L’aviatrice russe et française Lena Bernstein a tenu l’air pendant 35 heures 46 minutes et 55 secondes
Elle a battu aussi un autre record détenu par Charles Lindbergh
La persévérance est une qualité que possède au plus haut degré l’aviatrice Lena Bernstein, ayant échoué à plusieurs reprises, pour des raisons indépendantes de sa volonté, dans sa tentative contre le record du monde féminin de durée, que détenait Maryse Bastié avec 26 heures 41 minutes, elle a enfin réussi à s’approprier le record tant convoité, ces temps derniers. Elle porta le record à 35 heures 46 minutes et 55 secondes, à Paris, il y a exactement quinze fours, hier. Ce vol prolongé, sans là lumière de la lune pendant la nuit, a consacré les qualités de pilote de la jeune aviatrice russe de 20 ans, qui demeure à Paris depuis près de quatre ans.
Quelle maitrise il lui fallut pour résister à la fatigue et à l’ennui !
Les premières heures sont les plus déprimantes : le corps doit s’habituer à la position assise et l’organisme à une vie assez particulière. Elle mange peu : des tranches de pain et des biscuits secs, un aliment liquide et des bananes; par contre, elle boit de l’eau minérale, de la citronnade, du café et du champagne. Assise sur un siège, sorte le chaise percée, rendu confortable par des coussins amovibles, revêtue d’une pelisse, la tête serrée dans un bonnet de peau, le tympan protégé par des boules huileuses, rarement gantée, elle ne perd pas patience. Ses préoccupations sont nombreuses, ne serait-ce que celle de régler au mieux ls marche du moteur et économiser le plus possible d’essence. Quand Léna Bernstein atterrit vendredi soir, elle fait demi-tour pour se diriger vers le poste de contrôle. Son avion roule 10 verges et le moteur s’arrête, faute de carburant: elle était descendue à temps. À son atterrissage, elle reçut une magnifique gerbe de fleurs.
C’est une performance splendide, de première grandeur pour une aviatrice, que de voler tout près de trente-six heures, seule à bord. Officiellement, aucun aviateur n’a volé dans l’espace autant d’heures: il n’y a qu’un record de durée pour les hommes : 65 h.25, et il est la propriété des Allemands Ristiez et Zimmermann.
C’est un bel exploit à inscrire à l’actif de l’aviatrice franco-russe, déjà détentrice du record du monde féminin de distance en ligne droite avec le vol de Marseille à Sidi Baraims (Égypte), soit 1,512 milles.
Il dénote, chez celle qui l’a mené à bien, une résistance physique remarquable pour une femme et aussi une volonté à toute épreuve, tant il c’est avéré qu’un vol d’aussi longue durée seule à bord, est fastidieux. La remarquable aviatrice se rendit, en outre, détentrice de la plus grande durée pour aviateur seul à bord, record qui appartenait jusqu’alors à Lindbergh avec la traversée de l’Atlantique – New-York – Paris.
Placide, indolente, lointaine, contemplative comme beaucoup de Slaves, parlant peu bien que connaissant parfaitement la langue française, élancée, les attaches minces, les mains longues et fines, les ongles polis, et gênée par sa myopie, l’aviatrice de vingt sans Léna Bernstein, l’émigrée russe à 1a chevelure feu, ne tarait pas détenir une exceptionnelle énergie musculaire où nerveuse. Rien, dans ses conversations ni dans son existence ordinaire, ne décèle son esprit aventureux, sa passion sans bornes pour l’aviation, sa volonté de fer, son ambition impérieuse, sa ténacité d’homme et se résistance d’athlète. D’aspect seulement, Mile Léna Bernstein est femme. Calme, elle trouve en elle, à tout moment, les forces nécessaires pour soutenir un rude effort; indifférente au danger, elle s’élance avec audace dans les entreprises les plus étonnantes. Elle partira pour Tokyo, en septembre 1930.
