Cadeau de Phyllis Lambert

Somptueux cadeau de Phyllis Lambert

Les Montréalais viennent d’hériter d’un centre de haut-savoir d’une qualité exceptionnelle. Un lieu fin prêt, livré avec son équipement de pointe et son personnel (comptant une centaine d’employés permanents dont un bon nombre de diplômés de l’université). Tout le contraire d’une « coquille vide » donc.

Le CCA (le Centre canadien de l’architecture) est un cadeau providentiel d’une centaine de millions de dollars, répartis à peu près également centre le bâtiment et les collections de livres rares, photos, dessins, gravures et autres documents reliés à l’architecture, des collections parmi les plus importantes au monde. Et on ne compte pas ici les salaires passés et futurs, les budgets de fonctionnement, etc.

Le cadeau, on le doit à une femme, Phyllis Lambert, née Bronfman, elle-même architecte et fondatrice d’Héritage-Montréal. C’est peut-être le don le plus important jamais fait par un riche Canadien à sa communauté. C’est certainement le grand-œuvre de Mme Lambert.

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De ce coût de 100 millions de dollars, huit seulement viennent d’Ottawa et de Québec. Le Centre, dont l’idée remonte à 1979, jouit d’une réputation internationale et fait l’envie de bien des grandes villes, où il aurait pu d’ailleurs être construit. Mme Lambert a vécu dans quelques capitales européennes et américaines avant de revenir s’établir à Montréal.

Il se peut que les Montréalais ne prennent pas conscience tout de suite de l’importance de cette nouvelle institution. D’une part, le long bâtiment rectangulaire de pierre grise qui entoure de deux ailes protectrices la vieille maison Shaughnessy, boulevard René-Lévesque, n’a pas l’éclat ni la flamboyance des deux nouveaux musées d’Ottawa et de Hull, – le Musée-cathédrale des beaux arts du Canada et le Musée des civilisations aux formes sinueuses et morphologiques.

Le CCA n’est pas là pour rendre gloire au gouvernement canadien et n’est pas l’expression de l’ego d’un créateur.

Si l’aspect extérieur austère du CCA ne fait pas immédiatement l’unanimité, l’intérieur, est une réussite incontestable. Sobre, élégant, classique, le CCA reprend, dans son organisation intérieure, la symétrie et le rythme de la Maison Shaughnessy qu’il a décidé de sauver de la destruction, un immeuble comportant en réalité deux maisons divisées par un mur mitoyen, construit en 1875. La récupération de cette belle demeure du XIXe siècle, et du terrain pris entre deux bretelles d’autoroute, est déjà en soi un énoncé de principe pour le CCA.

Le CCA, né du rêve visionnaire de Phyllis Lambert, pourra-t-il  donner une conscience à Montréal? Il a tout ce qu’il faut, en tout cas, pour susciter des vocations, animer nos universités et faire de Montréal la Mecque de l’architecture.

(Texte paru le 6 mai 1989, dans La Presse).

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Le jardin du CCA. Photo : © GrandQuebec.com

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