Les bandits battent en retraite en faisant feu sur les agents
Le 10 mars 1914, quatre apaches surpris en flagrant délit tirèrent sur les deux policiers perspicaces du poste N18, tuant l’agent Honoré Bourdon et blessant grièvement l’agent Auguste Guyon.
Le 12 mars, la chasse aux bandits qui ont assassiné le constable Bourdon et ont blessé le constable Guyon, a pris une nouvelle phase, plus tragique encore. Voici le récit de La Presse:
Nos agents ne sont plus dans la cruelle incertitude où ils se trouvaient depuis qu’ont leur avait appris le meurtre et la fuite des apaches. On connaît maintenant l’identité des misérables qui ont failli provoquer d’autres vides dans les rangs de notre police.
Une terrible bataille a été livrée, en effet, dans les champs du nord-est de la ville de Montréal entre une escouade de détectives et trois des coureurs de route qui ne sont parvenus à s’échapper qu’à cause du manque de lumière et de la présence de hautes broussailles qui leur ont servi d’abri.
Les témoins de la bataille disent qu’au moins cinquante coups de feu ont été échangés. Pendant plusieurs heures, la plus cruelle incertitude a régné par toute la ville. On a rapporté même que l’assistant surintendant Charpentier, l’inspecteur McLaughlin et quelques agents avaient été tués.
Ces rumeurs étaient heureusement fausses. Nos agents, cependant, ne se sont pas ménagés, et ce n’est pas encore leur faute si la plus grande partie de la fameuse bande n’est pas tombée entre leurs mains.
Quoiqu’il en soit, l’homme qu’on recherchait par dessus tout, le cocher de place Foucault, celui de qui la police attend de précieux renseignements, a été arrêté dans un hôtel du nord de la ville. Comme on le sait, c’est lui qui, le soir fatal, au dire de la police, conduisait les bandits assassins dans sa voiture.
Quelques minutes après sa capture, commençait la terrible bataille au revolver. Les apaches que l’on espérait surprendre dans leur antre avaient sans doute eu connaissance, par leurs éclaireurs, de la venue des agents, car ceux-ci trouvèrent la maison vide.
Dans cette maison vide, sise rue Cartier, les détectives ont trouvé tout un arsenal. Disposés près de chacune des fenêtres se trouvaient des carabines Winchester à seize coups, chargées, pendant qu’auprès il y avait quantités de revolvers, de poignards et d’autres armes. Les munitions, non plus, ne faisaient pas défaut. Il y avait aussi dans la place des provisions pour plusieurs jours, preuve que l’intention des bandits avait été d’abord de supporter un siège en règle.
Comme la cage était vide, l’assistent-surintendant Charpentier laissa des agents de garde, puis, instruit par des voisins de la direction prise par les coureurs des routes, il se lance sur leurs traces. C’est alors que commença la suite des événements dont nos lecteurs liront ici les détails.
Nuit dramatique
Jamais, de mémoire d’homme, la sûreté n’a passé une nuit remplie d’événements sensationnels que les agents viennent de finir. Il y eut de tout: recherches patientes, courses à travers champs et à travers bois, bataille à coups de revolvers avec bande d’apaches, guet-apens, balles qui sifflent aux oreilles à travers la nuit, randonnées en automobile, émoi dans tout un quartier de la ville, en un mot, ce fut une nuit mémorable entre toutes, dont tous, acteurs comme spectateurs gardent un souvenir vivace.
Plus heureux cependant que les constables de la Côte-des-Neiges, les détectives ont échappé aux balles des audacieux bandits, mais, encore une fois, les apaches ont pu leur passer entre les mains et se sont enfuis vers un repaire que toute la police de Montréal s’occupe aujourd’hui de découvrir.
Après un long travail
Dès hier après-midi, l’assistent-surintendant de la Sûreté, M. Jos. Charpentier, après un travail inlassable de trente-six heures, parvenait à apprendre les noms de trois des bandits qui se trouvaient dans la voiture du cocher Arthur Foucault, le soir du meurtre de l’agent de police Bourdon.
Il se rendait aussitôt au greffe de la cour de police et assermentait un mandat contre les nommés Joseph Beauchamp, Alphonse Foucault, Ismaël Bourret, les prétendus assassins, et contre le cocher Arthur Foucault. Beauchamp a déjà eu maille à partir avec la police. Le chef a parvenu à apprendre l’endroit où il demeurait, dans le nord de la ville, près de la Côte-Saint-Michel, dans la rue Cartier. Il n’eut pas de doute que ce devait être là les quartiers généraux de la bande. Pensant, et avec raison, avoir un siège à faire en cet endroit, Charpentier se fit accompagner de l’inspecteur Cowan et d’une dizaine d’agents.
Lui-même et deux détectives avaient pris place dans l’automobile de M. Rosario Drouin, surintendant des édifices de Montréal, qui les conduisit personnellement pendant toute la terrible et dangereuse randonnée. Une sentinelle que l’on avait envoyé d’avance sur les lieux, apprit au chef que les occupants de la maison avaient fui à peine deux minutes auparavant. En même temps, Il indiquait la direction prise par les fugitifs. Il pouvait être alors huit heures et demi du soir. Il faisait un clair de lune superbe.
Épilogue : C’est dans les champs que se déroula quelques heures plus tard la fusillade. Dans les jours suivants, après les émouvantes obsèques d’Honoré Bourdon, le cocher Foucault accusa Bourret d’avoir tiré le coup fatal. Beauchamp fut arrêté le 17 mars 1914. Au moment de cette publication, Bourret et Alphonse Foucault courraient toujours.

Voir aussi :
- Forces de l’ordre au Québec (l’index thématique)
- La liste des dix bandits les plus recherchés au Québec