Mouvements littéraires au XIXe siècle
Romantisme
Le romantisme naît en Europe, notamment, en Allemagne et en Angleterre, en réaction contre la domination de la raison du siècle des Lumières et en réaction contre les progrès de l’industrialisation. C’est le premier mouvement littéraire du début du XIXe siècle et les adeptes de ce courant favorisent l’expression du moi, grâce à l’introspection et à l’exploration des rêves idéales. Ils privilégient la poésie, d’abord comme état d’âme, ensuite comme véhicule littéraire et ils créent la prose lyrique.
Les adeptes du romantisme voient en Jean-Jacques Rousseau un précurseur de leur courant littéraire. Ce sont François René de Chateaubriand et Madame de Staël qui l’introduisent en France, tous deux en contact direct avec l’Allemagne et l’Angleterre.
Chateaubriand, rentré en France après un exil en Angleterre durant la Révolution française, se rend célèbre par la publication de deux romans dont l’action se situe en Amérique du Nord : Atala, paru en 1801 et René, publié en 1802. D’ailleurs, il publie en 1802 Génie du christianisme, une apologie de la religion chrétienne. S’exprime là le désarroi de toute une génération déçue par la Révolution française.
De l’Allemagne, paru en 1810, rend compte du séjour de Madame de Staël dans ces contrées. L’auteure contribue ainsi à élaborer une première doctrine romantique en France. La poésie y est présentée comme un état permanent, caractérisé par l’enthousiasme et l’apothéose du sentiment.
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Cependant, le romantisme français, en tant que mouvement littéraire, naît grâce au recueil Les Méditations d’Alphonse de Lamartine, paru en 1820. Ce recueil de 42 poèmes, tiré à 500 exemplaires, contient des poèmes composés entre 1815 et 1820, dont les plus fameux sont : Le Lac, L`Isolement, Le Soir, Le Vallon, Le Golfe de Baïa et L`Automne. Les Méditations, début de la poésie romantique dans la littérature française, ont un magnifique succès. Après la poésie sensuelle, sèche et conventionnelle, on est surpris et charmé d’entendre un poète qui ose être ému et sincère, dont la mélancolie, doucement élégiaque, n’en est pas moins profonde.
(Notons qu’Alphonse de Lamartine, avec ses Méditations sera l’auteur romantique français le plus acclamé au Canada. François-Xavier Garneau le découvre en 1831 et s’en inspire).
Le romantisme arrive à son apogée lors de la bataille littéraire. Elle se fait autour de la pièce Hernani de Victor Hugo, en 1830. Les classiques, défenseurs des unités dramatiques et les romantiques, prônent des formes plus libres. Ils s’affrontent au cours de cette querelle épique.
Dans le Bas-Canada, pourtant, les conservateurs refoulent pendant longtemps les idées romantiques. D’autant avec plus de succès qu’ils sont puissamment appuyés par l’Église. Au Québec, on fait la promotion de la poésie didactique de l’abbé Delille (traducteur de Virgile) et on s’en tient à l’esthétique classique du Cours de littérature ancienne et moderne que signe de Laharpe, vivement attaqué par Philippe Aubert de Gaspé fils dans L`Influence d’un livre.
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Toutefois, déjouant la censure, deux auteurs préromantiques reçoivent un accueil favorable au Bas-Canada. Il s’agit de Bernardin de Saint-Pierre, disciple de Jean-Jacques Rousseau, auteur de Paul et Virginie et de Chateaubriand dont la popularité ira croissante. Son L`Itinéraire de Paris à Jérusalem est disponible au Québec (Bas-Canada) en 1812, moins d’un an après sa publication en France. En 1826, avec la parution du premier volume des Œuvres complètes, l’influence de François René Chateaubriand devient énorme au Bas-Canada. Sous le manteau de ses œuvres apologétiques du christianisme appréciées par l’Église, au Canada se répandent des idées romantiques. En 1826 encore, en France, La Préface de Cromwell de Victor Hugo provoque le débat passionnant entre Anciens et Modernes et cette polémique trouve des échos au Bas-Canada.
Grosso modo, 1826 marque une rupture entre l’époque du classicisme qui se meurt, et celle du romantisme qui prend son essor.
Réalisme et naturalisme
Le réalisme, cette doctrine littéraire, se fonde sur l’exigence de l’impassibilité de l’auteur. Il ne doit pas alors laisser sentir sa présence. C’est l’écrivain français Gustave Flaubert qui a élaboré le réalisme. Ce mouvement, influencé par le développement de la science et, un peu plus tard, par l’objectivité froide du regard photographique, émerge dans des œuvres comme Le Rouge et le Noir de Stendhal (1830) et le Père Goriot de Balzac (1835-1836).
L’écrivain doit imiter le réel et décrire objectivement les êtres, les choses et les situations. Ce souci l’amène à se documenter minutieusement et au Bas-Canada, c’est la révolte des Patriotes qui a empêché la pleine éclosion du réalisme comme doctrine ou mouvement littéraire. Le roman canadien s’est tourné vers la terre dans le but d’élaborer une utopie à l’abri de la réalité.
Quant au naturalisme, incarné en France par Émile Zola et Guy de Maupassant. Cette doctrine pousse l’objectivité jusqu’à revendiquer pour l’écrivain le statut d’expérimentateur scientifique. L’observation se double de l’expérimentation. Ainsi les personnages se confrontent à diverses situations où l’on scrute à la loupe les moindres réactions. Au Québec, c’est Albert Laberge, avec La Scouine, qui partagera l’esthétique du mouvement naturaliste.
Symbolisme
Le symbolisme comme doctrine littéraire triomphe en France à la fin du XIXe siècle. Il est le résultat de trois révolutions poétiques. Avec le symbolisme, on assiste à une sacralisation de l’Art, à la création de deux mondes radicalement séparés. Celui de l’idéal, hors d’atteinte, et celui de la quotidienneté, que l’on méprise.
Charles Baudelaire, dénonce les maux de la société dans les Fleurs du mal. Ainsi il suggère une correspondance entre les différents sens. Arthur Rimbaud, par contre, prône un déséquilibre des sens. En fait, un équilibre entre l’homme et la nature, qui permettraient d’exprimer l’inexprimable. Stéphane Mallarmé fait état d’un fossé infranchissable entre le langage quotidien et le Verbe du poète inaccessible au commun des mortels.
Au Québec, on reconnaît là la structure profonde de la poésie d’Émile Nelligan. Elle est influencée par celle des « poètes maudites » français. La poésie de Nelligan fait état du même écartèlement entre deux mondes irréconciliables, séparés jusqu’à leur rupture finale.
Par ElBa.