Chauffeurs de taxi mécontents

Une méthode d’épuration peu goûtée du chauffeur de taxi

Le Bureau de Coordination du Taxi, organe officiel des associations Diamond, LaSalle, Métropole et Dominion, proteste énergiquement contre les procédés « scabreux » employés samedi dernier par la Sûreté municipale, qui poursuivit actuellement sa campagne d’épuration annoncée la semaine dernière.

Dans une note soigneusement rédigée, le Bureau, représenté par M. Adrien Allard, assure à plusieurs reprises qu’il n’a pas l’intention de se mettre la police à dos, ni de nuire au travail de la Sûreté, ni d’enseigner leur travail aux gardiens de la paix. Ce que la note refuse d’accepter, cependant, c’est le procédé employé pour l’arrestation de « centaines de taximen » , conduits au poste de police sans explication, au vu et au au su des clients qui recevaient l’ordre péremptoire de descendre, en gardant l’impression qu’ils venaient de se confier aux mains de dangereux bandits. »

On aurait pu tout aussi bien assigner ces hommes pour interrogatoire, assure la note, et le résultat aurait été le même. Voici quelques extraits de cette note :

« Nous nous en voudrions de blâmer de quelque façon la Sûreté municipale de la campagne entreprise contre la vague de crime à Montréal. Au contraire même, car nous commencions de la trouver un peu trop désintéressée du très grand nombre d’assauts chez nos taximen.

De même, nous nous garderons bien de lui indiquer la façon de procéder dans son travail. Nous serait-il cependant permis de ne pas trouver tout à fait appropriée la façon d’arrêter nos taximen dans le raid de samedi soir.

Tout le monde sait en effet que lundi matin, des centaines de taximen comparaissaient en Cour du recorder sous l’accusation (pour la majorité d’entre eux) de ne pas avoir eu « leur licence d’automobile suffisamment éclairée ». Arrêtés sans aucune formalité, ils avaient du déjà samedi soir s’aligner au poste #14 et laisser là des cautionnements substantiels.

En effet plusieurs de nos taximen nous rapportent que les détectives les faisaient stopper, leur enjoignant impérieusement de les suivre au poste de police, et sans ajouter plus d’explications ordonnaient aux passagers de descendre, laissant croire à ceux-ci que pour un moment ils avaient été de toute évidence à la merci d’un bandit…

Une façon déplorable

Cette façon de procéder sans discernement des personnes, nous apparaît pour le moins déplorable car elle est de nature à nuire gravement à la réputation des gens du taxi.

Trop de gestes de cette nature, trop de nouvelles aussi qui ne mettent un relief que les mauvais coups d’une poignée de « moins bons » ont déjà trop induement entammé notre réputation. Nous qui connaissons le grand nombre de nos taximen affirmons que la majorité est affirmons que la majorité est faite de honnêtes gens sur qui le public peut se fier sans crainte aucune, poursuit M. Allard.

Encore une fois nous nous gardons bien de donner quelque conseil que ce soit, mais il nous semble bien que les recherches de la Sûreté dans sa campagne actuelle et en ce qui regarde les taximen, seraient bien plus efficaces si on lui donnait accès aux dossiers de M. Leggett, lesquels, comme il nous affirma maintes fois, gardent un rapport complet et à date de chacun de nos hommes. Nous n’oublierons pas jamais d’autre part l’assurance qu’il nous donne aussi qu’aucun permis n’était accordé aux repris de justice non réhabilités…

Une coopération

Nous ne voulons pas que ces remarques nous mettant en ligne de bataille avec la police municipale. Ceux qui nous connaissent savent les buts du Bureau de Coordination du Taxi, savent aussi que la coopération est plutôt notre façon de toujours. Nous profitons même de la circonstance pour dire comment certains officiers de la police ont été avec nos magnifiques. Aussi nous croyons bien qu’avec le temps une foule de problèmes seront réglés, grâce à cet esprit de compréhension réciproque autour de chaque cas, assure toujours M. Allard.

Nous ne sommes pas de ceux qui demandent à la police plus qu’elle ne peut normalement donner. Nous n’entendons pas non plus lui voir régler des choses qui ne sont pas de son ressort dans l’exercice du taxi. Aussi quand nous affirmons vouloir nous occuper de nos affaires nous signifions simplement mais absolument que nous allons tout mettre de sécurité morale et matérielle. Partant les taximen au lieu d’apparaître comme un cauchemar à l’autorité, deviendraient une collaboration efficace, précieuse à la sécurité publique et des propagandistes épatants pour toute campagne de civisme, etc.

Pour réussir une telle amélioration, les Associations Diamond, LaSalle, Métropole, Dominion se sont donné la main dans les cadres du Bureau de Coordination du Taxi. Mais l’organisation, faite pour le bien de tous les taximens, s’adresse aussi à tous les autres taximen sérieux, désireux de participer à l’amélioration de l’état de choses actuel, à la solution en commun de problèmes communs, comme la sélection systématique du personnel, une surveillance adéquate de ce personnel dans l’exploitation de notre commerce, le dépistage des quelques centaines de taxis sans permis habitués des noces, des funérailles, des baptêmes, des « flat rates », etc.

Bientôt les résultats diront suffisamment au public, à l’autorité combien les Associations plus haut mentionnées multiplient les efforts vers les buts visés. Mais ces résultats seront bien plus grands, plus concrets si le public nous y aide, si L’autorité municipale dans un geste facile veut bien nous faciliter la tâche.

(Texte paru le 24 janvier 1950, mardi’ dans le quotidien Le Canada).

Voir aussi :

Joseph Tremblay et son Pontiac 1950. L'enseigne sur le toit ressemble à celle de taxi Métropole, mais la compagnie n'existait pas encore au début des années 50. Source de l'image :  https://montrealtaxi.blogspot.com/2011/03/taxi-veteran-pontiac-1950.html. Image libre de droits.
Joseph Tremblay et son Pontiac 1950. L’enseigne sur le toit ressemble à celle de taxi Métropole, mais la compagnie n’existait pas encore au début des années 50. Source de l’image : montrealtaxi.blogspot.com/2011/03/taxi-veteran-pontiac-1950.html. Image libre de droits.

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