Hispano-Suiza et son succès

Un moteur fameux dans le monde de l’aviation comme dans celui de l’automobile

C’est l’Hispano-Suiza qui, dans le monde de l’aviation comme dans celui de l’automobile, détient l’une des premières places.

Il est depuis longtemps admis, une fois pour toutes, que le nom d’Hispano-Suiza est synonyme de perfection. Réputation qui, d’ailleurs, ne date point d’aujourd’hui, puisque, déjà fort avant la guerre, le modèle Alphonse XIII faisait l’admiration de tous les amateurs épris de belle mécanique.

Plus près de nous, c’est la 32 CV, vieille déjà de dix ans, qui s’affirme encore comme une des meilleures selon la meilleure voiture du monde; et, tout récemment, une sœur cadette, mais plus puissante, la 46 CV, a été créée pour donner à tous les sportsmen les plus magnifiques joies de la route.

Cette 46 CV possède, poussées à un plus haut degré encore si cela est possible, toutes les qualités qui ont donné à la 32 CV sa réputation unique.

Et, par ailleurs, le moteur de la 45 CV comporte des cylindres en acier nitruré; d’ailleurs, le nom de « cylindres’ est impropre quand on parle d’un moteur Hispano, car tous nos lecteurs savent bien que tous les blocs qui sortent des ateliers de Bois-Colombes sont chemisés, ce qui assure à l’ensemble une légèrement remarquable.

Donc, le moteur de la 46 CV est équipé de chemises en acier nitruré : c’est là, d’ailleurs, un progrès qui a magnifiquement fait ses preuves, puisque la voiture de Weymann, victorieuse au match fameux d’Indianapolis, l’année derrière, était munie d’un moteur nitruré.

Les avantages en sont séduisants : usure quasi nulle, consommation d’huile insignifiante, puisqu’elle peut descendre à moins de 5 grammes par cheval-heure.

Ainsi, là encore, la célèbre firme nous donne la mesure de sa progression mécanique chaque jour plus grande.
**

Mais revenons à la 32 CV.

N’est-il pas prodigieux, ce fait, unique dans les annales de la construction automobile, d’une voiture qui, dix ans après sa création, reste encore l’étalon, la référence qui sert à classer les châssis concurrents? Et la génie mécanique de Marc Birkigt s’affirme là d’une manière splendide.

Que de fois déjà on a cité l’exemple suivant, qu’on va encore une fois rappeler aujourd’hui : prenez un châssis Hispano-Suiza et un autre châssis d’une puissance comparable : prenez dans chacune des voitures; les pièces qui « travaillent » et qui, de ce chef, doivent avoir une section importante : barre de commande de direction, axes de ressorts, etc.; dans l’Hispano, la pièce est toujours plus lourde, donc plus résistante. Maintenant, pesez les deux voitures : la différence de poids se chiffre toujours par 600 à 800 kilogrammes de moins en faveur de 1’Hispano. Voilà, n’est-il pas vrai, qui démontre d’une manière claire et évidente à quel point chaque pièce du châssis dessiné par Birkigt a été travaillée: partout où on pouvait gagner un gramme, on 1’a fait, et le résultat, disons-le, est splendide.

Ainsi, cette année encore, les usines de la rue Guynemer, à Bois-Colombes, exposent leur fameuse 32 CV : cette voiture possède toutes les qualités que l’on exige d’un châssis moderne, et en particulier
l’accélération et le freinage, qui, à l’heure présente, servent à classer une voiture, sont ici de tout premier ordre.

L’accélération? Cela tient à la réduction du poids mort, réduction qui a été porter au maximum, comme nous l’avons montré plus haut.

Le freinage? Le servo-frein mécanique d’Hispano-Suiza est un modèle.

Remarquons, en passant, qui Birkigt s’est ici, une fois de plus, révélé comme un précurseur remarquable, en donnant à son châssis des qualités dont on ne soupçonnait pas encore toute l’importance il y a dix ans; et, à l’heure présente, alors que chacun cherche à gagner quelques kilogrammes sur le poids de sa voiture, songeons à Marc Birkigt qui, dix ans plus tôt, a lumineusement ouvert cette voie.

**

La construction des moteurs d’aviation absorbe toujours une grosse partie de l’activité des ateliers.

Ces moteurs découlent d’ailleurs tous du type initial de 150 CV huit cylindres en V. Les lignes d’ensemble restent d’ailleurs identiques, mais, ici encore, Birkigt, par un travail incessant des détails, perfectionne sans cesse son œuvre et s’attache à obtenir, des rendements de plus en plus élevés, une consommation qui va toujours en diminuant, sans rien sacrifier pour cela des qualités essentielles d’endurance et de sécurité. Et, là encore, on a obtenu un résultat merveilleux, puisque Hispano avait préparé pour la coupe Schneider un moteur de 1,500 CV qui, tout équipé, se pesait que 500 grammes par cheval.

Qu’en dites-vous?

D’ailleurs, l’année qui finit est belle pour Hispano. Qu’on en juge plutôt, la traversée de l’Atlantique Nord par Assolant, Lefèvre et Lotti, accomplie avec un 600 CV, du type déjà classique.

D’ailleurs, c’est également un 600 CV qui équipait l’avion de Costes et Bellonte, qu’un mauvais temps continuel força à revenir sur leurs pas, alors qu’ils avaient déjà accompli le tiers environ de la traversée de France en Amérique. Il falait que les deux aviateurs aient en leur moteur une entière confiance pour ne pas avoir hésité à rebrousser chemin; la brillante tenue de leur 600 CV a pleinement démontré que cette confiance était entièrement justifiée.

Enfin, rappelons le beau raid de Wisse et Girier, qui est venu, une fois encore, nous prouver que le moteur Hispano est vraiment celui sur lequel on peut compter.

Par ailleurs, notons que nous verrons cette année, au Grand Palais, la nouvelle 46 CV, voiture semblable à celle déjà existante quant aux ligne générales de la construction.

Mais on a perfectionné davantage encore les détails, à un tel point que le rendement du moteur a été sensiblement accru, en même temps qu’on s’est appliqué à le rendre particulièrement silencieux. On se trouve ici en présence d’un châssis de grand luxe, qui ne craint pas de rival au monde pour la perfection de sa fabrication.

Perfection qui, d’ailleurs, découle de la simplicité. En particulier, peut-on imaginer une commande de soupapes plus simples que celle d’Hispano? Beaucoup ont essayé de l’imiter, mais aucun n’a su obtenir des résultats équivalents.

Voilà qui, sans plus, en dit long sur les méthodes de travail de l’usine de Bois-Colombes.

(Texte paru dans le quotidien Le Devoir, samedi, le 30 novembre 1929).

À lire :

Hispano-Suiza H6B Coupe Chauffeur by Binder 1930. Photo libre des droits.

Laisser un commentaire