Le choléra de 1832

Le choléra de 1832 à Montréal

En juin 1832, le choléra asiatique, après avoir ravagé les Indes Orientales et l’Europe, se déclare à Montréal. Ce fléau le plus terrible des temps modernes avait d’abord éclaté à Québec où la maladie fit un nombre considérable de victimes.

Le fléau s’attaquait aux pauvres et aux riches, aux grands comme aux petits, La consternation se répandit parmi les habitants de Montréal. Le commerce devint stagnant et les opérations industrielles furent suspendues.

D’après les statistiques officielles, citées par Hector Berthelot dans son Le vieux bon temps (p.78), les cas de mortalité par le choléra ont été comme suit :

Semaines finissant le :

16 juin 1832 – 261 décès
23 juin 1832 – 632 décès
30 juin 1832 – 166 décès
7 juillet 1832 – 94 décès
14 juillet 1832 – 61 décès
21 juillet 1832 – 70 décès
28 juillet 1832 – 131 décès
11 août 1832 – 101 décès
18 août 1832 – 79 décès
25 août 1832 – 68 décès
1er septembre 1832 – 54 décès
8 septembre 1832 – 54 décès
15 septembre 1832 – 13 décès
31 septembre 1832 – 6 décès

Total = 1904 décès.

On a observé que la plus grande mortalité a été vers la mi-juin; le 19 juin, les inhumations ont atteint le chiffre extraordinaire de 149. Le nombre total des cas de choléra jusqu’à la dernière date mentionnée dans le tableau ci-dessus a été de 4420, de sorte que plus qu’un tiers des cas a été mortel; 3 sur 7 serait à peu près la proportion.

Le choléra diminua sensiblement ses ravages en septembre et finit par disparaître complètement au commencement d’octobre.

On raconte que pendant le choléra de 1832 il y a eu plusieurs cas d’inhumations de personnes vivantes. On cite le cas de Mlle Hervieux qui fut atteinte par le choléra pendant une visite chez M. de Beaujeu. Le médecin de la famille, le docteur Arnoldi, lui donna de l’opium pour soulager ses souffrances. Malheureusement, une dose trop forte lui fut administrée et elle tomba en léthargie. Elle fut enterrée dans cet état au cimetière catholique sis alors sur le territoire du parc du Canada, à côté de la cathédrale de Marie Reine du monde. Plus tard, en creusant des fosses on découvrit que la malheureuse jeune fille avait été enterrée vivante. Elle avait réussi avec son coude à défoncer un des côtés de sa bière et elle s’était rongée une partie du bras.

D’après les statistiques du temps, on affirme qu’un plus grand nombre de personnes ont été emportées par le choléra, dans la province de Québec (plutôt, le Bas-Canada, à l’époque), avec une population d’un demi-million, en trois mois, que dans la Grande-Bretagne avec une population de 15,000,000, en six mois.

Deux années plus tard, en 1834, le choléra reparut à Montréal. Il ne commença pas ses ravages aussi à bonne heure en été, mais son caractère était moins violent. Cependant, plusieurs centaines de personnes périrent par l’épidémie.

(D’après Hector Berthelot, Le bon vieux temps, publié en février 1884).

Épidémie de choléra (d’après Charles Bertrand, Histoire de Montréal)

Mais le plus terrible fléau qu’ait connu Montréal, c’est celui du choléra asiatique qui enleva le quinzième de la population urbaine Depuis quelques années une forte émigration des Îles britanniques se dirigeait vers le Canada. Il nous arrivait chaque année de 20 à 30 mille Anglais, Écossais et Irlandais. En 1832, le « Carricks », venant de Dublin, mouillait à Grosse-Ile, ayant à son bord des centaines d’émigrés, atteints du choléra. Les autorités sanitaires négligèrent de prendre les mesures nécessaires pour prévenir la contagion, qui se répandit dans tous les centres, où on laissa les émigrés se rendre en toute liberté, à Québec, à Montréal, à Kingston, à Toronto. Aylmer, dans une lettre au ministre, avouait que le fléau avait suivi plus particulièrement les grandes lignes de communication, tracées par les émigrés en quittant Québec pour le Haut-Canada et les Etats-Unis ». Malgré ce français baroque de la traduction officielle, on comprend que les émigrés semèrent la maladie partout sur leur passage.

Les statistiques pour Montréal mentionnent 4,420 cas, dont 1,904 furent mortels, durant les trois mois que dura l’épidémie, de fin juin à septembre. On conçoit qu’une terreur panique se soit emparée de la population, décimée par le fléau. Les magasins et autres établissements de commerce furent fermés, les maraîchers désertèrent les marchés publics et l’on fut menacé de la famine. Les campagnes étant moins affectées que la ville, les citadins s’y rendaient en masse, pour fuir la contagion. Toute activité économique et sociale fut paralysée durant plusieurs semaines.

lion du plateau
1904 décès à cause de choléra en 1832. Photo : © V. Petrvoskiy.

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