Couvent en Flammes
UN AVION EN FEU S’ÉCRASE SUR UN COUVENT, PRÈS D’OTTAWA: 15 MORTS
Véritable scène de désolation et de mort. Voilà l’aspect lugubre que présentait la charpente entièrement détruite et calcinée de la villa St-Louis des Sœurs Grises de la Croix, à Orléans.
OTTAWA – L’un des coins les plus paisibles de la vallée de la rivière Outaouais, à une dizaine de milles à l’est d’Ottawa, est devenu, hier soir (15 mai 1956), le lieu d’une affreuse tragédie lorsqu’un chasseur à réaction s’est abattu sur un couvent, tuant 15 personnes, soit un prêtre, 11 religieuses, deux aviateurs et une aide-cuisinière.
Vingt-deux autres religieuses de la communauté des Sœurs Grises de la Croix, ont pu quitter l’immeuble, la villa St-Louis, une maison de repos et de convalescence de la communauté, construite il y a moins de deux ans. Deux d’entre elles ont toutefois dû être hospitalisées, souffrant de graves brûlures. Une troisième a subi une fracture à un pied.
Le CARC a immédiatement ouvert une enquête sur les circonstances de la tragédie, dont on ne connaît actuellement pas la cause.
Le chasseur, un «CF-100» de l’escadrille 445, s’est écrasé sur le couvent après que ses deux membres d’équipage eurent vérifié l’identité d’un autre appareil que le dispositif de dépistage aérien du CARC avec classé comme «inconnu». Les deux aviateurs tués avaient établi qu’il s’agissait d’un appareil de transport canadien et ils revenaient à leur base lorsque la tragédie s’est produite, peu après 10 h. hier soir.
En l’espace de quelques minutes, la villa St-Louis, vaste immeuble de trois étages, construit en briques et comprenant une chapelle et une centaine de chambres à coucher, a été transformé en un gigantesque brasier, dont la lugubre lueur était visible à des milles de distance.
Au moment de la tragédie, il se trouvait à peu près 35 personnes dans la maison de repos. Outre le prêtre, l’abbé Richard Ward, aumônier de la marine canadienne et de la communauté des Sœurs Grises de la Croix, de l’aide-cuisinière et de quelques religieuses formant le personnel régulier du couvent, les sœurs qui se trouvaient sur les lieux étaient toutes des religieuses âgées ou en convalescence; un certain nombre d’entre elles, a-t-il été dit, avaient subi des interventions chirurgicales récemment.
Les témoignages sur les circonstances de l’affreuse tragédie étaient divergents en de nombreux points. Il a notamment été affirmé par certaines personnes que l’appareil était en flammes lorsqu’il a heurté le couvent, tandis que d’autres soutenaient qu’on ne vit de flammes qu’à la suite de l’explosion de l’avion.
Le chasseur, une masse de plus de 30,000 livres arrivant sur le couvent à une vitesse vertigineuse, a heurté l’immeuble en plein centre, à l’arrière de la chapelle, au premier étage, aux dires des témoins. L’appareil portait une forte quantité d’essence et l’explosion a ouvert l’immeuble comme si on avait placé une bombe à l’intérieur. Des pièces de l’appareil ont été retrouvés dans le champ entourant le couvent, à quelque 500 pieds de la rivière Outaouais (…)
Texte publié dans La Presse le 16 mai 1956.
