Les chemins de fer à Montréal, leur histoire et leur développement
Montréal, terminus de la navigation océanique, était de ce fait le centre naturel du commerce – importations et exportations—pour tout le pays. Déjà en 1881, on constate que quatre-vingt-onze pour cent du trafic étranger passait par le havre de Montréal. D’où la nécessité d’organiser des moyens de communication réguliers, sûrs et rapides avec le pays intérieur et les plaines de l’Ouest.
Après les premières entreprises de petits chemins de fer locaux, de 1836 à 1842, on lança un projet de plus grande envergure. En 1851, la Compagnie « St. Lawrence and Atlantic » inaugurait une voie nouvelle entre Longueuil et Richmond, dans les Cantons de l’Est, sur un parcours d’environ 100 milles. En 1853, la Compagnie du Grand-Tronc poussait sa voie ferrée jusqu’à Portland, dans l’État du Maine, et, en 1855, ouvrait un autre embranchement jusqu’à Brockville, dans le Haut-Canada.
Enfin en 1856, on faisait l’ouverture officielle de la ligne Montréal-Toronto, la plus importante de l’époque. Ce fut l’occasion de fêtes sans précédent à Montréal. On avait souscrit 3,000 livres sterling pour défrayer le coût de cette démonstration publique. Il y eut d’abord une grande procession de toutes les branches du commerce et de l’industrie avec chars allégoriques, et suivie d’une grande revue militaire, à la ferme Logan – aujourd’hui « Parc Lafontaine ».
Dans la soirée, une procession aux flambeaux se termina par un grand feu d’artifice. Au banquet, présidé par le gouverneur général, plus de 4,000 convives se pressaient aux tables, avant de prendre part à un grand bal officiel (12-13 novembre).
L’on avait bien raison de se réjouir, car depuis cinq ans, on vient de le voir, plusieurs lignes nouvelles avaient été construites, qui rattachaient la métropole au reste du pays et même aux Etats-Unis. Les avantages économiques qui devaient en résulter étaient incalculables. Avec l’établissement de ces voies de communications nouvelles, coïncide une ère de prospérité qui, à son tour, a suscité des entreprises connexes, telles que ponts, gares, entrepôts et grands hôtels.
Lorsque l’on décida de prolonger le chemin de fer de l’État, l’<( Intercolonial », jusqu’à Montréal, par la rive sud, tout le Canada habité, de Moncton à Toronto, et même au delà, était désormais desservi par voie ferrée.
Mais l’entreprise la plus importante dans ce domaine des chemins de fer est sans doute celle que des capitalistes étrangers, à la suggestion d’hommes d’affaires de Montréal, mirent de l’avant en 1873. Le Manitoba et la Colombie britannique venaient d’entrer dans la Confédération canadienne, et il s’agissait de rien de moins que de réunir économiquement ces nouvelles provinces aux anciennes par un gigantesque transcontinental. L’affaire était lancée par le montréalais sir Hugh Allan, premier président de la Compagnie canadienne du Pacifique et grand magnat de nos compagnies maritimes. Le tracé initial de la nouvelle ligne s’étendait de Montréal à Vancouver, couvrant une distance de 2,904 milles. Notre premier transcontinental fut inauguré le 26 mai 1887. Ce jour-là, on put dire que notre ville était le terminus du trafic européen par voie maritime et du commerce asiatique par chemin de fer.
En outre de ces réseaux canadiens, la métropole est aussi le terminus des prolongements de plusieurs compagnies américaines, qui utilisent en partie les voies de nos compagnies montréalaises.
Tout cela a amené des entreprises de toutes sortes, dont nous ne pouvons mentionner ici que les principales. (En janvier 1881, on fit l’expérience d’un chemin de fer sur la glace, entre Longueuil et l’ancien village d’Hochelaga. Après quelques traversées heureuses, la locomotive passa au travers de la glace et l’on ne recommença plus l’aventure).
Après avoir construit sa gare centrale de Windsor, la Compagnie du Pacifique a jeté, en 1887, un pont sur le St-Laurent, à Lachine, pour à son tour pénétrer en territoire américain. En 1893, elle érigeait sa magnifique gare Viger, pour ses lignes de l’Est. Malheureusement, la Compagnie convertit cette gare en hôtel, qu’elle a d’ailleurs abandonné depuis. Rien ne montre mieux l’importance d’un terminus de chemin de fer pour une ville comme la nôtre. Depuis que l’hôtel Viger est fermé et que la Compagnie diminue chaque année l’importance de la gare de l’Est, le vide s’est fait d’inquiétante façon dans ce quartier de la ville, naguère si prospère et si actif.
En 1897, la Compagnie du Grand-Tronc, dut reconstruire le pont Victoria, à cause du trafic sans cesse grandissant. La construction nouvelle comprend une double voie de chemin de fer, des voies de tramway, de voitures et de piétons. – On a depuis jeté sur le St-Laurent le pont Jacques-Cartier, au coût de dix-neuf millions de dollars, et dont le tablier central s’élève à 150 pieds au-dessus du fleuve, pour permettre aux plus gros navires d’atteindre le port.
Avant la fusion des chemins de fer de l’Ouest avec le Grand-Tronc, sous le nom de « Canadien National », on avait commencé le percement d’un tunnel sous la montagne. L’œuvre fut- terminée en 1918, et le premier train traversa la montagne à sa base le 21 octobre.
On sait qu’il était question depuis longtemps de bâtir une gare centrale, où aboutiraient tous les trains venant de toutes les directions. Cette nouvelle entreprise est aujourd’hui en cours d’exécution. Pour cela on a dû construire plusieurs voies élevées dans le bas de la ville, car la nouvelle gare est située sur le coteau, qui longe la rue St-Antoine, en plein centre de la métropole.
(D’après Camille Bertrand, Histoire de Montréal).
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