Densité des populations et progrès

Le lien entre la densité des populations et le progrès

Selon le chercheur Émile Servan-Schreiber, le niveau technologique, la sophistication culturelle et la rapidité à innover dépendent de la densité des populations plus que des cerveaux des individus qui la composent.

Dans son ouvrage Supercollectif, il explique que le meilleur moyen d’assurer la transmission des connaissances est de multiplier les élèves afin d’augmenter les chances de conservation du savoir des maîtres.

Cela explique les différentes étapes de l’histoire de l’humanité.

À l’ère nomade, les populations sont dispersées, les tribus sont composées de vingt à cinquante personnes qui vivent dans des buttes et qui suivent le gibier. Tous les membres de la tribu sont des chasseurs-cueilleurs. Le peu de savoir accumulé est intégré par chacun des individus du groupe et transmis de bouche à oreille de génération en génération avec un fort risque de déperdition.

Ensuite vient l’ère agricole. Les communautés humaines passent de 500 à 2000 personnes sédentarisées, installées dans des villages. Dès lors, il devient possible que certains individus se spécialisent et que les savoirs se transmettent de maître à disciple, comme la métallurgie, l’agriculture, l’élevage, l’artisanat, la médecine, l’architecture.

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Puis arrive l’ère industrielle. On assiste à l’exode rural et les villes grandissent, les communautés aussi. 2 000 à 100 000 individus sont désormais regroupés dans la même agglomération. Le savoir est transmis par des écoles, des universités et on tend à une plus grande spécialisation dans tous les domaines. Des médecins spécialistes relaient les généralités, avec les cardiologues, des dermatologues, des dentistes, etc. De la même manière, les ingénieurs, les architectures et tous les autres métiers voient leur discipline se fragmenter en branches spécialisées spécifiques.

Advient enfin l’ère numérique. Les villes contiennent plusieurs dizaines de millions d’individus. Grâce à Internent, le savoir se diffuse de plus en plus et l’on trouve des savoirs encore plus spécialisés.

À l’ère nomade, le PIB (le produit intérieur brut généré par le groupe ou la nation) double tous les 250 000 ans. C’est-à-dire qu’il faut attendre 250 000 ans pour que les innovations permettent de doubler la richesse. À l’ère agricole, le PIB double tous les 1 000 ans. (Comme les gens sont dans des espaces plus denses, ils peuvent plus facilement se spécialiser et transmettre). À l’ère industrielle, il double tous les 15 ans.

Finalement, à l’ère numérique, le PIB double tous les mois!

Ainsi, en densifiant les populations sur un même territoire on est passé d’un collectif lent et généraliste à un supercollectif rapide et spécialisé.

(Bernard Werber, Sa majesté des Chats, Encyclopédie du Savoir Relatif et absolu, Volume XII.)

Pour en apprendre plus :

C'est fragile, les humains. Et ça râle tout le temps. En tout cas, ils ne sont pas doués pour sauter avec élégance depuis les branches des arbres (Bernard Werber). Illustration par Bing.
C’est fragile, les humains. Et ça râle tout le temps. En tout cas, ils ne sont pas doués pour sauter avec élégance depuis les branches des arbres. (Bernard Werber). Illustration par Bing.

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