Blé en Nouvelle-France
Quand le botaniste suédois Peter Kalm vint au Québec au cours de l’été 1749, il en profita pour étudier les différentes plantes canadiennes. Il nous a aussi laissé de belles descriptions sur diverses facettes de la vie en Nouvelle-France, et son témoignage sur la flore québécoise est précieux. Voici ce que Peter Kalm dit sur le blé (la division en paragraphes a été faite par nous afin de faciliter la lecture):
«…Tout le blé est du blé d’été. Le blé blanc est très commun dans les champs. Il y a aussi de grandes pièces de pois, d’avoine, de seigle d’été en quelques endroits, et d’orge ça et là.
L’herbe ici est de deux sortes qui forment le foin des prairies et ce foin est très fourni et serré. Le paturin des prés a une tige assez élevée, mais ses épis sont très minces. Au pied de cette herbe, le sol est couvert de trèfle, de sorte que l’on ne peut trouver de meilleures prairies que celles-là. Toutes ces prairies ont été auparavant des champs de blé; on ne les fauche qu’une fois l’été, parce que le printemps commence tard.
Près de chaque ferme on voit un carré planté de choux, de citrouilles et de melons. Les champs ne sont pas toujours ensemencés; on les laisse en friche tous les deux ans. On ne laboure pas les terres en friche durant l’été, de sorte que les herbes sauvages y croissent en toute liberté, et les bestiaux les broutent pendant toute la saison.
Le blé d’hiver de Suède et de seigle d’hiver ont été essayés en Canada, car on ne sème ici que le blé d’été, l’expérience ayant démontré que le blé et le seigle de France semés en automne ne supportent pas l’hiver.
Le Dr. Sarrazin s’est procuré de Suède une petite quantité de blé et de seigle de l’espèce dite hiver. Elle fut semée en automne, passa l’hiver sans dommage aucun et rapporta de beau grain, à épis plus petits que le blé du Canada, il est vrai, mais près du double plus pesants, et ce grain donna une plus grande quantité de belle farine que le blé d’été. Je n’ai jamais pu savoir pourquoi l’expérience n’a pas été continuée.
On peut, me dit-on, faire ici avec la farine de blé d’été du pain blanc qui vaille celui fait en France avec la farine de blé d’hiver. Je tiens de plusieurs personnages que tout le blé d’été maintenant cultivé ici vient de Suède ou de Norvège, car les Français, à leur arrivée, ont trouvé le froid en Canada trop sévère pour leur blé d’hiver, et leur blé d’été ne venait pas toujours à maturité, à cause du peu de durée de la saison.
À la baie Saint-Paul, le blé est l’espèce de grain que l’on sème en plus grande quantité. Le sol est très fertile, et même on récolte quelques fois vingt-quatre ou vingt-six boisseaux pour un; le rendement ordinaire est de dix ou douze pour un.
Le pain est plus blanc ici que nulle part ailleurs en Canada. On sème beaucoup d’avoine, qui réussit encore mieux que le blé. On sème aussi des pois en grande quantité: ils rapportent plus qu’aucune céréale; il y a des exemples de rendement de pois allant jusqu’à cent pour un.
L’habitant de la campagne ne sème et ne cultive de lin qu’autant qu’il lui en faut pour son usage. À la côte de Beaupré on fait du fromage en mains endroits, mais celui de l’île d’Orléans est regardé comme meilleur. Petit, mince, rond de forme et de quatre à la livre de France, il se vend trente sous la douzaine. Une livre de beurre salé coûte dix sous, et la même quantité de beurre frais quinze sous à Québec. Anciennement, on pouvait avoir une livre de beurre pour quatre sous ici.»
Source: The America of 1750: Peter Kalm’s travels in North America, A. B. Benson, édit. (2 vol., New York, 1927).

Voir aussi :
- Castor en Nouvelle-France
- Carcajou en Nouvelle-France
- Histoire du cheval
- Colibri en Nouvelle-France
- La faune en Nouvelle-France
- Enseignement en Nouvelle-France
- Paysages de Nouvelle-France
- Vie des paysans en Nouvelle-France
- Bétail en Nouvelle-France