Montréal ne peut supprimer l’affichage érotique
L’administration du maire Doré a subi une amère défaite en Cour supérieure du Québec, le juge Ginette Piché considérant invalide et inconstitutionnel le règlement 8887 destiné à supprimer l’affichage érotique dans les rues de Montréal.
Selon le juge Piché, ni le gouvernement québécois, ni la Ville de Montréal, ne peuvent intervenir en cette matière qui, selon sa décision, est strictement de compétence fédérale.
« Il est certain que comme toute femme, madame le juge amenée à étudier la question des affiches dites érotiques ne peut être d’accord avec cet étalage grossier de seins et de fesses. Qui le serait? » peut-on lire dans son jugement.
« Ce n’est toutefois pas le rôle du juge, homme ou femme, de se substituer aux pouvoirs législatifs des élus ou des règlements invalides », ajoute-t-elle. « Le juge est là pour juger, non pour légiférer. Tout le monde est là pour la vertu, mais… », conclut le juge Piché après avoir invoqué certaines dispositions de la Charte des droits et libertés de la personne touchées par le règlement 8887 qui fut adopté le 13 août 1991 par l’équipe du maire Doré.
Cette décision, rendue sur la requête de 17 cabaretiers, de l’Association des cabarets de spectacles de Montréal et de la danseuse Linda Douchesne, on l’a accueillie avec beaucoup de satisfaction et de soulagement par l’ensemble des piliers de cette industrie.
Leur avocat, Me Julius Grey, a laissé tomber. « La liberté d’expression est constamment attaquée. Il faut alors toujours la défendre. Ce sera encore à recommencer».
Cependant, Mme Léa Cousineau, présidente du Comité exécutif de la Ville de Montréal, elle qui était partie en guerre, il y a quatre ans, contre l’affichage érotique, est profondément déçue du jugement Piché.
Cabaretiers en liesse
« La décision a été longue à venir. Mais elle conforme notre droit d’expression. Même si nos affiches sont érotiques, elles ne devraient offenser personne. Montrer un corps de femme n’est pas une honte ». Cela affirme Johny, propriétaire du Cléopatra Café. Sa la vitrine, rue Saint-Laurent, est loin de passer inaperçue.
Alfie, le patron de la boîte Chez Parée, est d’avis que cette décision « stimulera l’économie dans cette industrie particulière ». « Il faut que les gens sachent, à travers les affiches, quels sont les spectacles qui l’on leur offre à l’intérieur de nos établissements », dit-il.
Le propriétaire de l’Axe, Réal Dorais, installé depuis longtemps rue Saint-Denis, a d’abord statué que le règlement municipal était « stupide en partant ».
« La Ville aurait très bien pu s’entendre à l’amiable avec certains propriétaires. Dans le cas si les affiches sont plus expressives que d’autres », dit-il encore.
Le 20 décembre 1990, soit moins de deux mois après le scrutin, l’Assemblée nationale adoptait un projet de loi privé visant modifier la Charte de la Ville de Montréal. Ouvrant ainsit la voie au règlement 8887 portant sur les établissements exploitant l’érotisme.
(C’est arrivé le 2 septembre 1992).