Réflexions sur Jonathan Swift
Quand un génie véritable apparaît en ce bas monde, on peut le reconnaître à ce signe que les imbéciles sont tous ligués contre lui. Cette citation de Jonathan Swift illustre l’esprit de cet Irlandais qui a passé sa vie à lutter contre les esprits réactionnaires de son époque.
Après une carrière avortée de pasteur, il écrit La Bataille des livres, qui prend position dans la querelle des Anciens et des Modernes, et aura beaucoup de retentissement.
Puis il multiplie les pamphlets et les satires, les textes moquant ses contemporains (au point de déplaire à la reine Anne qui le force un temps à l’exil). Voici quelques-unes de ses autres phrases célèbres : « Nous avons tout juste assez de religion pour nous haïr, mais pas assez pour nous aimer les uns les autres. » «Avoir qu’on a eu tort, c’est prouver modestement qu’on est devenu plus raisonnable. » « Les lois sont semblables aux toiles d’araignées, elles attrapent les petites mouches mais laissent passer les guêpes et les frelons. »
Atteint d’une maladie qui lui donne des migraines, des nausées, des vertiges et des sifflements permanents aux oreilles (maladie de Menière), Johnathan Swift sera connu pour son visage taciturne et son absence de rire ou de sourire. Cela ne l’empêche pas de produire une œuvre littéraire foisonnante d’humour.
Dans son ouvrage le plus célèbre, Les Voyages de Gulliver, écrit en 1721, son héros, Lemuel Gulliver, médecin survivant d’un naufrage, échoue sur une île peuplée de gens de petite taille, les Lilliputiens, qui ne cessent de se faire la guerre.
Dans un second voyage, Gulliver arrive sur une deuxième île étrange, Brobdingnag, peuplée cette fois non pus de Lilliputiens, mas de géants. Pour eux il est minuscule. Les habitants de cette île exhibent Guillvier comme une curiosité de cirque, et la reine le considère comme un précieux bijou vivant.
Dans un troisième voyage, Gulliver visite l’île volante de Laputa où vivent des philosophes et des scientifiques qui veulent prédire la fin du monde, mais qui se contredisent tous et perdent leur temps dans des débats intellectuels ineptes.
Enfin, dans son dernier voyage, Gulliver arrive au pays des Houyhnhnms, qui sont des chevaux parlants et très sages. Ces derniers tiennent les hommes qu’ils nomment Yahoos pour des animaux primitifs.
Jonathan Swift racontera que l’idée de ce roman lui était venue lors du krach économique de 1720. Il avait acheté des actions de la Compagnie des Mers du Sud pour 1000 livres. La montée de la Bourse avait d’abord fait grimper son investissement à 1200 livres, puis la valeur s’était complètement effondrée, ruinant tous les petits actionnaires. Les aléas de la fortune lui avaient inspiré cette métaphore du changement de taille de son héros en fonction de ses rencontres sur des îles lointaines.
Jonathan Swift meurt en 1745, à 77 ans, à Dublin.
Toute sa fortune sera versée à un hôpital psychiatrique: le bien nommé St. Patrick Hospital for Imbécils.
(Tiré de l’Encyclopédie du Savoir Relatif et Absolu, par Edmond Wells. Tome VII. Bernard Werber, Troisième Humanité. Éditions Albin Michel et Bernard Werber, Paris, 2012).
Voir aussi :
