Montréal à la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle
À cette époque, à la fin du XVIIIe siècle, la population de Montréal n’était pas loin d’atteindre les vingt mille âmes, les Canadiens français conservant toujours une légère avance sur les Britanniques. Mais bientôt, grâce à l’immigration des loyalistes des États-Unis, les anglophones égaliseraient d’abord, puis finiraient par dépasser le nombre des citoyens d’origine française. La majorité des derniers ne serait de retour manifeste qu’à la fin du siècle suivant.
Les visiteurs de l’époque reconnaissent que la population française donnait à la ville une physionomie attachante qui lui est restée en propre. John Lambert a vu en elle une « société plus amicale et plus agréable que nulle parte ailleurs ».
Il y avait encore un carcan sur la place publique, cet appareil sévère de justice, propre d’un temps où le moindre vol méritait à son auteur le fouet, le carcan ou la marque au fer rouge. Mais les plaisirs plus relevés et plus en harmonie avec cette « douceur artistique » qui souligne Lambert, étaient heureusement offerts aux Montréalais : le théâtre (v. notre article Théâtre Royal), d’excellents restaurants, aménagés parfois à bord des goélettes.
L’hiver, on dansait, on échangeait des visites… Il semble, toutefois, qu’en hiver, le principal amusement de la saison, était de courir sur la glace en traîneau. Au surplus, tous s’accordaient à dire que le climat était moins rigoureux à Montréal qu’à Québec et que la propreté y était mieux observée que dans la capitale.
L’hygiène fit des progrès sensibles aux environs de 1830. L’eau continuait d’être distribuée au tonneau, de porte en porte, le système de canalisation, tout récent encore, était rudimentaire, ayant des tuyaux de bois. Les tubes furent remplacés par le plomb et celui-ci par le cuivre beaucoup plus tard.
Dans l’ensemble, aux yeux de ceux qui le voyaient une première fois, la ville offrait une caractère plutôt européen. Elle grandissait, s’étendant au-delà des anciennes fortifications.
Les rues étaient toujours étroites, sombre et sales, à l’exception de la rue Notre-Dame et celle de Saint-Jacques, sa rivale, – dans laquelle s’alignaient des demeures les plus imposantes et élégantes.
En effet, les rues commençaient à peine d’être pavées de blocs de bois ou de pierre. Cette innovation permettait aux habitants de sortir désormais le soir et la nuit sans risquer de se casser une jambe ou le cou.
L’éclairage au gaz s’établissait, dont le premier essai pratique, ayant lieu en 1815, préluda à la disparition graduelle des lampes à l’huile.
Une épisode fort curieuse eut lieu un dimanche de septembre 1819, lorsque, en plein jour, de gros nuages multicolores couvrirent complètement le ciel, au dessus de la ville. Ils ne tardèrent pas à devenir gris, puis noirs et, qui plus est, le phénomène se renouvela chaque jour de la semaine suivante, au point qu’il fut impossible de voir à plus de dix pas devant soi. Une espèce de boue liquide se mit à tomber. Des jours s’écoulèrent dans l’angoisse et l’attente de la catastrophe, puis le ciel retrouva soudainement sa sérénité et les Montréalais, le calme.
Depuis, le 1819, est considéré comme « l’année de la grande noirceur », Mais parmi les événements tragiques on peut mentionner les épidémies de choléra, de typhus, de variole, de grippe espagnole, plus près de nos temps. L’épidémie de choléra asiatique frappa la ville en 1832 et en 1834, des milliers des personnes en étaient mortes.
Mais, l’année 1832 vit également le sanglant affrontement provoqué par les élections complémentaires de mai et, la même année, la cité de Montréal est élevée officiellement au rang de la ville. Mais ici, toute une autre histoire commence et nous vous invitons à lire le chapitre suivant de nos épisodes montréalais…
(Notre article est inspiré dans le livre de Léon Trépanier Les rues du Vieux Montréal au fil du temps, Fides, 1968).
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