Le rhumatisme qui sort par les orteils après des passes…
Édouard Paquette, un charlatan qui abusait de la confiance des gens en la prière, paie une amende de $200
Une histoire qui nous vient du 26 décembre 1942
Édouard Paquette, 57 ans, 6784 Casgrain, charlatan. Il prétend faire sortir les rhumatismes par les extrémités du corps humain (les doigts et les orteils), au moyen de passes magnétiques et de prières. Le juge Édouard Archambault l’a trouvé coupable de pratique illégale de la médecine, jeudi, et l’a condamné à payer une amende de $200 et les frais ou, à dféaut, à accomplir une peine de prison de 60 jours. Son procès a été tout aussi savoureux que la dinde de Noël. Un témoin du Collège des Médecins, interrogé par Maître Ariste Brossard, c.r., déclara au tribunal :
– C’était en avril 1942. J’arrive chez Paquette et je me plains de douleurs dans le dos. Il me dit aussitôt que je souffre de rhumatisme, et il se vante d’être un spécialiste de cette maladie. Il commence à me faire des passes magnétiques avec ses mains, en marmottant. Il dit que la douleur “baisse, baisse”, et, enfin, qu’elle me sort par les orteils. Moi, je dis comme lui. Au départ, il me demande un dollar que j’emprunte à ma compagne rendue dans la cuisine. Puis Paquette me conseille de faire des “neuvaines” de Pater et d’Ave, trois fois par jour, pour empêcher le mal de revenir.”
Après ce témoignage peu banal, Paquette jure ne jamais avoir vu le témoin, mais le juge Archambault je déclare coupable en soulignant :
Il n’y a rien de mieux que la prière mais je n’ai pas confiance aux Pater et aux Ave avec une piastre au bout.
L’enquête avait été préparée par M. Léon Davignon, enquêteur du Collège des Médecins.
Accusation, Auto-accusation
I. Accusation. – Certains menteurs, certains déséquilibrés ou pervers, certains délirants peuvent porter contre des tiers des accusations mensongères ou injustifiées, susceptibles d’entraîner de graves conséquences sur le plan civil comme sur le plan pénal.
a) Le type des accusations mensongères d£ pure invention est fourni par les mythomanes, enfants ou adultes, capables d’imaginer de1 toutes pièces une histoire de vol, d’agression, d’attentat à la pudeur ou de viol, parfois avec mise en scène correspondante; l’agresseur n’est pas toujours désigné et la note de mystère que le sujet laisse planer n’est pas pour déplaire à sa vanité morbide. Mais souvent aussi le nom de l’auteur est précisé. De regrettables erreurs judiciaires ont pu être communes ainsi. Il faut, à cet égard, beaucoup se méfier des accusations portées par les enfants et la valeur de leur témoignage en justice impose les plus grandes réserves. Ils sont très suggestibles, se prennent à leur propre jeu ; une affirmation répétée plusieurs fois devient pour eux une certitude ; de simples interrogations maladroites créent de toutes pièces dans leur esprit le thème accusateur.
A côté du mythomane simple, il y a le menteur pervers qui obéit à une malignité essentielle et accuse par dépit, jalousie, par haine ou simplement par jeu, pour le plaisir de faire du mal. Des lettres ou des campagnes anonymes sont souvent leur fait, créant des drames de famille ou semant dans certains pays une terreur dont ils se délectent.
b) La malignité, jointe à une fausseté d’esprit naturelle, commande l’acharnement du paranoïa qui tire parti des moindres faits pour en faire un chef d’accusation qui va être développé, enrichi et porté devant l’opinion publique ou les tribunaux.
On se sent plus libre en fuyant que si l’on n’a rien à fuir. Image : © Megan Jorgensen.
c) Plus faciles à juger et à rectifier sont les accusations portées par de vrais délirants chroniques dont les thèmes morbides se reconnaissent assez vite (hallucinés, persécutés obéissant à la suggestion de leurs « voix », jaloux, érotomanes, idéalistes et mystiques en état d’exaltation passionnelle). La phase d’accusation fait malheureusement vite place à celle de l’action directe.
a) Le thème délirant peut reposer sur un fond démentiel, d’affaiblissement du jugement et du sens critique. Les accusations sont alors stigmatisées par une absurdité ou une incohérence qui leur enlève toute valeur.
Mentionnons toutefois le cas particulier des vieillards affaiblis atteints de délire de préjudice qui accusent leur entourage ou leur famille de vol, de spoliation, de détournement.
Des mesures d’internement sont parfois indispensables devant l’acharnement de certains paranoïaques accusateurs ou devant les désordres manifestes qui accompagnent les accusations de certains délirants.
II. Auto-accusation. – L’idée de culpabilité, de faute commise, a pris dans ces derniers temps, aux yeux des psychanalystes, une place importante en psychopathologie, puisque l’on a même pu décrire « l’univers morbide de la faute » (Hesnard). Aussi ne doit-on pas s’étonner de voir ce sentiment profond de culpabilité s’extérioriser souvent sous forme d’auto-accusation. Il y a toute une gamme d’états psychologiques allant du sentiment normal de culpabilité au scrupule et à l’auto-accusation délirante.
Toutefois, toutes les auto-accusations ne sont pas franchement morbides. On a vu certains sujets prendre à leur compte des délits ou des crimes pour sauver un être cher et, pour égarer la justice. Encore faudrait-il mesurer, en pareil cas, la valeur intellectuelle et morale de certains débiles ou de certains grands émotifs.
On a pu signaler encore quelques cas d’auto-accusation purement Imaginative, de la part d’hystériques ou de mythomanes avides de retenir l’attention sur eux et de forger une histoire dans laquelle ils jouent un rôle spectaculaire. Parfois un certain goût du morbide, du sadisme, ou même de la simple mystification y contribue.
Chez certains névrosés, un complexe d’auto-punition intervient dans le mécanisme de l’auto-accusation.
L’onirisme, qui accompagne les confusions mentales toxiques ou infectieuses est souvent à l’origine de l’auto-accusation. Le plus bel exemple nous en est fourni par le délire subaigu des alcooliques. Quand un sujet, disait Lasegue, vient s’accuser spontanément d’avoir commis un attentat monstrueux, il y a 90 chances sur 100 pour que ce soit un alcoolique.
Mais c’est dans la mélancolie que ce thème de l’auto-accusation prend sa plus grande fréquence. Le mélancolique peuple sa douleur morale de remords, de fautes anciennes et oubliées, réelles ou imaginaires, et s’accuse aussi de son impuissance présente, du malheur des siens ; il est indigne de vivre et c’est une des grandes raisons qui le poussent si souvent au suicide.
L’auto-accusation, même si elle porte sur des faits réels et si elle est charpentée par une logique très cohérente en apparence, doit, toujours faire suspecter la mélancolie, -quelquefois aussi l’alcoolisme chronique.