Thérapie comportementale

Dialectique en thérapie comportementale

Thérapie comportementale et ses particularités.

Dialectique dans l’équilibre des objectifs

Maintenir une posture dialectique peut être difficile pour les thérapeutes, car il est tentant de s’enfermer dans un concept à l’un des extrêmes plutôt que de percevoir directement comment deux vérités coexistent dans une synthèse plus large. Cela est particulièrement compliqué pour deux des principaux objectifs de la TCD (Thérapie Comportementale Dialectique) : améliorer la régulation des émotions du client et réduire des cibles prioritaires comme l’automutilation. C’est pourquoi les thérapeutes en TCD considèrent ces deux objectifs sous un prisme dialectique.

Dialectique de la régulation émotionnelle

La TCD (Thérapie Comportementale Dialectique) propose un objectif dialectique en matière de régulation émotionnelle. Les clients apprennent à la fois des compétences pour modifier leurs émotions et à accepter celles-ci telles qu’elles sont. En théorie, ces positions semblent contradictoires et véhiculent un message ambigu sur la façon de répondre à son expérience intérieure. Pourtant, lorsque nous examinons notre propre vécu, le paradoxe se résout. Les moments les plus difficiles de nos vies nécessitent souvent à la fois une régulation (modification) et une expérience consciente (acceptation) de nos réponses émotionnelles.

Considérons un exemple clinique

Une cliente, engagée dans une procédure de divorce acrimonieuse, a perdu la garde principale de sa fille de deux ans. L’avocat de son mari a dressé un portrait humiliant de ses hospitalisations psychiatriques répétées et de ses tentatives de suicide, réussissant à minimiser les progrès récents de son traitement. Perdre la garde est une expérience douloureuse pour n’importe qui, surtout lorsque ses propres erreurs ont contribué à la décision.

Cependant, pour cette cliente, ses émotions étaient d’une intensité écrasante et envahissante. Elle était submergée par la douleur. Tout contact avec son ex-mari, réel ou imaginaire, était comme une étincelle jetée sur de l’essence. Sa souffrance s’embrasait en colère et en fantasmes de vengeance. Elle se méprisait elle-même, convaincue que l’accusation de son ex-mari – affirmant qu’elle était une mauvaise mère – était vraie, et que sa fille serait mieux sans elle. Chaque fois qu’elle imaginait un avenir sans voir sa fille au quotidien, elle pleurait, accablée de chagrin. Elle avait des envies de capituler et de renoncer aux visites plutôt que d’endurer cette douleur. Des heures durant, elle restait sous le choc, détachée et engourdie.

Équilibre thérapeutique

Cependant, elle disposait de peu de temps pour traiter ses émotions avant de devoir prendre ses prochaines décisions, car le tribunal exigeait qu’elle commence une médiation pour définir ses droits de visite. Afin d’établir sa crédibilité et de négocier les meilleures conditions possibles, elle devait démontrer sa compétence. Dans ces interactions émotionnellement difficiles avec le tribunal ou son ex-mari, son esprit était en plein tumulte. Pourtant, si elle montrait ne serait-ce qu’un signe de dysrégulation émotionnelle, son ex-mari l’exploiterait contre elle. Ses objectifs dans cette situation exigeaient une régulation émotionnelle d’une grande précision.

Thérapie comportementale
Thérapie comportementale – la religion est un bon moyen. Photo de Megan Jorgensen.

Grâce à l’analyse en chaîne, le thérapeute et la cliente ont identifié la honte comme l’émotion qui menait aux réponses problématiques. Cette émotion surgissait surtout lorsqu’elle entendait ou imaginait être une « mauvaise mère ».

Harmonisation de la thérapie

Lors d’une longue séance, ils ont examiné sans détour la véracité de cette critique. La cliente a énuméré toutes les fois où elle avait échoué avec sa fille et n’avait pas respecté ses propres standards. Le thérapeute l’a soutenue avec la validation pour qu’elle ressente la honte sans adopter des réponses secondaires problématiques.

La validation a aussi activé une émotion adaptative. Sa souffrance venait de son amour immense pour sa fille et de son désir profond d’être une bonne mère. Ensemble, ils ont pratiqué l’acceptation radicale en Thérapie Comportementale Dialectique, explorant les causes de ses échecs parentaux sans minimiser les conséquences.

Avec l’aide du thérapeute et spontanément, la cliente a vu sa honte se transformer en regret sincère et en volonté d’agir pour réparer ses erreurs. Elle a ressenti une fierté nouvelle en réalisant combien elle investissait dans la thérapie pour mieux soutenir sa fille.

La cliente éprouvait une forte colère contre son mari. Le thérapeute l’a aidée à apaiser cette émotion pour éviter des attaques verbales ou physiques. Ses amis, solidaires, alimentaient sa rage en utilisant la photo de son mari comme cible ou en critiquant constamment son comportement.

Médiation

Avant la médiation, elle leur a demandé de changer d’approche et de parler du divorce de manière neutre et mesurée. Elle a aussi appris à gérer son souffle pour calmer sa colère face aux provocations de son ex-mari. La femme inspirait trois secondes, retenait son souffle deux secondes, puis expirait lentement cinq secondes, en marquant une pause finale. Elle imaginait placer chaque pensée ou émotion dans une boîte et se répétait doucement « plus tard ».

Seule, elle pratiquait cette méthode et l’acceptation radicale de sa honte en observant une photo de son mari avec leur fille. Elle plaçait et retirait l’image d’une enveloppe, répétant l’exercice pour renforcer sa maîtrise émotionnelle. Elle a appris à diriger son attention pour affronter ses émotions et à se détourner d’elles pour les réguler. Selon la dialectique, ces deux stratégies sont valides et doivent être adaptées aux objectifs du moment.

thérapie
Les dernières feuilles. Photo de Megan Jorgensen.

Équilibre dialectique des stratégies

Utiliser les stratégies de façon dialectique permet à la thérapie de progresser malgré les impasses et les difficultés rencontrées. Les stratégies de validation s’équilibrent avec des stratégies comportementales comme l’orientation, l’engagement, l’analyse en chaîne et la résolution de problèmes. Trois autres groupes de stratégies préviennent la polarisation excessive : stratégies stylistiques, gestion de cas et stratégies dialectiques spécifiques. Les stratégies stylistiques concernent la communication du thérapeute, équilibrant chaleur réciproque et confrontation irrévérencieuse.

Les stratégies de gestion de cas aident le client à gérer son environnement social en alternant conseil et intervention ciblée. Par contre, les stratégies dialectiques ciblent directement la polarisation et facilitent l’adaptation aux complexités du changement thérapeutique. Chaque approche vise à combiner l’acceptation de la vulnérabilité et le renforcement des forces du client.

(Source : Doing Dialectical Behavior Therapy (A Practical Guide by Kelly Koerner).

Voir aussi :

thérapie
L’équilibre thérapeutique et la vie. Photo de Megan Jorgensen.

Laisser un commentaire