Les filous de Chicago vont envahir Montréal

Les filous de Chicago vont envahir Montréal

La Sûreté apprend de bonnes sources que Montréal est menacée d’une invasion de bandits. Où et comment opèrent les tire-laine. — Le public est averti de se surveiller dans les tramways et les réunions publiques

Les autorités policières de Montréal sont informées qu’un fort groupe de pickpockets de la ville de Chicago est actuellement à se préparer à envahir notre ville.

Cette invasion d’experts du vol coïncide avec l’ouverture de la saison de tourisme qui s’annonce comme devant être considérable.

Les membre de cette industrie du vol à la tire, qui est des plus florissants dans la ville des crimes, auraient donc décidé de venir de nouveau tenter fortune dans Montréal après une absence complète de plusieurs mois.

Il y a quelques années la ville était infestée de cette peste pendant les mois d’été, mais l’an dernier on n’a rapporté que quelques cas isolés de pickpockets et depuis 8 mois il n’y a pas eu une seule plainte de rapportée à la Sûreté locale. Cependant, le mouvement actuel des bandits est sérieux et déjà plusieurs de ces filous sont en route pour Montréal, et ils ont l’intention de commencer leurs opérations à l’occasion de Pâques.

La police se prépare

Nous avons, dans Montréal, une escouade de détectives passés maîtres dans l’art de découvrir et de déjouer ces voleurs. L’inspecteur Lemire a donné des ordres sévères pour que ce service soit prêt à faire face à l’invasion.

Où ils opèrent

Un détective local, revenant de Chicago, déclarait hier que cette ville est infestée de pickpockets qui opèrent continuellement dans les tramways et dans les grands magasins de la ville. Au cours de son séjour il a souvent rencontré des figures bien connues dans la pègre de Montréal et a été même reconnu par eux, car en le voyant prendre un tramway, les individus disparaissent comme par enchantement.

Le travail de ces bandits est cependant rendu plus difficile dans les villes américaines, car partout, on voit de nombreux avis au public lui disant de se méfier de pickpockets et ce serait là la raison pour laquelle plusieurs veulent immigrer à Montréal pour l’été.

Par bateau

ci à Montréal la plaie n’existe plus depuis une couple d’années, car l’an dernier il n’y a eu que quelques cas isolés de vols sur la personne, mais la police détient la preuve absolue que le mouvement des bandits vers Montréal est très fort. Ces derniers voyagent ordinairement de New-York à Prescott, Ontario et de cet endroit ils prennent le bateau pour Montréal, exerçant leur métier en route.

Leur manière d’opérer est très simple. Il est très rare que nous voyons un pickpocket se fâcher quand il est découvert ou soupçonné. Ils ne sont jamais violents et s’exercent toujours avec véhémence pour avoir bousculé quelqu’un.

Comment on procède

Des bandits opèrent ordinairement par groupes de trois. Il y a de ce que l’on nomme le « blocker » qui tombe en tête. Le véritable pickpocket vient ensuite et est suivi d’un troisième confédéré qui le suit de près. Ils semblent ne pas se connaître et ne se parlent jamais. Ces voleurs ne se font des signaux que par les yeux quand vient le temps d’opérer.

Le premier échappe ordinairement quelque chose ou retarde de payer à l’entrée d’un tramway. Pendant qu’il cause un délai quelconque, son compagnon, qui le suit, et qui est très habile pour aller dans le gousset d’une victime, fait son travail et dès qu’il a obtenu l’argent, il le passe rapidement au troisième bandit qui est derrière lui.

Ce dernier descend immédiatement du tramway. Ils se rencontrent plus tard pour partager leur butin.

Si le pickpocket est découvert par la victime immédiatement après le vol, il ne sera pas violent et essaiera par tous les moyens possibles de le convaincre qu’il n’est pas coupable. Il déclarera avoir vu un homme près de lui et lui offrira de l’aider à le retracer. Ce délai permet au troisième confédéré de prendre la fuite.

Bien vêtus

Un des principaux atouts de pickpockets est de changer souvent de vêtements. Par exemple, un nommé Pollock fut arrêté par un détective local un samedi soir et il fut alors vêtu d’un habit gris de la meilleure coupe. Sa tenue était impeccable. La semaine suivante il était de nouveau arrêté, mais cette fois il semblait revenir des chantiers. Il était vêtu d’un habit des bois et portait un casque ainsi que de grosses mitaines qui, pour la circonstance, lui permettaient de cacher une de ses mains pendant qu’il opérait.

Autant que la chose est possible, le vrai pickpocket ne doit pas laisser voir son visage à la victime. Si par malheur celle-ci le voit avant le vol, il abandonnera ordinairement ses plans et se choisira une autre victime. Le détective remarqua son mouvement brusque et l’arrêta. Il lui déclara que son mouvement avait été trop soudain.

La femme donna pour raison de son excitation qu’elle avait reconnu le détective d’après une description obtenue à New-York. « Il a longtemps que je vous connaissais, sans cependant vous avoir vu », déclara la femme.

Avis au public

Le meilleur moyen pour le public pour prévenir ces vols est de toujours se surveiller, surtout quand il y a foule. Autant que possible, il faut tenir son argent dans un endroit sûr et difficile d’accès.

De plus, nos grosses compagnies de transport, ainsi que tous les maisons de la ville, devraient avoir de nombreux avis, dans les deux langues, prévenant le public d’être sur ses gardes. On ne peut croire le bien que ces avis font, car ils tiennent constamment dans l’esprit des citoyens le danger qui les menacent.

De plus, une personne devrait vérifier, de temps à autre, dans les magasins et tramways, si tous ses objets sont en sa possession.

De nombreux citoyens se fient trop à la police. Celle-ci fait bien tout en son pouvoir, mais les quelques officiers dont la ville dispose ne peuvent se trouver partout où se trouve la victime.

Les causes de vols sur la personne sont des plus difficiles à compléter par la police pour cette raison et aussi parce que d’ordinaire, les victimes ne découvrent le vol que beaucoup plus tard. Avant de commettre leur vol, les pickpockets causent toujours une distraction quelconque à leurs victimes, leur faisant oublier le danger qui les menace.

École de pickpockets

Avant de venir à Montréal, les pickpockets qui ont un casier judiciaire, vont dans une école et là ils pratiquent sur un mannequin muni de nombreuses cloches. Quand il peut aller dans les goussets du mannequin sans faire sonner les cloches, on lui permet d’exercer son métier dans les tramways.

Les détectives qui s’occupent de ces causes doivent exercer une surveillance continuelle et doivent surtout savoir se déguiser habilement, car le signalement de tous les officiers qui s’occupent de ces causes, sont transmis à tous les membres de la confrérie de pickpockets aux États-Unis et ces gens-là savent à qui ils ont affaire avant de venir au pays.

Une femme habile

L’an dernier une femme, travaillant seule et venant de New-York, arriva à Montréal. Elle se rendit au marché Bonsecours dans l’intention d’exercer son métier qu’elle fait depuis quinze ans. Elle n’a été arrêtée qu’une seule fois durant ce temps. Un citoyen alla porter plainte à la Sûreté qu’il avait été volé alors qu’il était au marché. Il ne put cependant dire par qui. Un détective se rendit sur les lieux.

La femme était devant un étalage de radis quand le détective traversa la place Jacques-Cartier et le vit. Immédiatement elle s’empara de quelques paquets de radis et les a lancé en direction de cet homme.

La Sûreté possède des centaines de photographies de pickpockets internationaux et exerce une surveillance des plus étroites sur tous les arrivages de navires, trains, autobus et automobiles qui entrent dans la ville. Un grand nombre de ces visiteurs indésirables sont arrêtés des leur arrivée ici et promptement coffrés, mais il y en a toujours quelques-uns qui réussissent à s’échapper et peuvent tenter d’opérer. Au public d’être en garde.

(Cette nouvelle nous vient du 13 avril 1930).

Voir aussi :

Police
Policiers de Montréal en 1918. Photographie libre de droits.

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