
Le Tour du Monde…. en une heure
Musée Commercial et Industriel de Montréal
Par Paul Riou, texte paru dans l’Action Universitaire, en 1935
Le plaisir de voyager est réservé à un petit nombre de privilégiés. Aussi est-il rare de rencontrer une personne qui a eu l’avantage d’admirer les paysages exotiques et les produits rares que nous offrent les tropiques.
Nous avons toujours été attirés par ces contrées lointaines, à la végétation luxuriante, à la vie facile et oisive.
On se rappelle l’émerveillement des touristes qui visitèrent l’Exposition Coloniale. En entrant dans le bois de Vincennes alors que le bruit des boulevards n’était pas encore éteint, nous perdions la notion d’espace et nous croyions avoir pénétré dans les vieilles civilisations de l’Indo Chine, les contrées sauvages de l’Afrique et les îles enivrantes des Caraïbes. L’enchantement se prolongeait à souhait et suffisamment pour justifier le panneau-réclame des organisateurs de l’Exposition : Le tour du monde en un jour.
On reçoit une impression un peu semblable quand on parcourt le Musée Commercial et Industriel de Montréal.
En effet, nous voyons là, exposés dans un édifice spacieux et bien éclairé, des produits du monde entier, des collections technologiques représentant l’industrie canadienne, des modèles d’usine et de machines qui fonctionnent sous l’œil du visiteur, des collections de photographies et de cartes représentant les principaux paysages du monde, et, à côté de cela, des dioramas montrant des villes, des ports ou des industries exotiques.
La fondation du Musée remonte à une quinzaine d’années. M. Henry Laureys, qui en est l’initiateur, en commença l’organisation en 1916, lors de sa nomination au poste de directeur de l’École des Hautes Études Commerciales.

1. Pâté de cellulose (procédé mécanique). 2. Verres et porcelaines. 3. Distillation du bois 4. Ensemble de surface de mine. 5 (illisible). Photo : L’Action Universitaire, 1935.
Le Musée fut établi à l’origine sur le modèle du Philadelphia Muséum. Le cadre en fut plus tard élargi par l’introduction de modèles et d’appareils qui complètent d’une façon très pratique les collections de technologie. C’est la seule institution du genre au Canada et elle a déjà largement prouvé son utilité.
Outre les nombreux visiteurs qui y passent (7000 en 1935), des groupes importants d’élèves des collèges et des écoles viennent y étudier les collections,
À plusieurs occasions, le Musée a prêté ses locaux à des expositions spéciales, qui ont attiré de nombreux visiteurs et ont rendu des services signalés à nos hommes d’affaires.
La première manifestation de ce genre fut l’instauration pendant plusieurs mois en 1921 – 1922, du train – exposition français la France au Canada. Cette exposition fut inaugurée par le Maréchal Foch.
En 1929, avait lieu une exposition de produits de l’industrie française, inaugurée par M. H, Knight, premier ministre de France au Canada, et par l’hon. A. David, secrétaire de la province de Québec.
Ces deux expositions remportèrent un grand succès et contribuèrent largement à l’expansion de nos relations commerciales avec la France.
Le rôle que le Musée Commercial et Industriel est appelé à jouer dans notre pays est de la plus haute importance. Il est destiné à documenter et à instruire.
Documenter. – Au point de vue commercial et industriel, le Musée, en tout premier lieu, cherche à faire connaître aux commerçants, aux industriels ainsi qu’aux consommateurs, les produits canadiens. Il donne une place également importante à nos matières premières et à nos produits ouvrés.
Les directeurs s’attachent à montrer ce que nous produisons et comment nous pourrions utiliser nos matières premières d’une façon plus rationnelle. Aussi le Musée possède-t-il des collections importantes de nos produits agricoles, minéraux et forestiers, ainsi que de nombreux graphiques montrant la répartition de notre commerce extérieur et le rang que nous occupons parmi les nations productrices.
Le Musée a aussi pour mission de faire connaître les produits des autres pays dont les matières premières et les produits ouvrés sont également représentés.
Outre les collections de produits fabriqués provenant des pays européens, le Musée possède de nombreuses collections de produits tropicaux. Les commerçants et les industriels peuvent ainsi se renseigner sur les sources d’approvisionnement de ces produits. Des photographies et des cartes montrant la répartition mondiale des principales matières premières complètent ces collections.
Les commerçants et les industriels puisent donc au Musée de nombreux renseignements qu’ils peuvent compléter à la bibliothèque économique et technologique à côté du Musée.
Instruire. – Le Musée est une aide précieuse pour l’enseignement, il est indispensable aux élèves qui poursuivent des études de technologie, car il met sous leurs yeux les matières premières, les procédés de fabrication et les machines utilisées dans l’industrie.
Le professeur peut ainsi rendre son enseignement plus vivant et plus concret. Il offre un intérêt particulier aux élèves des collèges et des écoles primaires qui y trouvent un complément important à leurs leçons de choses et de géographie. L’étude des collections leur ouvre des horizons nouveaux et étend considérablement le champ de leurs connaissances.
Au public en général, le Musée donne des renseignements intéressants sur nos ressources naturelles, les procédés de fabrication, les machines employées dans l’industrie, et la répartition géographique des produits. Les collections étant accompagnées de notices explicatives simples et d’étiquettes bilingues, les visiteurs recueillent rapidement et sans efforts un bagage de connaissances très utiles.
Moyens d’action. – Le Musée Commercial et Industriel de Montréal possède actuellement plus de 23,000 échantillons, étiquetés en français et en anglais. À cela, s’ajoute plus d’un millier de photographies, de cartes, de graphiques et de notices explicatives. Il possède en outre un grand nombre de modèles réduits d’installations industrielles complètes et de machines employées dans l’industrie. Ces dernières sont actionnées par un mécanisme électrique à arrêt automatique. L’observateur peut ainsi suivre parfaitement la marche de l’appareil et étudier son fonctionnement.
Les collections exposées dans nos salles peuvent se diviser en deux grandes classes :
- Les collections de technologie : les matières premières et les produits fabriqués.
- Les collections géographiques.
Il serait trop long d’énumérer les nombreuses collections technologiques que nous trouvons à notre Musée. Notons cependant les suivantes : céréales canadiennes et étrangères, schéma de la fabrication des pâtes de bois, distillation du bois, essences de la Province de Québec et leurs applications (collection préparée par M. Gauvreau, directeur de l’École du Meuble), laines de toutes les parties du monde, collection complète de tissus classifiés d’après la fibre textile et l’armure, plus de 2,000 spécimens de minéralogie, etc.
Les collections géographiques les plus intéressantes sont celles de l’Indochine Française, de l’Inde, du Congo Belge, des Indes Néerlandaises, de l’Algérie, de l’Australie, de la Malaisie, etc.
Je ne puis terminer cette énumération sans signaler les miniatures suivantes : Usine pour l’extraction du sucre de betterave; fabrication de l’acide sulfurique; chevalement d’une mine; installation complète d’un haut-fourneau et d’une aciérie Martin-Siemens.
Nous possédons, de plus, une collection de minéraux fluorescents qui sont exposés dans des vitrines spéciales, éclairées aux rayons ultra-violets. C’est un phénomène rare à observer et qui récompense le visiteur qui veut bien se donner la peine de venir le voir.
Exposition permanente des produits de l’Empire britannique. – Au mois de juillet 1932, le Gouvernement canadien a signé des traités de commerce avec la Grande – Bretagne et les Dominions qui forment l’Empire britannique. Afin d’aider au développement des relations commerciales inter-impériales, M. Henry Laureys, qui était à ce moment à Londres, s’est mis en rapport avec l’Imperial Institute et les représentants de tous les Dominions et Colonies britanniques en vue de l’organisation à Montréal d’une exposition permanente des produits de l’Empire. Sa proposition a été très favorablement accueillie par tous les grands Dominions et par les principales colonies.
Après plusieurs années de travail et de négociations, M. Laureys a obtenu de très belles collections que le public montréalais pourra consulter sur place prochainement. Parmi les produits exposés, notons spécialement des statuettes d’ivoire, des poteries hindoues, de nombreux spécimens de l’artisanat des différentes provinces de l’Inde. Les artisans canadiens trouveront là des leçons intéressantes et vivantes. Ce sera une source d’inspiration qui pourra produire chez nous d’heureux effets.
L’exposition est complétée par une dizaine de dioramas représentant Bénarès, Gibraltar, Sydney, la préparation du jute, de la gomme laque, etc.
Les commerçants et les industriels trouveront donc réunies, dans une salle spéciale, toutes les ressources économiques de l’Empire britannique : produits minéraux, agricoles et fabriqués. Ces sources de renseignements sont complétées par des cartes, des photographies et des diagrammes du commerce canadien avec les pays représentés.
Les visiteurs pourront y admirer des produits rares. En parcourant les différents stands, ils feront le tour de l’Empire.
Par ce bref exposé, nous montrons que le Musée Commercial et Industriel de Montréal met à la disposition des commerçants et des industriels de la Province de Québec, un centre de documentation qui, s’ils savent en profiter, peut leur être d’une très grande utilité. Ajoutons que notre bibliothèque économique complète merveilleusement cet organisme d’expansion commerciale tant intérieure qu’extérieure.
Notre Musée est en même temps un instrument précieux pour l’enseignement à tous les degrés. Les professeurs et les élèves en très grand nombre ont largement profité des avantages que nous mettons ainsi gratuitement à leur disposition. Nous souhaitons cependant que notre Musée soit encore plus connu, plus fréquenté, pour qu’il réalise pleinement l’objet pour lequel il a été créé.
Paul Riou, l’Action Universitaire, vol.2, n.2, janvier 1935.

Musée commercial et industriel de Montréal. Photo : L’Action Universitaire, 1935.
Voir aussi :
- Musée Red Path de l’Université McGill
- Historique des musées du Québec
- Université de Montréal
- Université de Montréal en images
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