Les émotifs ANONYMES
Réunissant des personnes ayant connu la dépression, la solitude ou le manque d’estime de soi, des groupes d’émotifs anonymes se sont répandus dans plusieurs villes du monde. Quartier Libre est allé à la rencontre du groupe du quartier Rosemont pour en savoir plus.
Dans la petite salle éclairée par deux bougies, la vingtaine de participants sont assis en cercle. Tous ont plus de 40 ans. Une personne se lance: «Je suis Marine, toujours impuissante devant les événements de ma vie.» est la phrase type qui remplace le classique Bonjour, je m’appelle X et je suis alcoolique. La personne qui a pris la parole fait ensuite sa confession en rapport avec le thème du jour.
Aujourd’hui: le désir de plaire aux autres. Tous tournent dans les événements de leur enfance ou de leur semaine passée pour parler de ce mal à vaincre. Beaucoup avouent avoir été trop généreux pour être aimés et disent en quoi le programme des émotifs anonymes pourrait les aider à s’en sortir.
Chaque personne dispose de quatre minutes pour s’exprimer sur le thème du jour. L’animateur lève la pancarte « conclure avec amour » pour interrompre les plus loquaces. N’est-ce donc pas plus efficace d’aller voir un spécialiste ? «Nous offrons un accueil chaleureux et une discussion avec des personnes vivant des situations similaires. Le plus [important] ici, c’est le lien d’appartenance», répond Antoine, le doyen du groupe. Sinon, ajoute-t-il, c’est comme toutes les thérapies: «ça marche pour certains, moins vite pour d’autres». Pour ceux qui veulent s’exprimer plus longtemps, Hugues, l’animateur de la réunion, explique qu’«une fois par mois, ils peuvent tenir une conférence de trente minutes». Une autre participante, Françoise, ajoute que «chacun évolue à son rythme. Il n’y pas dépression.»
LA RELIGION TRÈS PRÉSENTE
Un crucifix est fixé au mur de la salle et les références à Dieu, récurrentes. La prière de la sérénité ouvre la réunion et on la chante main dans la main en fin de réunion. Émotifs anonymes se défend pourtant sur son site d’être un groupe religieux. «C’est un groupe spirituel. On laisse la religion à la porte, précise Antoine. Il s’agit de croire en une puissance supérieur qui nous sert de soutien pour notre relèvement personnel, Peu importe le nom qu’on lui donne».
Jusqu’alors, la contribution volontaire des membres et la vente de documentation assuraient le financement du groupe. Dans son dépliant, il soutient refuser tout don pour éviter des influences politiques ou idéologiques. Or, à la fin de cette réunion, les membres discuteront de l’éventualité de contrevenir à cette norme. «Pourquoi pas, des groupes aux États-Unis le font déjà. Ça ne semble pas gêner leurs activités », dit Hugues.
ORIGINES
Émotifs anonymes a été fondé en 1971 aux États-Unis par une personne qui souhaite rester anonyme. Un an plus tard, l’un des fondateurs créa une branche à Montréal. Le concept est resté le même. On se nomme par le prénom pour préserver l’anonymat. Le groupe reste ouvert à tous. Un kit contenant des informations sur le groupe est remis à chacun avec un jeton, sur lequel est inscrit «Le premier pas».
