Combat de la Place d’Armes

Combat de la Place d’Armes, le 30 mars 1644

L’année 1644 est marquée par un fait militaire bien connu: le combat de la Place d’Armes, le 30 mars. (La Place d’Armes dont il est ici question devait être peu éloignée du fort. Ce n’était probablement pas l’endroit que l’on appelle ainsi de nos jours).

Les attaques incessantes des Iroquois avaient fini par irriter les colons. On s’étonnait de voir le gouverneur endurer tous ces mauvais coups sans riposter de quelque manière. M. de Maisonneuve se rendit enfin au désir des Français de prendre à leur tour l’offensive.

Résolu donc à la chose, raconte M. Dollier de Casson, voici ce qui arriva: le 30e jour de mars, les chiens, qui tous les matins faisaient une grande ronde pour découvrir les ennemis, sous la conduite d’une chienne nommée Pilotte, laquelle pillait fortement à son retour ceux qui avaient manqué à la compagnie, se mirent à crier et hurler de toutes leurs forces, faisant face du côté où ils ressentaient les ennemis. (Dollier de Casson: «Histoire du Montréal,» p. 51.)

Mis en alerte par cet avertissement des chiens de garde, les habitants décident de prévenir l’ennemi et de se porter à l’attaque. Le gouverneur, à la tête d’une trentaine d’hommes, pénètre en forêt, où deux cents Iroquois se tiennent en embuscade derrière les gros arbres.

Surpris dans leur mauvais dessein, les sauvages engagent le combat à tir perdu, sans ordre. Ils ont cependant l’avantage du nombre; et les Français, qu’une lutte de ce genre épuisa vite de munitions, durent bientôt songer à faire retraite. M. de Maisonneuve, payant d’audace en face du danger d’être cerné par l’ennemi, ordonna à chacun de se retirer dans le fort, voulant être le dernier à laisser le champ de l’action. Devenu, par son isolement, le point de mire des assaillants, le gouverneur semblait voué à une mort certaine.

Le chef sauvage voulut s’en emparer vivant et fonça sur lui. À ce moment, de Maisonneuve déchargea son pistolet sur l’audacieux Iroquois et l’étendit raide mort à ses pieds.

Les Français, profitant du désarroi jeté dans les rangs de leurs adversaires par la mort du grand chef, purent atteindre le fort sans être poursuivis dans leur retraite.

Trois colons étaient tombés au cours de la fusillade: Guillaume Lebeau, Jean Mattemale et Pierre Bigot; deux avaient été faits prisonniers; ils furent dans la suite brûlés au pays sauvage; on ne connaît pas leurs noms.

D’autres escarmouches suivirent cet épisode de la guerre iroquoise, mais les mémoires du temps n’en rapportent presque rien.

Au mois de juillet 1645, trois délégués des Agniers descendirent à Québec pour proposer la paix au gouverneur.

M. de Montmagny s’empressa, on le pense bien, d’accepter cette offre opportune. Ville-Marie, depuis deux ans, n’avait connu que l’énervement des attaques et les surprises des embuscades. On allait donc enfin jouir d’une bienfaisante tranquillité, du moins pour quelque temps.

Cette perspective de la paix fut cependant quelque peu attristée par le départ de M. de Maisonneuve, que la mort de son père rappelait momentanément en France.

Ayant nommé M. d’Aillebout pour commander durant son absence, il s’embarqua à Québec le 24 octobre 1645, sur le vaisseau le « Notre-Dame de Montréal », qui faisait partie d’une flotte marchande de cinq navires, sous les ordres de M. Pierre de Repentigny. Le gouverneur prit occasion de ce voyage pour débarrasser la colonie d’un certain sieur de Labarre, dont la conduite était fort peu édifiante, malgré toutes ses ostensibles dévoteries. Il le contraignit de repasser en France avec lui.

Il y avait aussi à bord une cargaison de 30 000 livres de peaux de castor, devant rapporter plus de 200 000 francs aux habitants du Canada. La Compagnie de la Nouvelle-France venait en effet d’accorder aux colons le privilège de faire pour leur compte le commerce des fourrures. («Traité entre la Compagnie de la Nouvelle-France et les Habitants du Canada », le 14 janvier 1645. — Édits et Ordonnances Royaux, 1854, vol. I, p. 28.

(Tiré de Histoire de Montréal, par Camille Bertrand, 1935, Éditions Paris Plon).

Voir aussi :

Paul de Maisonneuve
L’actuelle Place d’Armes. Monument de Paul de Maisonneuve. Photo de GrandQuebec.com.

Laisser un commentaire