars de l’endroit. Après de nombreuses protestations et une campagne où s’exprime l’appui officiel de 70 groupes à l’égard de l’AFÉAS, un accord intervient entre les propriétaires de bar et l’Association.

Le problème de la violence amène aussi les femmes de Hull à se regrouper pour protester. Leur slogan : « La rue, la nuit, les femmes sans peur. » Au début des années 1980, ces protestations deviennent annuelles et permettent ainsi aux femmes de descendre dans la rue et de rendre public le problème de la violence.

De nombreuses questions reliées à ce problème de violence mènent à la mobilisation. Leur variété témoigne de l’importance capitale qu’attachent à cette question les groupes de femmes et la société en général. En 1990, faisant le bilan de dix années d’activités autour de cette question dans la région, Josée Belleau voit des éléments à la fois positifs et négatifs :

« Nous avons mis sur pied un centre d’aide contre le viol, des maisons d’hébergement pour femmes battues, des appartements de dépannage pour femmes victimes de violence, des groupes de prévention, des groupes de soutien pour femmes et enfants. Ce sont des espaces gérés par des femmes, des lieux sécuritaires pour des femmes… Nous avons donc toute une récolte entre les mains après dix ans. En 1979, nos stratégies étaient la confrontation et le conflit qui ont servi de révélateur de la problématique. En 1984, la lutte s’est démocratisée, d’un cercle restreint et plutôt intellectuel, elle est passée à un niveau pratique dans plusieurs secteurs de la société. Ça me semblait si simple il y a dix ans et ça semble tellement compliqué maintenant. Mais en fait cela a toujours été compliqué. Ce qui simplifie l’état des choses, ce sont nos sentiments de révolte et de solidarité. »

Notons également que les questions reliées à la santé constituent aussi un centre d’intérêt majeur pour les groupes de femmes et le Centre des femmes est impliqué dans les domaines de la contraception et de l’avortement. Puisque l’Hôpital du Sacré-Cœur s’objecte à pratiquer des avortements, la Clinique des femmes le fait.

(Histoire de l’Outaouais. Sous la direction de Chad Gaffield. André Cellard, Gérald Pelletier, Odette Vincent-Domey, Caroline Andrew, André Beaucage, Normand Fortier, Jean Hawrvey, Jean-Marc Soucy. Centre de la recherche de l’institut nation de la recherche scientifique, 1994).

Entrelles. Revue féministe de l'Outaouais. Dossier : Passez futur à mon goût... ?... Page couverture d'un numéro de la revue. Volume 4, numéro 2, juin 82.
Entrelles. Revue féministe de l’Outaouais. Dossier : Passez futur à mon goût… ?… Page couverture d’un numéro de la revue. Volume 4, numéro 2, juin 82. Source de l’image : « Histoire de l’Outaouais ».

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