Des nouvelles pas fraîches

Trudeau démissionne

Trudeau démissionne

Trudeau démissionne du poste de premier ministre

« Il est temps que quelqu’un d’autre relève ce défi »

Ottawa — Le premier ministre du Canada, M. Pierre Trudeau, a annoncé hier, le 29 février, sa démission comme chef du Parti libéral du Canada, et il a demandé à la présidente du parti, Mme Iona Campagnolo, de prendre les mesures nécessaires pour la convocation d’un congrès au leadership.

M. Trudeau continuera de diriger son parti et le gouvernement, tant que son successeur n’aura pas été choisi.

«Avoir dirigé notre grand parti fut Tune des joies de ma vie, mais je pense qu’il est maintenant temps que quelqu’un d’autre relève ce défi», a-t-il déclaré dans une lettre expédiée en matinée à Mme Campagnolo.

Celle-ci a immédiatement annoncé que l’exécutif national du Parti libéral »e réunira en fin de semaine pour décider de la date du congrès qui aurait lieu, selon elle, vers la fin du mois de juin.

La nouvelle de la démission de M. Trudeau a eu l’effet d’une bombe dans la capitale fédérale, où personne ne s’attendait à une telle annonce en cette semaine de vacances parlementaires déjà troublée par la pire tempête de neige de l’année. La quasi-totalité des députés et ministres étaient absents d’Ottawa, et les mêmes journalistes qui avaient assiégé M. Trudeau mercredi dernier au caucus en prévision d’une hypothétique démission n’avaient rien prévu de tel hier.

«Vous ne trouvez pas que c’est un bon jour pour démissionner»? a lancé M. Trudeau à la meute de journalistes qui l’attendaient hier après-midi à son bureau du Parlement.

Il a déclaré avoir pris sa décision mardi soir, à l’occasion d’une longue promenade à l’extérieur, dans la tempête. «Sur le plan personnel, c’était facile», a-t-il déclaré à son arrivée à son bureau en début d’après-midi.

«J’ai pesé les pour et les contre, ayant des arguments pour rester et des arguments pour partir, et ayant pris ma décision en pleine nuit. J’ai dormi dessus et ce matin ça me paraissait avoir été la bonne décision».

M. Trudeau est demeuré discret sur ses projets d’avenir. «Je reste premier ministre, je pense qu’il y aura des candidats à la direction du parti, alors il faudra que je m’occupe du gouvernement de façon très intensive dans les mois à venir de façon à ce que nous soyons bien gouvernés pendant qu’un certain nombre de libéraux feront la campagne».

Que se passera-t-il par la suite? «Je resterai député probablement jusqu’aux élections, et ensuite on verra, je n’ai pas de plan».

Qu’arrivera-t-il de la mission de paix, de la controverse sur les droits des Franco-Manitobains?

«Et bien! Ça va continuer. Ce n’est pas un homme qui peut faire marcher le monde. Je vais continuer mes travaux, mais il y aura d’autres premiers ministres, à chacun sa chance».

À sa sortie de son bureau hier soir, il a élaboré sur les circonstances qui ont entouré sa prise de décision. «Je suis allé hier soir au judo avec mes fils, et c’était très bien, il n’y avait personne d’autre à cause de la tempête, ce qui fait que nous avions les instructeurs pour nous seuls.

Puis je suis revenu à la maison, j’ai parlé avec les enfants, je les ai mis au lit, puis j’ai marché jusqu’à minuit dans la tempête.

Je suis revenu à la maison et j’ai pris un sauna pendant une heure et demie. C’était bien clair que j’allais démissionner Mais je suis allé au lit, juste au cas où je changerais d’opinion pendant la nuit. Je n’ai fait qu’écouter mon cœurs, j’ai regardé s’il y avait des signes de ma destinée dans le ciel, mais il n’y en avait pas. il n’y avait que des flocons de neige».

Le départ de M. Trudeau ouvre la voie à la course au leadership à laquelle plusieurs de ses collègues du cabinet se préparaient depuis plusieurs mois. Le favori sur la ligne de départ, l’ancien ministre, M. John Turner, a fait savoir qu’il fera connaître ses intentions dès le 16 mars.

La présidente du parti, Mme Campagnolo, a dit qu’il appartiendra à l’exécutif national du parti de décider de la date et du lieu du congrès, mais elle a fait savoir que le choix de l’endroit dépendra surtout de facteurs économiques. On pense généralement que le congrès se tiendra à Ottawa.

Elle a dit espérer que le tout se déroule dans le bon ordre, mais sans trop se faire d’illusions sur les excès inévitables qui accompagnent souvent ce genre d’exercice.

Kile a avoué que les règlements du parti admettaient le vote des adolescents de 14 ans et plus pour la sélection des délégués. Faisant allusion aux difficultés des conservateurs à ce chapitre, elle a lancé: «On aura notre part de problèmes, mais les enfants de neuf ans ne voteront pas ».

Mme Campagnolo a déclaré quelle s’attendait à ce que la période de transition entre M. Trudeau et son successeur ne dépasse guère les dix jours, comme cela avait été le cas lors du départ de M. Lester B. Pearson. Si le prochain chef n’a pas de siège aux Communes, il devra trouver un chef suppléant pour le remplacer lors des travaux de la Chambre. Hien ne l’empêche cependant d’exercer les autres fonctions de premier ministre avant d’être élu aux Communes.

Le problème ne se posera plus dès la fin de juin, puisque la Chambre ajourne en été et ne reprend ses travaux qu’après la rentrée des classes. Mme Campagnolo a fait l’éloge de M. Trudeau dans sa réponse à sa lettre de démission.

«Votre leadership a été un actif remarquable pour le Canada et le libéralisme La loi historique sur les langues officielles et le rapatriement de la Constitution avec l’enchâssement de la Charte des droits permettront à chacun des Canadiens de posséder un héritage de liberté pour les aider à orienter leur vie. Le Canada est une société plus juste et plus civilisée parce que vous avez été notre chef et avez su nous pousser vers l’excellence».

(Cette nouvelle date du 1er mars 1984.)

Trudeau et Lévesque
René Lévesque et Pierre-Eliott Trudeau. Photo de GrandQuebec.com (Musée Grévin).

1 commentaire

  1. Nicole dit :

    Sans doute, le plus célèbre des premiers ministres du Canada, devenu « société plus juste et plus socialisée ». Au niveau international il a démontré son indépendance de jugement en visitant l’URSS (1971) et Cuba (1976).

    Merci de nous avoir rappelé ces événements 37 ans plus tard, jour pour jour.

Laissez un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *