La guerre et le Québec

La guerre et le Parlement canadien

La guerre et le Parlement canadien

La responsabilité du Parlement canadien et l’entrée du Canada en guerre

Le Canada entrera-t-il en guerre ? (Réflexions publiées dans le journal Le Soleil, le 6 septembre 1939)

Avant de partir pour la capitale, les représentants du peuple canadien ont eu amplement le temps de consulter l’opinion publique. Par leurs discours ou par leurs votes, ils exprimeront consciencieusement la volonté, ou ce qu’’ils croient être le sentiment de leurs électeurs. Les décisions auxquelles la députation en arrivera seront acceptées, de bon ou de mauvais gré, comme celles de la nation. On jugera de la solidarité nationale à la majorité que la Chambre des Communes donnera aux mesures ministérielles.

Ce que seront ces mesures, on ne saurait le prévoir que dans les grandes lignes, en se basant sur les déclarations récentes du premier ministre. Nous en rappellerons quelques-unes, dont l’importance n’échappe à personne. Premièrement, l’honorable Mackenzie King a dit qu’il proposerait une politique d’aide efficace à l’Angleterre dans son conflit avec l’Allemagne hitlérienne; deuxièmement, il a promis de régler généralement cette politique sur la tradition du parti libéral canadien, telle que définie et pratiquée par Sir Wilfrid Laurier; troisièmement, il s’est engagé à consulter l’électorat avant d’envoyer des troupes canadiennes combattre en dehors du pays. En attendant que le gouvernement ait formulé ses propositions, il est sage de se bien pénétrer des notions élémentaires qui suivent: Dans un pays démocratique, tout en essayant de concilier tous les intérêts et toutes les opinions dans une politique véritablement nationale, le premier ministre et ses collègues doivent obtempérer aux vœux de la majorité populaire, ou se démettre; il est illusoire de compter que tous les administrés seront également satisfaits de la doctrine et des moyens que M. King proposera demain au Parlement; que le droit de critique subsiste, mais qu’il ne confère pas celui de désobéissance à la loi.

Depuis plusieurs années que les conflits d’idées et d’intérêts matériels permettaient de prévoir l’explosion d’un guerre catastrophique en Europe, Le Soleil a fortement conseillé aux autorités canadiennes de régler leur politique extérieure sur l’intérêt national en rapport avec la solidarité continentale des pays d’Amérique. Ce n’est pas notre faute si cet avis, largement appuyé par l’opinion canadienne-française n’a pas prévalu. Mais ce n’est pas parce que la majorité autrement, que nous aurions la témérité de : de son patriotisme ou d’encourager toute de sédition. La guerre est un grand mal mais l’anarchie est un mal plus grand.

En plus d’une information aussi vaste que possible et de commentaires prudents, notre journal a permis au peuple d’exprimer ses opinions sur les problèmes troublants de l’heure présente. On a pu constater la variété et la probité des sources auxquelles Le Soleil, puise pour donner au public des nouvelles dignes de foi. Dans une période critique comme celle dans laquelle entre la vie nationale, la connaissance des faits importe plus que les avis particuliers, mais il convient que ceux-ci puissent s’exprimer librement, afin d’être entendus et pesés par les hommes qui ont la lourde responsabilité de maintenir l’ordre en Canada.

Pourquoi la partie n’est pas égalé

Sous la volonté de son führer, l’Allemagne poursuit une guerre d’extermination contre les peuples qui ne veulent pas se laisser asservir. Torpiller un navire de passagers, cela ne fait pas scrupule aux émules des pirates qui, en 1918, coulaient sans hésitation un navire-hôpital; bombarder une ville non fortifiée, ce n’est qu’un exercice de tir pour l’aviateur boche; mitrailler les femmes et les enfants qui fuient un village incendié, ce n’est pour cet ennemi cruel que le complément d’un acte de terrorisme calculé.

Dans ces conditions, on est porté à trouver bien naïfs les appels des neutres en faveur d’un traitement moins inhumain des victimes innocentes de la guerre. À des combattants aussi généreux que courageux, comme les Anglais et les Français, il n’est pas nécessaire d’adresser de telles recommandations, mais c’est en vain qu’on les multiplierait à une soldatesque qui ne croit ni à Dien ni à la justice immanente. C’est un fait indéniable que les dictateurs imitent sur le plan général ce que les bandits pratiquent dans le crime particulier. Hitler est un révolté contre toute loi divine et humaine. 

Tout en condamnant les méthodes diaboliques de la guerre totale, il importe donc de s’habituer à l’idée qu’il n’est aucun forfait qui entrave l’action de l’état-major allemand dans l’accomplissement de son œuvre de destruction. En se levant contre les auteurs de cette barbarie, les peuples chrétiens doivent comprendre qu’ils ont à se défendre contre les plus féroces des fauves, car les passions mauvaises déchaînent dans l’âme des instincts auxquels la bête la plus repoussante ne saurait s’avilir. Sur la psychologie de l’horrible comme moyen de réduire un ennemi par l’épouvante, les hommes de guerre de l’école allemande ont édifié tout un système.

Cependant, dans cette exaspération même de la bête humaine se trouve un aveu d’infériorité, une preuve de démence, le symptôme du désespoir prochain, le signe de la damnation en cette vie dans l’humiliation de la défaite suprême. Si terribles que soient les forces du mal, elles ne peuvent longtemps prévaloir contre les forces spirituelles. C’est de cet élément moral que doit s’alimenter le courage de ceux qui ont à subir, de près ou de loin, une épreuve aussi terrible. De la, foi découle l’espérance. De même que d’autres générations ont triomphé de la violence, de même la nôtre peut compter sur la victoire du droit, de la justice, de la liberté.

La guerre est plus facile à déclarer que la paix n’est facile à organiser. (Émile de Girardin, homme politique français, né en 1802 et décédé en 1881, Pensées et maximes). Photo de Dr. Quack.

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