Vous ne le saviez pas !

Matière Sombre

Matière Sombre

Matière sombre et l’univers

Où se cache l’univers ? Une découverte de Claude Carignan jette un peu de lumière sur la matière sombre, qui composerait 90 % de notre univers.

Par Daniel Baril

Quatre-vingt-dix pour cent de la matière qui compose notre univers existe sous une forme qui nous est inconnue. La matière telle que nous la connaissons, et que nous pouvons étudier grâce aux radiotélescopes, ne constitue en effet que 10 % de l’univers connu.

Il y aurait de quoi jeter une douche froide sur les prétentions des roseaux pensants que nous sommes, mais ceci ne fait que stimuler l’ardeur des astrophysiciens. Des chercheurs tentent de percer le secret de cette matière communément appelée « masse manquante », mais plus proprement « matière sombre » parce qu’elle échappe à notre observation. Ils ont déjà soulevé un coin du voile.

Question de vitesse

Mais d’abord, comment les scientifiques savent-ils qu’il y a plus de matière sombre que de matière visible ? Tout simplement par la vitesse de rotation des galaxies. Cette vitesse est plus grande au centre des galaxies, là où il y a le plus de matière.

Théoriquement, elle devrait décroître, vers la périphérie, de façon proportionnelle à la diminution de la quantité de matière.

« Mais ce n’est pas ce que nous observons, explique professeur Claude Carignan, du Département de psychique de l’Université de Montréal, au Québec. À un certain point, la vitesse cesse de décroître et se stabilise. C’est ce phénomène qui nous fait postuler l’existence d’une matière sombre entourant les galaxies et que nous ne voyons pas. »

Les travaux du professeur Carignan lui ont permis de devenir le premier astronome à réussir à calculer la masse totale d’une galaxie naine en recourant aux 27 radiotélescopes du Very Large Array, au Nouveau-Mexique, lis ont également démontré que la matière sombre n’était pas dispersée dans l’ensemble de l’univers mais concentrée, comme la matière visible, dans les galaxies.

Le résultat le plus important est d’avoir déterminé que la distribution de la matière sombre correspond exactement à la distribution de l’hydrogène ; cette règle vaut autant pour le centre des galaxies, où l’on retrouve moins d’hydrogène, que pour la périphérie, où l’on retrouve la plus grande partie de la matière sombre.

Deux théories

Il pourrait s’agir là d’un élément capital permettant de déterminer la nature de cette masse manquante. « Deux théories s’opposent sur cette question, reprend le physicien. Nous pensons qu’il s’agit de matière baryonique, c’est-à-dire constituée des mêmes particules élémentaires que celles que nous connaissons. Elle pourrait former des nuages de gaz ou des étoiles naines brunes comparables à Jupiter mais pouvant faire jusqu’à 100 fois la masse de cette planète gazeuse. Les cosmologistes, quant à eux, pensent qu’il s’agirait d’une matière non baryonique, donc d’une nature exotique inconnue.»

Pour le professeur, rien ne justifie le recours à une matière exotique. Bien au contraire, sa découverte permet de penser que puisque la matière sombre est distribuée selon le même modèle que l’hydrogène, c’est qu’elle répond aux mêmes lois et qu’elle est constituée de particules du même type.

Pas de « big crunch »

Ceci a également des conséquences sur les théories concernant l’évolution de l’univers. Si la matière visible et la matière sombre constituent 100 % de la matière composant notre univers, celui-ci n’est alors pas suffisamment dense pour que cesse son expansion et qu’il se ré-contracte sur lui-même dans un « big crunch » possiblement suivi d’un autre big bang.

« Pour soutenir la théorie de l’expansion-contraction, les cosmologistes ont besoin de 99 % de masse manquante.

Actuellement, rien ne nous permet de soupçonner l’existence de ces 9 % supplémentaires qui d’ailleurs serait incompatible avec la théorie du big bang ; le rayonnement fossile de l’explosion originelle nous empêche en effet de penser qu’il y aurait une telle quantité de particules. C’est pourquoi les cosmologistes sont obligés de recourir à une matière exotique. »

« Dans l’état actuel des connaissances, conclut Claude Carignan, on doit supposer un univers ouvert. On ne peut rien dire de plus.» Le chercheur reconnaît la possibilité que l’on puisse un jour découvrir plus de matière, «mais pour l’instant, dit-il, c’est de la philosophie.»

Les Diplômés, automne 1995, #387.

Matière sombre

Sont grandes les prétentions des roseaux pensants que nous sommes. Image © : Megan Jorgensen.

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