Une guerre entre le Canada et la Chine?

Une guerre entre le Canada et la Chine? – La capitale de l’empire en effervescence. – Départ des troupes à Ottawa, au conseil des ministres. – Volontaires qui s’offrent au département de la milice

Religieuses et missionnaires canadiens en Orient

Ottawa, 29 janvier 1927 – La capitale de l’Empire a de nouveau pris son aspect de guerre d’après les dernières dépêches reçues à Ottawa samedi soir.

Des contingents britanniques, vêtus de kaki et coiffés du casque d’acier ont défilé dans les rues de Londres en chantant aux accords de « It’s a long, log way to Tipperary », jusqu’à la gare de Waterloo où elles ont pris le train qui les mener aux transports anglais en partance pour la Chine.

Les sœurs d’Outremont, de Montréal, possèdent des biens dans la royaume des Célestes et plusieurs de nos compatriotes prêchent l’Évangile dans ce lointain pays. Si l’Angleterre intervient pour défendre ses sujets, le Canada devra-t-il faire de même en tant que nation?

Des puissances de second ordre comme l’Espagne ont déjà fait une démonstration navale dans la mer de Chine pour sauvegarder les intérêts de leurs nationaux.

Que fera le Canada pour protéger les Canadiens qui vivent en Chine, voilà ce que nous saurons sûrement dans le cours de la semaine prochaine si l’hostilité des troupes chinoises dirigées par des officiers bolchevistes continuent à croître d’une façon encore plus alarmante.

Plusieurs régiments de la milice canadienne ont offert leurs services au département de la milice à Ottawa. D’autre part, on croit dans les milieux officiels qu’un simple appel aux volontaires suffirait au besoin à lever un contingent de 2 à 5 mille hommes.

Au même temps l’ancien premier ministre du Royaume-Uni déclare aujourd’hui, au cours d’un discours aux délégués ouvriers, que l’Angleterre doit accéder à toute demande légitime qui lui feront les Chinois.

À Hong-Kong, le docteur J.W. Stephenson, médecin britannique qui fut pendant quelques heures le prisonnier des Chinois, a vu de près les ravages exercés par l’artillerie moderne dans les positions occupées par les troupes jaunes. Un obus tomba dans la maison qu’il occupait et un éclat vint trancher la tête d’une jeune femme allaitant son bébé. Ce fut, dit-il, un spectacle d’une cruauté inouïe de voir le bébé continuer à boire le lait d’une mère dont la tête venait de rouler par terre.

Pour voir clair dans les affaires de la Chine

Dans ce vaste et mystérieux pays divisé par d’innombrables factions, une idée seule domine cependant: le nationalisme

Sir Robert Hart, qui fut pendant trente ans directeur des douanes chinoises, disait à la fin de sa carrière: “Quand je suis arrivé ici, je me proposais d’écrire un livre sur la Chine. Maintenant je sais qu’on n’écrit pas de livre sur la Chine.” On ne doit peut-être pas écrire non plus d’articles! sur les affaires des Chinois qui semblent se plaire à démentir les pronostics des Européens. N’annonçait-on pas déjà “la Chine qui s’ouvre” un peu avant la grande crise de xénophobie qui fut marquée par la révolte des Boxers?

La difficulté de se renseigner sur ce Vaste pays est très grande. On en est réduit à des hypothèses sur les dispositions des masses et sur les forces en présence. On semble connaître très mal, en particulier, la part que les Russes ont prise à l’organisation de l’armée cantonaise et la valeur militaire qu’ils ont au leur donner, car, tout récemment encore, elle passait pour n’en avoir aucune.

On s’est reposé aussi avec quelque complaisance sur: l’idée que le nationalisme chinois, hostile à tous les étrangers, ne serait pas plus favorable aux Russes qu’aux autres blancs et qu’en outre, par ses mœurs et ses traditions, le monde chinois serait réfractaire au bolchévisme. Telle est bien l’attitude que Tchang-Tso-Lin, au Nord, semble prendre. Les éléments d’appréciation manquent pour savoir si, au Sud, son antibolchevisme trouvera des sympathies.

Il y a du moins un fait sur lequel les spécialistes des choses chinoises sont d’accord: c’est le nationalisme de tous les partis, chefs et clans qui sont en guerre les uns contre les autres. Si, par hasard, Tchang-Tso-Lin triomphait et si, à la dernière heure, il écartait l’armée cantonaise de Shanghai, il réclamerait l’abolition des « traités inégaux » avec autant d’énergie que Mé Eugène Chen, Car comment s’appellerait-on par un Monsieur un Chinois qui porte le prénom d’Eugène? Et comment maintenir les privilèges des Européens dans une Chine qui se réclame des Droits de l’Homme, où l’on porte des vestons et des chapeau mous?

Il n’y a plus qu’à protéger contre le massacre, le viol et le pillage l’opulent cité de Shanghai où les blancs en général et les Anglais en particulier ont de si vastes intérêts. Si l’on y réussit, on verra ensuite. L’œuvre de près d’un siècle est en jeu. En, sans doute, l’Angleterre, lorsqu’elle a reconnu les Soviets ne s’attendait-elle pas à se trouver face à face avec la Russie sur les bords du Fleuve Bleu. Dans quelle région rencontrera-t-elle un jour l’Allemagne, pareillement ménagée et relevée?

Avance rapide et imprévue contre Shanghai. Le 5 mars 1927. Les troupes de Canton se portent rapidement sur Shanghai. Les troupes européennes se tiennent prêtes à défendre les propriétés des blancs. Pour peu que l’avance continue du train qu’elle a commencé, Shanghai sera assiégé d’ici lundi. Une autre rumeur veut que le gouvernement d’Anhwei se soit séparé de l’alliance des provinces du nord pour se ranger avec les nationalistes. Si cela est fait, la situation serait d’autant plus grave pour l’armée de Shanghai que ne pourrait plus recevoir de renforts et serait ainsi menacée de tous côtés par des troupes ennemies. Toutefois, rien n’est venu confirmer cette dernière nouvelle.

Les Allemands s’en mêlent

On vient d’apprendre que les autorités anglaises viennent de faire main basse sur un navire chinois chargé d’armes de fabrication allemande.

L’Allemagne pourvoit la Chine d’armes et de munitions

Varsovie, 14 mars 1926. Le «Kurjer», journal de Varsovie, poursuivant ses révélations sur les armements allemands, cite des chiffres au sujet des transports d’armes d’Allemagne en Russie.

Dans le courant des mois de novembre et décembre 1926, ont été exportées : 1,850 tonnes d’acide sulfurique, 2,690 tonnes de dynamite, 620 tonnes de grenades à main, 1,774 tonnes de pyroxyline, 1,520 tonnes d’explosifs divers, 320 tonnes de matériel sanitaire pour les hôpitaux et les camps, 725 tonnes de produits pour la fabrication des gaz asphyxiants, et 100 canons du nouveau type 77 dont nous montrons ici un échantillon. Un envoi de 1,000 tonnes de carabines Mauser, type 98, avec des munitions, a été fait avec des précautions toutes spéciales. Toutes ces armes sont destinées à la Chine, dans la lutte contre l’Angleterre.

Parc des Rêves
Parc des Rêves (parc de la Chine) dans le Jardin botanique de Montréal. Photo de Megan Jorgensen.

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