Enrico Caruso au Québec
Le 19 mai 1908, le grand Enrico Caruso présenta un concert à l’Aréna de Montréal devant une salle comble de quatre milles personnes. Caruso fut acclamé avec frénésie, rappelé avec délire, et, en bon prince, il est revenu, mais pas aussi souvent qu’on l’eut voulu, donner l’éblouissement magique de sa voix.
C’est cette voix seule qu’on est allé entendre. La musique n’était plus que le véhicule par lequel cette voix pure et forte, souple et tragique, répandait dans l’immense hangar de fer de l’Aréna ses accents prestigieux. Qu’importait le lyrisme convenu de l’air d‘Aïda, la froideur aristocratique de la Cavatine de Faust, puisque ce n’était là ce qu’on venait entendre.
Et cependant il y aurait beaucoup à dire et à redire, à ce sujet. Le plus grand triomphe de la soirée fut pour l’Air de Paillasse (de Léon Cavallo), de la musique vraie, empoignante, intense, dramatique. Caruso ne l’a pas chantée, il l’a pleurée!
Le registre du chanteur est merveilleux. Il n’y a pas une paille dans son étendue. Le timbre est homogène, d’une qualité toujours constante. Sans que l’articulation soit jamais martelée, on saisit les moindres syllabes, que ce soit en français ou en italien. Jamais le chanteur n’a cédé à la trop facile tentation d’épater l’auditoire par des tenues artistiques de notes élevées et cela coule sans effort apparent, sans que la cage thoracique semble devenir un sujet de forge.
Assistaient au concert, Son Excellence le gouverneur – général, ses filles, lady Evelyn et Sybil Grey et sa maison militaire. L’Élite de la société française et anglaise occupait des baignoires et des fauteuils.
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