Chemin ouvert au public sous le régime français
Les propriétaires voisins du chemin devront procéder au bornage
Le chemin connu sous le nom de « Chemin du Bout de l’Île », situé au nord de l’Île Jésus dans la municipalité de St-François de Sales, a été établi et ouvert au public en 1733, sous le régime français. Le procès verbal du grand voyer Panet, en date du 21 mars 1833, ne s’applique pas à ce chemin.
La Corporation de St-François de Sales a aboli ce « Chemin du Bout de l’Île » en 1878, mais le règlement qui abolissait a été cassé par le Conseil du comté de Laval, le 11 septembre 1878. On devra procéder au bornage de ce chemin suivant la loi.
C’est ce qui ressort du jugement rendu, samedi, par l’honorable juge Philippe Demers, de la Cour supérieure, qui a ordonné le bornage, suivant la loi, dans une action intentée par la Corporation de la paroisse de St-François de Sales contre MM. Séraphin Mathieu et Antoine Mathieu, de St-François de Sales.
Dans son action, la Corporation demanderesse a déclaré être propriétaire du chemin situé dans la paroisse St-François de Sales, comté de Laval, connu sous le nom de « Chemin du Bout de l’Île » et situé au nord de l’Île Jésus. La Corporation décrit le chemin d’après le cadastre en vigueur depuis 1879.
La municipalité de St-François de Sales est en possession, comme propriétaire, de ce chemin, depuis longtemps. Ce chemin a été ouvert au public depuis 1733, par ordonnances du grand voyer Jean-Eustache Lanouillier de Boisclerc. Les ordonnances ont été exécutées et le chemin a été ouvert. On réfère de plus à l’ordonnance de l’intendant Hocquart, du 19 août 1735, ordonnant aux habitants de l’Île Jésus de passer sur le nouveau chemin sous peine d’amende. C’est un chemin royal établi à une largeur de 24 pieds français entre deux fossés. Ce chemin a toujours existé, tel qu’en fait foi les plans de l’ancien terrier de l’Île Jésus, lesquels sont en possession de la Société des Missions étrangères du Séminaire de Québec.
En 1816, on a fait un relevé de l’Île. Ce relevé fut fait par P.-L. Morin, géomètre de cadastre. En 1877, le cadastre a été préparé pour l’Île Jésus et la paroisse St-François de Sales. Le « Chemin du Bout de l’Île » est indiqué au plan du cadastre de St-François de Sales.
Les défendeurs, MM. Mathieu, sont propriétaires voisins du chemin. Le 2 juillet 1878, les auteurs des défendeurs ont demandé au Conseil de la Corporation de St-François de Sales d’établir un règlement pour abolir ce chemin. Le Conseil a aboli le chemin le 20 août 1878 par une majorité d’une voix. Les francs-tenanciers ont fait appel au conseil du comté de Laval, qui a cassé et annulé le règlement qui abolissait le chemin, par une décision du 11 septembre 1878. Le « Chemin du Bout de l’Île » a toujours continué d’exister, ouvert au public depuis 1733 sous le régime français.
Avec la loi des bons chemins en 1912, la Corporation de St-François de Sales a passé un règlement pour graveler ce chemin, malheureusement, vu la guerre de 1914, on n’a pas complété et mis en exécution ce règlement de 1912. La municipalité de St-François de Sales a toujours fait acte de propriétaire du « Chemin du Bout de l’Île ».
Depuis 1938,, les défendeurs troublent la Corporation en empiétant sur le chemin. Les défendeurs mettent des barrières et ont même labouré une partie du chemin. Les défendeurs ont été mis en demeure de borner le chemin pour empêcher les empiétements et les contestations futures.
Dans leur défense, MM. Mathieu ont plaidé que le « Chemin du Bout de l’Île » a été aboli par le grand voyer P.-L. Panet en 1833, suivant un procès-verbal homologué par la Cour des sessions. L’emplacement est devenu la propriété des défendeurs. C’est un chemin privé qui traverse leurs immeubles.
Le tribunal a ordonnée de procéder au bornage suivant la loi, pour les raisons suivantes :
« Considérant que le chemin dont il est question a été établi durant le régime français, que le procès-verbal du grand Voyer Panet, en date du 21 mars 1835, abolissant ce chemin, ne s’applique pas au chemin dont il s’agit :
« Considérant qu’en 1878, les auteurs des défendeurs demandent l’abolition du chemin; un règlement a été adopté en ce sens par une voix de majorité, mais ce règlement fut cassé par le Conseil du comté de Laval; ordonne de procéder au bornage suivant la loi et la nomination d’un arpenteur, condamne les défendeurs à la moitié des dépens jusqu’au plaidoyer ».
Messieurs Guérin, Cousineau, Godin et Pinard représentaient la Corporation de St-François de Sales.
(Texte paru dans le journal Le Canada, mardi, le 14 janvier 1941).
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