
Revenu minimum garanti : on aborde le sujet avec prudence
L’idée de préconiser l’instauration d’un revenu minimum garanti pour tous les Québécois fait son chemin chez les militants du Parti québécois, même si une majorité aborde encore ce projet avec prudence.
Les délégués péquistes de la commission sur la solidarité sociale ont ainsi refusé, hier, de se pencher sur une résolution prônant l’instauration du revenu minimum garanti, mais ils ont choisi d’examiner, et d’accepter, une proposition selon laquelle Québec devra réaliser une étude d’impact sur le sujet. Cette proposition doit être soumise aujourd’hui à l’ensemble des délégués.
Un revenu minimum garanti assurerait « à chaque individu, de façon universelle et inconditionnelle, un revenu minimum décent, qui s’ajoute à ses revenus d’emplois, mais qui remplace toute autre forme d’assistance gouvernementale telles l’aide sociale, l’assurance-emploi, la pension de vieillesse, l’aide financière aux familles, etc. », ont expliqué les péquistes de la région de Lanaudière, qui militaient pour une telle initiative.
Ces délégués avaient soumis une résolution, aux participants à la commission sur la solidarité sociale, visant à exhorter le gouvernement du Parti québécois à mettre en marche l’instauration d’un revenu minimum garanti « dès qu’il aura mené à bien la réforme de la fiscalité des particuliers et des entreprises». La proposition a toutefois été mise côté par les militants, qui ont préféré donner leur aval à la nomination d’un groupe d’étude sur la question.
« Je pense que les délégués, dans la commission, ont fait preuve d’une certaine sagesse avant d’appuyer une disposition qui a des conséquences importantes sur l’administration du filet de protection sociale. On veut en savoir davantage.
Ce n’est pas le genre de question dont on peut disposer en quelques instants », a confié à La Presse le ministre de la Solidarité sociale, André Boisclair, qui a assisté aux débats de la commission toute la journée.
« Les militants du Parti québécois, comme bien des gens dans notre société, se sont penchés sur la question de la pertinence du revenu minimum garanti.
On y voit, dans certains cas, un avantage pour simplifier un appui gouvernemental. On sait aussi que ça soulève de nombreuses interrogations, même des progressistes, dans notre société. Les syndicats, la CSN entre autres, ont fait des études, et s’interrogent sur l’utilité d’un revenu minimum », a expliqué M. Boisclair.
« De nombreuses questions sont soulevées, et le message des militants est semblable, je pense, à celui de bien des gens qui se posent des questions sur le revenu minimum, a-t-il ajouté.
(Ils veulent) avoir un portrait plus clair de la situation, quelques repères, et demandent au gouvernement de faire des études sur cette question pour enrichir le débat public. Je pense que cela va de soi. C’est dans l’ordre des choses. »
Le ministre a toutefois insinué que la question du revenu minimum garanti n’était pas, pour l’instant, en tête de liste de ses préoccupations. « Si vous demandez qu’elle est ma priorité à ce moment-ci, c’est certainement le rétablissement des niveaux des transferts du gouvernement fédéral vers, entre autres, le régime de sécurité du revenu », a-t-il dit.
« Le problème québécois de l’administration du filet de protection sociale est bien là, et il est clair qu’avant de s’engager dans des batailles comme celle-là (sur le revenu minimum), dans le cadre du régime de partage de compétences qu’on connaît, le gouvernement du Québec continuera à plaider pour un rétablissement des paiements de transfert et pour des ajustements à la loi sur l’assurance-chômage », a précisé M. Boisclair.
Par ailleurs, les délégués présents à la commission sur la solidarité sociale ont entériné l’idée de tenir un sommet sur la pauvreté et l’exclusion, tout en réclamant un livre blanc du gouvernement du Québec, dans lequel il énoncerait ses stratégies et priorités. «J’ai annoncé que c’était l’intention du gouvernement d’agir de cette façon », a soutenu M. Boisclair.
(Par Alexandre Sirois. Texte publié dans le journal La Presse, le 7 mai 2000).

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